Finissons-en avec l’expression « la communauté juive est sous le choc », le genre de commentaire vaseux que je n’aime pas entendre, tout le monde doit être concerné.
Lundi 29 janvier 2017. C’était en apparence une journée comme une autre pour ce petit garçon de 8 ans, de confession juive. Pourtant, à Sarcelles, cet enfant « a été victime de multiples coups portés par deux individus âgés d’une quinzaine d’années », a confirmé auprès de France info le parquet de Pontoise (Val-d’Oise).
« La victime portait une kippa et se rendait seule à son cours de soutien scolaire », a précisé le parquet. Selon la Direction départementale de la sécurité publique du Val-d’Oise, les deux adolescents ont fait un croche-pied au garçon, puis lui ont donné « plusieurs coups de pied ». « Il n’est pas blessé », Interrogé par France info, le parquet affirme que les auteurs de l’agression « n’ont rien dérobé et n’ont proféré aucune parole ». « Le mobile antisémite est donc privilégié », poursuit-il.
Ce matin, j’ouvre mon poste de radio, je ne suis pas au courant. J’entends le commentaire suivant: « La communauté juive est sous le choc ». Le genre de commentaire vaseux que je n’aime pas entendre. Cela ne concernerait que la communauté Juive, qu’un enfant de 8 ans soit agressé, parce qu’il porte une kippa et qu’il est Juif?
J’ouvre mon ordinateur, je m’aperçois que François Pupponi, le maire de Sarcelles vient de réagir. Il va plus loin et annone que face à la recrudescence de ces actes, notre cadre législatif doit évoluer. « Je proposerai ainsi dans un futur Projet de loi par amendement, ou dans une proposition de loi, de renforcer l’application de circonstances aggravantes lorsque des délits ou crimes sont perpétrés à l’encontre de personnes arborant un signe religieux ostentatoire, afin que la motivation raciste ou antisémite soit plus aisément établie. La reconnaissance du caractère aggravant doit bénéficier à la victime et non aux agresseurs, car ceux-ci savent bien que sans insultes antisémites pour accompagner leur geste, ils ne risquent pas grand-chose. La peur doit changer de camp. »
Il est indéniable qu’en Europe, nous assistons à une renaissance tant du racisme, de la xénophobie que de l’antisémitisme et les Juifs ne se sentent plus en sécurité. Dans une enquête réalisée par la FRA, l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, dans huit pays en 2012, celle-ci montre que 76% des 5847 Juifs interrogés ont le sentiment que l’antisémitisme s’est aggravé dans leur pays au cours des cinq dernières années.
Oui, les violences n’ont pas cessé depuis le mois d’octobre 2000 en France
Faut-il en rappeler la genèse? Dans la semaine du 2 octobre 2000, une synagogue du 19e à Paris reçoit des menaces. Dans la nuit du 3 au 4 octobre, un engin incendiaire est lancé sur celle de Villepinte. Les 4 et 5, des élèves se font agresser à la sortie d’une école. Le 6, des jeunes de l’école juive de Saint-Ouen reçoivent des pierres. Le 7, un cambriolage a lieu à la synagogue de Bagnolet. Un cocktail Molotov est lancé sur un restaurant casher parisien. Durant l’office, un inconnu dépose un cocktail Molotov à l’intérieur de la cour d’une école d’Aubervilliers. Le 8, un Molotov est lancé sur la synagogue de Clichy-sous-Bois, alors qu’au cimetière de Trappes, les tombes juives sont profanées. Trois bombes incendiaires sont lancées sur la synagogue des Ulis. En résumé, depuis le mois d’octobre 2000 et jusqu’à fin 2017, 10.586 actes antisémites ont été recensés en France par le ministère de l’Intérieur!
Et puis, il y a ces stéréotypes infâmes. Le meurtre tragique d’Ilan Halimi est le résultat de la survivance d’un antisémitisme structurel qui s’appuie sur de vieux clichés nauséeux, les mêmes qui perdurent depuis des siècles. D’ailleurs, une enquête réalisée par Ipsos du 10 au 17 octobre 2017 pour le compte de la Fondation du Judaïsme Français, fait froid dans le dos: 64% des Français pensent que les Juifs disposent de lobbys très puissants; 53% estiment qu’ils sont plus attachés à Israël qu’à la France; 53% qu’ils ont beaucoup de pouvoir; 52% qu’ils sont plus riches que la moyenne des Français; 51% qu’ils sont trop présents dans la banque et la finance; 48% qu’ils aiment plus l’argent que les autres Français; 38% qu’ils sont trop présents dans les médias.
