Tribune Juive

Loïc Henri ou la vie d’un Homme de bien, par Sarah Cattan

Je n’en sais pas beaucoup qui, basés à New York, à la tête d’un Cabinet qui roule, viennent se mouiller, se mêlant de l’Affaire Sarah Halimi mais encore du site democratieparticipative.biz. Demandant pour la première des comptes, alors que tous les acteurs temporisent, se taisent, se couchent, nous faisant presque oublier l’assassinat de Sarah la Juive en plein Paris, le 4 avril 2017, envoyant donc de New York un courrier au CSM, s’enquérant du traitement judiciaire du dossier par les Juges Ihuellou et Van Geyte, exigeant de savoir ce qu’il en est de la présence de ces 28 policiers qui assistèrent sans réagir au lynchage et à la défenestration de Sarah, rappelant qu’un magistrat a obligation de restituer aux faits leur exacte qualification juridique et demandant à ce titre pourquoi est refusée systématiquement la reconstitution du drame. Concluant, lui, à un faux en écriture publique lorsqu’ici sont refusés requalification et reconstitution. Interrogeant la France : Avons-nous vraiment envie de défendre Sarah Halimi.

Mais encore travaillant de concert avec le Conseil National des Barreaux afin de défendre les intérêts de son confrère Maître Dreyfus violemment diffamé par le site d’extrême droite. Annonçant que les autorités judiciaires de Californie ont ouvert une enquête contre la société Cloudfare qui héberge le dit site.

Loïc Henri ? Celui qui dit être devenu Juif de cœur en avril 1992 raconte ce jour où, appelant son fils, il entendit comme en écho David ? C’est juif ça… Et constata que personne n’avait bronché… Loïc Henri, il est donc aussi ce Juif de cœur qui s’interroge et nous interroge sur la place du Juif dans la société française.

A le voir s’adresser au jeune homme impertinent qu’il fut, Portant cheveux longs Ray Ban et Saint Laurent, on sait d’emblée que l’auteur de Ce qui est vécu n ‘est plus à vivre sera bienveillant mais que de cadeaux injustifiés il ne fera pas. Que d’éloges indus il ne rendra guère.

 

D’emblée il vous balance qu’il est le fruit d’un abus sur mineure. Chapitre 1. Ligne 1. Enfant caché. Enfant ballotté. Manou, la grand-mère, va recueillir celui qui se pisse dessus au bout de trente minutes de présence en classe. Il apprendra à lire seul, dévorant bientôt tout ce qui est à sa portée. Octobre 2017. Près de 60 ans plus tard, il évoque en deux lignes ce dernier rendez-vous manqué avec cette mère qu’il finira par comprendre : Je ne suis pas le fruit de l’amour. Je sais combien il est difficile d’aimer celui que l’on ne voulait pas.

Manou est celle qui l’élèvera. La Bible dans une main, elle est bobo avant l’heure. Naturo Naturiste. Si les conditions de vie sont précaires, elle lui aura sans doute enseigné l’essentiel : Tiens-toi droit Loïc Un homme qui marche courbé n’a aucune autorité. Ne baisse jamais les yeux si tu es dans ton droit. Sache clouer le bec des adultes par un français irréprochable.

La grand-mère l’envoie à l’Ambassador Collège en Californie : il sera Pasteur. S’en suivront 3 années de théologie protestante évangélique : Loïc découvrira que la foi c’est comme les bagnoles. Ça se décline en multiples versions. Confrontant les religions de ses contemporains, il n’a pas aimé … l’envers du décor.

Si Manou fut l’essentielle rencontre, d’autres, à venir, feront du jeune homme de vingt ans ayant pour seul bagage ces 3 années de théologie Celui qu’aujourd’hui il est : l’humanité, il dit par exemple l’avoir découverte, sous les drapeaux, en la personne de ses supérieurs.

Ces belles rencontres qui font une vie, c’est à croire que Lui les attire. Elles seront le baume sur l’absence d’une mère. Ce qui est vécu n’est plus à vivre : les échecs d’hier sont les réussites de demain. Il veut réussir. Il va y travailler.

