Contre l’antisémitisme, les Berlinois invités à porter la kippa

En Allemagne, la communauté juive et le gouvernement se mobilisent contre l’antisémitisme. Mercredi 25 avril, les Berlinois seront appelés à porter la kippa.

C’est une action unique en son genre. Mercredi 25 avril, l’ensemble des Berlinois, hommes et femmes, sont appelés, par les représentants de la communauté juive de la ville, à porter une kippa, le couvre-chef traditionnel des hommes. « Ensemble, nous voulons faire un geste important contre l’antisémitisme et l’intolérance et mobiliser une large partie de la population », expliquent les organisateurs. Une initiative similaire est prévue le 14 mai dans la ville de Francfort.

Le président du conseil central des juifs d’Allemagne a néanmoins émis, par prudence, quelques réserves la veille de l’événement, mardi 24 avril. « Je dois déconseiller à des personnes seules de se montrer dans le centre des grandes villes d’Allemagne avec une kippa », a-t-il déclaré dans un entretien à la radio RBB.

De récents incidents antisémites

Cette initiative berlinoise se veut une réponse à une série de récents incidents antisémites. Il y a quelques semaines, une écolière juive a été menacée de mort par des camarades d’origine arabe. Plus récemment, c’est l’équivalent allemand de la cérémonie des victoires de la musique qui a déclenché une polémique lorsque deux rappeurs ont remporté le prix du meilleur album hip-hop. Dans une de leurs chansons, ils évoquent des corps – les leurs – « plus maigres que ceux des détenus d’Auschwitz » et appellent à un « autre holocauste ».

Le dernier événement en date concerne l’agression d’un jeune homme, portant la kippa, dans un quartier huppé de Berlin. La victime a eu le temps de filmer les faits. Dans la vidéo, on voit son agresseur le fouetter avec une ceinture et lui demander, en arabe, s’il est juif. La victime a ensuite expliqué à des médias allemands être arabe israélien et avoir porté ce jour-là une kippa offerte par un ami. « Je n’aurais jamais imaginé que cela poserait problème à Berlin », a-t-il confié. La chancelière Angela Merkel a dénoncé une « agression terrible ». « La lutte contre l’antisémitisme doit être gagnée », a-t-elle ajouté.

250 000 Juifs en Allemagne

Soixante-treize ans après la fin de la guerre, on estime à 250 000 la population juive du pays dont 100 000 sont liées à des instances religieuses. Pour les autorités politiques, la résurgence de l’antisémitisme est un choc qui les pousse à réagir. Le nouveau gouvernement vient ainsi de créer un poste de commissaire fédéral chargé de la lutte contre ce phénomène. Felix Klein entrera en fonction le 2 mai et explique, dans une interview au quotidien Die Welt, vouloir « coordonner les actions des différents acteurs » et « rendre le problème de l’antisémitisme plus visible ».

Ce nouveau commissaire souhaite aussi affiner les statistiques. Officiellement, 470 actes antisémites ont été recensés dans tout le pays par la police en 2016, et 681 rien que pour la première partie de 2017. « 90 % des actes antisémites sont classés comme des actes d’origine d’extrême droite », explique Felix Klein. « Or, j’entends d’autres choses de la part des Juifs d’Allemagne, notamment que l’antisémitisme musulman est plus fort qu’il n’est représenté dans les statistiques », ajoute le nouveau commissaire.

La question de la montée d’un nouvel antisémitisme, véhiculé par des citoyens d’origine arabe et turque et par certains réfugiés arrivés depuis 2015, est devenue un thème récurrent dans les débats, notamment depuis l’entrée au Bundestag d’un parti populiste de droite. Dimanche 22 avril, Angela Merkel a elle-même dénoncé ce « nouveau phénomène ».

Plaintes et témoignages de la part de victimes

À Berlin, le centre d’information et de recherche sur l’antisémitisme (RIAS) recueille depuis 2015 plaintes et témoignages de la part de victimes. « L’antisémitisme est un problème de société », explique Alexander Rasumny. « On le trouve dans toutes les couches sociales, dans les milieux d’extrême droite et de gauche, parmi des gens peu politisés et parmi les populations immigrées. »

Cette institution constate une hausse importante des actes antisémites enregistrés dans la capitale entre 2016 et 2017, et notamment des insultes, menaces, à l’oral ou par écrit, qui peuvent mener à des agressions violentes. « Cela crée un climat de peur, au quotidien, auprès de la communauté », explique Alexander Rasumny.

Pour le porte-parole de RIAS, il est donc essentiel de « rester vigilant face à ces actes et insultes de tous les jours qui passent souvent inaperçus. »

Delphine Nerbollier (à Berlin)

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1 Comment

  1. Merci Angela d’ avoir ouvert les portes de l’ immigration aux pays en guerre fortement politisés. Comme si l’ immigration économique traditionnelle en Allemagne ne suffisait pas.

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