Les Loubavitch fêtent leurs 50 ans d’implantation en France

Le mouvement Loubavitch, qui organisait mardi 13 février son grand gala annuel, fête en 2018 ses 50 ans d’implantation en France.

Le rabbin Haïm Nisenbaum, porte-parole des Loubavitch en France, revient sur les origines du mouvement.

La Croix : Qu’est-ce que le Beth Loubavitch ?

Haïm Nisenbaum : Cela s’inscrit dans la mouvance hassidique née au XVIIIsiècle en Europe centrale. Le mouvement s’est répandu dans une grande partie de l’Europe, puis après guerre en Amérique. En France, le rabbin Azimov, qui était arrivé dans le pays à l’âge de 4 ans avant de faire ses études rabbiniques à New York, est revenu à Paris pour y implanter le mouvement le 3 mai 1968. C’était 20 ans après la Shoah : on avait perdu le bonheur d’être juif. Il a fallu attendre une génération pour que ce bonheur réapparaisse. La décolonisation en cours entraînait une perte de repère pour les juifs séfarades qui arrivaient massivement en métropole. Le rabbin Azimov a lancé une action auprès des jeunes et des étudiants, avec un discours enraciné dans la tradition mais parlant à la modernité.

Aujourd’hui, le Beth Loubavitch représente 35 000 à 40 000 personnes en France. Je parle là des militants du premier cercle, mais la caisse de résonance est plus importante. Nous ne dépendons pas du Consistoire israélite de France, même si j’en ai été vice-président pendant 16 ans. Mais nos relations avec cette institution sont excellentes, le président du Consistoire étant souvent présent à notre gala.

Quelle est la spécificité de votre pratique du judaïsme ?

H.N. : Le mouvement Loubavitch a une pratique attentive du judaïsme pour des raisons spirituelles, avec une mise en relief de l’émotion, de la compréhension et de la réflexion. Le rapport avec Dieu doit être construit intellectuellement. Il implique un engagement intense dans la pratique rituelle. Vu de l’extérieur, celui qui croise un juif Loubavitch reconnaîtra simplement un juif religieux. L’étude est fondamentale, ainsi que l’aide à la pratique des commandements. Celle-ci peut ne pas être évidente pour tout le monde.

Le mouvement Loubavitch se considère comme pleinement intégré à la cité, bien que dans certains cercles en France, tout ce qui peut apparaître comme une manifestation ostentatoire de la religion soit perçu comme une provocation.

Quelles évolutions ont connu les Loubavitch en 50 ans ?

H.N. : Dans les années 1960, les Séfarades sont arrivés massivement en France, porteurs de leur culture et de leur histoire. Ils ont accepté quelque chose qui appartenait à une autre culture, ashkénaze, tout en partageant une manière de croire. On peut maintenir les coutumes séfarades tout en ayant cette manière de penser.

Le mouvement compte aujourd’hui 60 à 70 centres communautaires, d’autres sont en projet.

L’enjeu éducatif est primordial pour nous. Nous avons dans le 19earrondissement de Paris la plus grande école juive d’Europe, qui accueille plus de 2 000 élèves. Nous créons aussi beaucoup de crèches et d’écoles maternelles, notamment en banlieue. Il ne s’agit pas de lieux réservés aux Loubavitchs mais ouverts à tous. L’enjeu est de taille pour les familles juives car il est désormais interdit d’apporter la nourriture de ses enfants dans les crèches non confessionnelles.

Êtes-vous touchés par ce qu’on appelle ’l’Alya intérieure’, qui conduit nombre de juifs à déserter certains quartiers ?

H.N. : Cette Alya intérieure est une réalité dans certains secteurs de la région parisienne où, pour les juifs reconnaissables en tant que tels, la vie est devenue impossible. Mais des émissaires du mouvement Loubavitch arrivent parfois dans des quartiers où il n’y a jamais eu de synagogue et ouvrent un nouveau centre. Il suffit parfois d’aller vers l’autre pour que celui-ci se mette à la pratique. L’idée est d’être à l’écoute des besoins, au plus proche du terrain.

Recueilli par Clémence Houdaille

Suivez-nous et partagez

RSS
Twitter
Visit Us
Follow Me

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*