Il crée sa première agence de communication. La théologie, n’ était-ce pas de la com, après tout. La conduite accompagnée, c’est beaucoup Lui. Le voilà business man. Il rame dur. Fait face aux tracasseries fiscales. Refuse d’être adossé à un groupe financier. Les combats de coqs, ça n’est pas pour lui, qui refuse, par orgueil, d’être racheté.

Arrivé sur le marché de l’information financière avec cinq ans d’avance

  1. Il veut être l’homme d’une vie assumée : ce sera New York. En famille. Un avocat lui a dit que c’était la ville où il pourrait s’exprimer. Le voilà chez Maître Claude Henry Kleefield. Au 1650 Broadway. Kleefield est connu : n’a-t-il pas fait condamner Reagan et Trump aussi. Il convainc Loïc de mener de front deux carrières: avocat et banquier d’affaire.
  2. Loïc Henri devient à trente ans un des plus jeune Français à obtenir une licence de banque à New York. Le voilà à Wall Street. Ses bureaux, La Financière Loïc Henri, sont au World Trade Center. Le jeune impertinent portant Ray Ban et Saint Laurent refuse la nationalité américaine. Il a pour principal banquier la BCCI. Mais la faillite de cette dernière entraîne la banque Loïc Henri Inc. dans la tourmente. A genoux mais pas mort : Son tort ? Etre arrivé sur le marché de l’information financière avec cinq ans d’avance.

Cabinet d’Avocats Henri & Partners

Son Juris Doctor en mains, Loïc fonde le cabinet d’avocats Henri & Partners. Si Bernard Tapie est un gros client, le Cabinet s’engage contre la contrefaçon de médicaments en vente sur le web mais assure parallèlement la défense de l’avocat Algérien ​Salah Dabouz ainsi que celle de plusieurs détenus politiques, militants des droits de l’Homme et opposants au régime Algérien. Droit de la faillite Droit de la famille De l’immigration sont aussi au programme : Loïc s’occupe de ces clients français désireux de se refaire une santé chez l’oncle Sam.

World Trade Center

Il était à Disneyland ce 11 septembre. Quand la nouvelle tomba. Il se souvient. Elles sont New York avait-il pensé en s’installant au quatre vingtième étage de la tour One. Il aimait cette énergie particulière, cette ambition revendiquée, ce brassage d’entreprises internationales qui acceptaient de partager leur culture.

Ce sont pour lui les pages les plus difficiles à écrire.

Se succèdent de courts chapitres.

Une page dédiée à sa Lady Suzanne Held. Une pause dans ce monde de l’art où les escrocs sévissent aussi.

Une lettre à Marie. Marie Trintignant. Loïc lui raconte les hommes de son enfance. Ceux qui jamais n’auraient levé la main sur une femme.

Un chapitre consacré à David Koubbi et Jérôme Kerviel. Fait d’interrogations. Sur l’intégrité d’un Magistrat : chaque fois qu’un magistrat refuse une pièce, ferme la porte à la preuve présentée par la défense, notre démocratie se meurt. Loïc Henri s’attarde à raison sur la mesure de garde à vue qui affecta Jérôme Kerviel et son avocat. Cette mesure privative de liberté. Qui pose la question des droits de la défense dans une société prétendant vouloir moraliser la vie publique : il n’y a pas de démocratie sans application intransigeante des règles régissant l’Etat de droit.

Est-ce l’avocat ou le citoyen qui appelle une justice impartiale. Indépendante. Qui exhorte à s’unir pour garantir le libre exercice des droits de la défense… Le voilà évoquant Cette France si douce aux criminels[1] lorsqu’il raconte comment, par une forme d’économie commerciale, son client poursuivi pour viol sera jugé en correctionnelle ? Lui refuse d’être l’avocat acceptant cette infamie, fût-elle au profit de son client. Il écrit à la Juge. Son refus que le crime commis sur des milliers de victimes devienne un simple délit. Il appelle à refuser ensemble la correctionnalisation du viol. Sa banalisation.

Plus avant, il comparera le Magistrat français maître en son royaume et l’arbitre qu’est le Juge américain. Nous parle de cette spécificité américaine où les deux parties fourbissent leurs armes avec une liberté de recherche de la preuve à faire pâlir de honte n’importe quel Magistrat français à la procédure pénale latine romano germanique qui induit l’avocat pénaliste à devenir l’avocat du diable. Les défendre tous et devenir tel Vergès un salaud lumineux : Je crois qu’il manque à la France l’humilité de regarder ce qui se fait ailleurs.

