Certes, Simone Veil est entrée au Panthéon pour ce qu’elle a fait et non pour ce qu’elle a subi. Certes, c’est son action remarquable qui lui vaut aujourd’hui la reconnaissance de toute une nation.
Mais alors que beaucoup ont voulu voir, dans cette cérémonie truffée de symboles, la construction européenne comme fil rouge, je retiendrai pour ma part qu’avec le cercueil de Simone Veil, c’est la mémoire de la Shoah qui est entrée au Panthéon après avoir été exposé vendredi et samedi au Mémorial.
Quand l’épreuve d’Auschwitz devient une composante de l’identité française
Quelle fut forte et omniprésente, dans tous les hommages comme dans les discours de ses fils lors de l’hommage national aux Invalides, la place de la déportation : Avec cette entrée au Panthéon, l’épreuve d’Auschwitz devient une composante de l’identité française, disait Finkielkraut hier dans L’Esprit de l’Escalier[1], expliquant qu’il trouvait cette appropriation plus émouvante et plus authentique aussi que le plus jamais ça mis à toutes les sauces et même et surtout que la repentance.
Contrairement à ce qui fut souvent dit et démentant le mythe selon lequel les déportés restaient toujours silencieux du fait de l’horreur subie, Simone Veil, revenue des camps, n’avait qu’une idée : confier son expérience. Témoigner. Rendre hommage aux Justes de France.
Encore fallait-il trouver une oreille attentive accueillant ce désir de parler. C’est à partir de cette épreuve que s’est forgée la personnalité de celle qui avait toujours Auschwitz à l’esprit, poursuivit le philosophe, expliquant que cette parole parlait aux français renvoyés à leur propre expérience, et confiant comment, entendant Jean et Pierre-François Veil insistant sur le fait qu’ils n’avaient pas de grands-parents, il avait compris que cela singularisait beaucoup de Juifs ashkénazes : nous vivions parmi les ombres.
Le Son du silence de Birkenau : seuls les bruits de la Nature et le chant des oiseaux
La musique, de Schubert à la Marseillaise, fut omniprésente, portée par le violoncelle de Sonia Wieder-Atherton et les chanteurs de la Maîtrise populaire de l’Opéra Comique.
Du Kol Nidrei de Max Bruch au Nuit et brouillard de Ferrat interprété avec la langue des signes , en passant par le Song in Remembrance de Schubert, le chant yiddish Eli, Eli et le Moorsoldatenlied ou Chant des Marais, nous retiendrons le Son du silence de Birkenau, enregistré par le réalisateur David Teboul quelques jours avant la cérémonie, très précisément ce 19 juin à 5 heures du matin : ce bruit du silence du camp de concentration de Birkenau-Auschwitz accompagna le recueillement de la foule durant la cérémonie d’entrée de Simone et Antoine Veil au Panthéon dimanche 1er juillet, moment poignant en hommage à celle qui fut déportée à Auschwitz avec 1500 autres Juifs, alors qu’elle avait 16 ans. C’était en avril 1944.
[1] L’Esprit de l’Escalier. Radio RCJ-Causeur. Elisabeth Lévy et Alain Finkielkraut. 1er juillet 2018.
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