Cette année, près de 40.000 élèves israéliens de première et de terminale se rendront en visite dans les camps de la mort. Et ce, en dépit de l’adoption récente par Varsovie d’une loi rendant passible de prison toute allusion à la complicité de la Pologne dans le génocide nazi.
Parfois décrié pour de multiples raisons, le traditionnel voyage dans les camps de la mort en Pologne, organisé depuis 1988 et effectué chaque année par des milliers de lycéens israéliens en classe de première ou de terminale, ne semble pas près d’être remis en cause. Malgré l’adoption récente par Varsovie d’une loi rendant passible de prison toute allusion à la complicité de la Pologne dans le génocide nazi, le nombre de jeunes Israéliens qui feront cette année le déplacement devrait dépasser le chiffre record de 40.000 élèves.
Lors de la mise en place de ce rituel voilà tout juste 30 ans, une délégation nationale de 200 lycéens israéliens était alors concernée… C’est surtout au cours de ces cinq dernières années que le nombre de participants à la « Marche des vivants » a pris son essor. Entre 2012 et 2017, le nombre de jeunes Israéliens inscrits pour ce voyage annuel, le plus souvent organisé au mois de mars, est en effet passé de 25.000 à 32.000.
Cette augmentation de 30% provient du fait que le ministère de l’Education a accru la partie subventionnée par les pouvoirs publics de ce déplacement, qui coûte cher aux familles israéliennes et peut même, malgré l’allocation de bourses, être source de discriminations. Le coût du voyage se situe désormais dans une fourchette de 4.365-4.800 shekels contre une fourchette de 5.000-7.000 shekels auparavant.
A quand des voyages alternatifs ?
Ce qui n’empêche pas certains détracteurs de continuer à critiquer le principe de ces voyages. « Il serait judicieux d’examiner la possibilité d’organiser des visites dans d’autres pays », confiait ainsi l’universitaire Idan Yaron, du Collège académique d’Ashkelon au journal Haaretz. « Si la récente polémique provoquée par la loi mémorielle polonais, pouvait donner le jour à des voyages alternatifs, le texte aurait au moins eu un effet positif ».
Et cet enseignant d’enfoncer le clou : « Quoiqu’il en soit, ce voyage en Pologne n’est pas vraiment un séjour en Pologne. Il s’agit d’un périple pour renforcer certaines valeurs, principalement nationalistes. Et la Pologne moderne ne fait pas du tout partie du voyage ».
Le ministère de l’Education a en tout cas indiqué début février qu’Israël n’interrompra pas les voyages des lycéens en Pologne et que les organisateurs ne seront pas censurés par le projet de loi controversé interdisant de blâmer les Polonais de cette époque pour les atrocités commises par le régime nazi.
Le projet de loi, qui prévoit une peine d’emprisonnement pour quiconque se réfère aux « camps de la mort polonais » et interdit la mention de la complicité de la Pologne dans l’Holocauste, a été qualifié par Israël de « distorsion historique ».
Le directeur du ministère de l’Education, Shmuel Abuav, a souligné avec insistance que les voyages se poursuivraient et que « les guides diraient la vérité telle qu’elle était ». Pour appuyer sa déclaration, il a mentionné les nouveaux programmes rédigés par le ministère en réponse au projet de loi polonais.
L’Allemagne nazie a envahi la Pologne en 1939, et contrairement à d’autres pays occupés par Berlin à l’époque, il n’y avait pas de gouvernement collaborationniste en Pologne. Le gouvernement et l’armée polonaise d’avant-guerre ont fui en exil, à l’exception d’une armée de résistance clandestine qui a combattu les nazis à l’intérieur du pays. Mais de nombreux Polonais ont tué des Juifs ou les ont dénoncés aux Allemands et les pogroms antisémites meurtriers ont continué pendant et même après la Seconde Guerre mondiale.
La querelle entre la Pologne et Israël au sujet de la Shoah a atteint son paroxysme en fin de semaine dernière après que le Premier ministre polonais a déclaré que le génocide n’avait pas seulement été le fait de Polonais, Ukrainiens et Allemands, mais également de Juifs…
Nathalie Hamou
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