Bref, depuis l’année 2000, les Français juifs sont désemparés
Ils sont d’autant plus désemparés que neuf mois après le meurtre de Sarah Halimi, une juge d’instruction n’a pas donné suite à une demande du parquet de Paris pour retenir le caractère antisémite, au motif que les parties civiles n’étaient pas fondées, selon elle, à demander dans ce cadre une requalification de la mise en examen. Madame le juge, Sarah Halimi a été assassinée, parce que juive. Non, elle n’a pas été assassinée parce qu’elle habitait seulement un immeuble, parce qu’elle était une ancienne directrice de crèche, parce qu’elle aurait eu de l’argent, non pas par vengeance, non pas parce qu’elle était d’origine italienne ou portugaise. Et, déjà, dans le HuffPost, j’écrivais à l’époque: « Quelle est cette vilaine propension qui consiste à relativiser, à ignorer, taire autant que faire se peut et/ou balayer du revers de la main le crime et les motivations antisémites d’un crime? Quelle est cette propension étrange qui consiste à décriminaliser en quelque sorte un terroriste en le cataloguant de… fou ou de psychopathe, alors qu’il était par ailleurs sans antécédent psychiatrique? Comme s’il serait par trop difficile de mettre un nom sur le crime, de dévoiler sa motivation profonde et de rappeler en cette circonstance justement les circonstances aggravantes du crime, des circonstances dramatiques pour la victime puisqu’elle a été sauvagement assassinée. »
Alors, nous le martèlerons autant de fois qu’il le faudra: les agresseurs doivent être poursuivis et condamnés très sévèrement. Enfin, il importe de marteler que l’antisémitisme n’est pas une opinion, mais une infraction grave, d’autant plus grave qu’elle menace les valeurs de la République.
Les mots ne suffisent plus et la peur doit changer de camp.
Marc Knobel
Il convient pour ne pas le formuler plus fort que les pouvoirs public réagissent ,sans qu’il soit différencié l’antisionisme de l’antisémitisme …le premier cité étant le vecteur de l’autre .
L’Education nationale est aux abonnés absents sur la déconstruction des stéréotypes antisémites. On est dans un tabou assorti d’un vide cognitif qui équivalent à postuler le non-sujet. Postulat qui revient évidemmment à autoriser la prolifération de l’antisémitisme musulman qui fait d’une pierre deux mauvais coups : 1° laisser entendre à tous qu’un musulman antisémite est trop bête pour réfléchir si l’Ecole lui en donne la possibilité = racisme. 2° laisser passer laisser faire un antisémitisme génocidaire qui ne s’en prend pas qu’aux Juifs et pas qu’aux valeurs de la République mais au corps des citoyens toutes obédiences religieuses et philosophiques confondues. Les cadres de l’Educ nat seraient-ils aussi nihilistes que les islamistes ?
Bonne analyse à laquelle en tant qu’ex enseignant, je souscris… »vide cognitif », j’adhère totalement.
Bien à vous.
Et pourtant le site de l’Education nationale avait promis des le 25 janvier 2015 un renforcement de la pédagogie en matière de formation à la laïcité et au combat contre toutes les discriminations. Mais le dogme prévaut toujours qu’on peut lutter contre l’antisémitisme via l’enseignement de l’histoire de la Shoah. Cet enseignement qui doit évidemment se transmettre a servi de prétexte à la concurrence mémorielle chez les islamistes et leurs idiots utiles. Rien ne peut donc remplacer l’enseignement de la spécificité de l’antisémitisme et de ses stéréotypes recurrents. Or, le croirez- vous, quand je l’ai propose à une IA-IPR d’Histoire, celle ci m’a dit que ce n’était pas une bonne idée, car cela donnerait de nouvelles raisons d’être antisémite à ceux qui ne connaissaient pas certains de ces stéréotypes !
Rien d’étonnant et je suis tout à fait d’accord avec votre analyse…l’approche culturelle de l’antisémitisme pour les « apprenants » doit passer par un parcours historique global et non pratiquer la politique du « tiroir »: affaire Dreyfus, Shoah…la pédagogie du « vide cognitif et des stéréotypes »…
Pour conclure, entre nous soit dit ,j’ai rencontré beaucoup de stupidité aussi chez mes collègues sur ce sujet et j’ai laissé de côté le dernier IPR et ses problématiques hors sujet.
Content d’avoir quitté ce monde éducatif!!!!Bien à vous.
Nous partageons hélas les mêmes constats; ils m’inquiètent beaucoup pour le devenir de la démocratie française. Je fais ce que je peux à mon niveau étant également professeur bientôt à la retraite ! Je crois que je ne suis pas bien perçue par tous mais je me dis que je fais mon devoir de citoyenne et que tant pis pour ceux qui ne comprennent pas !
Bien cordialement,