Le 3 mai 2016, dans un papier consacré à ceux qu’on appelle les avocats du diable, je vous parlais de Salah Abdeslam. De l’émoi que provoqua son arrestation.
Les psys étaient soulagés : les victimes allaient pouvoir l’entendre, celui qui était soupçonné d’être impliqué dans les attentats les plus meurtriers que la France ait jamais connus. Le seul membre encore en vie des commandos djihadistes du 13 novembre 2015.
A son chevet, ils se succédèrent, ces pénalistes aussitôt honnis tel leur client. Ceux dont les twittos affirmaient dans une indicible nuance qu’ils allaient se faire du fric sur le dos de nos morts, agressé physiquement pour celui-là, découragé par le comportement du présumé pour cet autre. Ceux qu’on appelle dans le jargon les avocats du diable. Qui acceptaient de le faire, le sale boulot.
Qui allaient donc défendre ici en l’occurrence celui dont Sven Mary disait qu’il était rien qu’un petit con de Molenbeek issu de la petite criminalité, plutôt un suiveur qu’un meneur. Qu’il avait l’intelligence d’un cendrier vide. Qu’il était d’une abyssale vacuité. Qu’il était l’exemple parfait de la génération GTA -Grand Theft Auto- qui croit vivre dans un jeu vidéo. Celui duquel il précisait : Je lui ai demandé s’il avait lu le Coran, ce que j’ai fait, et il m’a répondu qu’il avait lu son interprétation sur Internet. Pour des esprits simples, c’est parfait, le Net, c’est le maximum qu’ils puissent comprendre. Celui qu’il appelait … le petit Rebeu.
La stratégie du pénaliste Et celle du Présumé: LOL
Il avait même défini une stratégie, qu’il disait, le pénaliste : en faire un repenti.
Sauf que d’emblée, l’oiseau refusa de parler. Eh oui Contre toute attente, il en avait faite sienne une, lui aussi, de stratégie.
Dès lors, Lecteur, toi à qui j’avais rappelé, citant Cioran[1], que Le fanatisme était la mort de la conversation. Qu’on ne bavardait pas avec un candidat au martyre, ben j’avais plus rien à te dire.
Passèrent les semaines Passèrent les mois Passèrent deux années Passèrent les billets et autres indignations sur le sort qui était réservé au malfrat, hésitante qu’était la Belgique face à ce candidat au suicide auquel elle proposa salle de sport pour compenser la mise à l’isolement, le petit fut entre temps déplacé en France, développa une inflammation de l’appendice, retrouva sa cellule et enfin Enfin Un jour son procès commença.
Stupeur et Tremblements. Excuse me, Amélie : Il parla.
Quoi ? Ben Quoi ? Il avait bien le droit car n’était-ce pas de son âge, in fine, d’avoir bien le droit, il avait donc bien le droit, lui aussi, de changer de stratégie.
Celui que les media[2] appelaient à présent le djihadiste rompit donc son mutisme, et ce grand moment eut lieu hier jeudi 28 juin.
Il fit donc, selon une dépêche AFP relayée par mult media, une déclaration spontanée d’ordre général, à connotation religieuse et politique, justifiant les attentats : Nous ne vous attaquons pas parce que vous mangez du porc, vous buvez du vin ou vous écoutez de la musique, mais les musulmans se défendent contre ceux qui les attaquent, aurait-il déclaré, prenant en même temps à partie notre PR dont la soif de puissance et de renommée appelait à faire couler le sang des musulmans et l’enjoignant en somme à changer … ben lui aussi … de stratégie, avertissant que La sécurité ne régnerait pas sur notre territoire tant que cela continuerait.
Et Vlan. Tout le monde nota que c’était là la seconde fois que l’individu parlait, la première prise de parole ayant été décidée le 9 mars 2018 lors d’une confrontation, pour dédouaner un suspect.
Et la parole fut énoncée une nouvelle fois au sein du nouveau tribunal de Paris.
J’oubliais une toute première prise de parole, lors de son arrestation, où le gus expliqua avoir renoncé à se faire exploser le 13 Novembre, tentant en même temps de minimiser son rôle dans la cellule djihadiste.
Attends, Lecteur : tu as raison : notre homme avait, lors de son procès en février à Bruxelles concernant la fusillade du 15 mars 2016, contesté la légitimité du tribunal et affirmé placer sa confiance en Allah et c’est tout.
Et c’est tout … Ça va bien avec J’ai bien le droit
[1] De l’inconvénient d’être né. Emil Michel Cioran. Folio Essais. Paris. 1987.
[2] 20 Minutes. Dépêche AFP. 29 juin 2018.
Sarah Cattan
Et pis c’est tout, c’est comme et voilà : profond, direct et sans appel.