Ghardaïa

Sous ce nom à consonance douce, l’enfer. Loïc Henri liste les 37 Mzabs morts entre 1985 et 2015. Ces Mozabites, propriétaires de cette ville millénaire et que le pouvoir terroriste algérien veut réduire au silence. Lui ? Avec un confrère, il prend le dossier du Dr Fekhar. Arrêté. Torturé. Jugé à la hussarde. Sa plaidoirie dénoncera les vices de forme. Il exige la garantie d’une instruction crédible à charge et à décharge. Que soient garantis les droits de la défense. Soutenu par l’ONU, New York et Genève, il l’emporte, faisant libérer 42 prisonniers politiques.

Les réfugiés syriens de Figuig

14 juin 2017. Loïc Henri décidément est partout. Lui et Salah Dabouz alertent le Haut Commissariat aux Droits de l’Homme à Genève: le Maroc et l’Algérie sont accusés d’un crime grave, ici qualifié de non-assistance à personne en danger : ces 29 réfugiés syriens cantonnés dans des conditions tragiques près de village de Figuig, zone frontalière entre les deux états. Cette crise humanitaire dure depuis deux mois. Ce no man’s land est une parcelle d’enfer.

Amnesty international et autres défenseurs des droits de l’homme s’y collent : Le HCR Le Croissant rouge algérien. Le Soir d’Algérie. Le Soir d’Alger sous la plume d’Abla Chérif dénonça : Il a fallu qu’un avocat américain de renom s’en mêle. Alerte les Nations-Unies. Le CICR.

Le roi cède et ordonne le règlement immédiat de la situation : C’était la Journée internationale des réfugiés…

L’Affaire de la Chapelle ardente

Loïc Henri, il n’a pas oublié non plus L’Affaire de la Chapelle ardente, Affaire dans L’Affaire Merah. Il nous rappelle – et ils sont peu nombreux ceux qui le firent- que Gérard Longuet, Ministre de la défense de l’époque, se plia à l’infamie lors de l’hommage militaire rendu aux 3 soldats assassinés par le terroriste : Nous nous sommes couchés devant un islamisme rampant en piétinant les valeurs de la République.

Une vie payée cash

Sa vie ? C’est l’histoire d’un homme qui accepta de payer. Cash. Le prix de sa liberté comme l’inconfort de l’incertitude du lendemain.

Il a aimé ce qu’il appelle le temps d’insouciance.

Il a aimé découvrir l’excitation du Pari. Ne lui dites pas qu’il fut trader : il répondra qu’il fut Passeur d’espérance financière.

Et puis vint ce temps où l’homme de droit prit le pas sur l’homme d’affaires. Par nécessité. Puis par passion. Il trouva là un moteur. L’injustice. Moteur pour agir. Se battre. S’affirmer. Se guérir au travers de la confiance accordée.

Ainsi se lit le survol d’une vie de laquelle, par élégance, Loïc Henri nous aura épargné l’intime. Face à lui et à nous, le jeune homme en Ray Ban auquel furent délivrés à foison les conseils pour optimiser sa vie.

L’homme qui écrit sait la vanité de tout cela. C’est qu’il a flirté de près avec l’autre Vie. Celle capable de vous détruire après vous avoir souri : Un jour vous décidez. Ce qui est vécu n’est plus à vivre.

Vous l’aurez compris : il ne croit pas au destin figé. Si nous acceptons de payer le prix de notre engagement, notre vie est un choix. Un choix fait du refus de se mettre à genoux face à ceux, nombreux, qu’un jour nous déçûmes.

 Savez-vous pourquoi je me bats ? Pour être à votre écoute dans votre recherche d’humanité. Elle prenait tout son sens, la dédicace qu’il m’offrit en m’envoyant le récit de sa vie. Ce qui est vécu n’est plus à vivre[2].

Sarah Cattan

[1] Xavier Raufer. Professeur de Droit.

[2] Loïc Henri. Meduse Publishing Inc. 2018.

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