Grâce à son poste de consul honoraire de Turquie à Lyon, Albert Routier aurait sauvé 600 juifs durant le seconde guerre mondiale.
Alors qu’il travaillait bénévolement au consulat turc dans le troisième arrondissement de Lyon dès 1937, il profitait de ses fonctions pour fournir de véritables faux papiers à des juifs durant la guerre. Le chef d’entreprise dans les travaux publics aurait sauvé près de 600 juifs jusqu’à la fermeture du consulat en 1944.
Brillant négociateur, Albert Routier* multiplie les interventions auprès des autorités compétentes, qu’elles se trouvent à Marseille, à Grenoble (Consulat général de Turquie sous la tutelle de Bedi Arbel) ou à Vichy (antenne de l’Ambassade de Turquie domiciliée à Paris sous la tutelle de Behiç Erkin) et interpelle quand il le faut le Commissariat général aux questions juives ou le service des étrangers du Commissariat interministériel à la main-d’œuvre.
En novembre 1942, il prend connaissance d’une lettre de dénonciation parvenue au Consulat général de Turquie à Marseille, s’insurgeant contre « [son] activité débordante en faveur des Juifs, qu’ils soient citoyens turcs, anciens citoyens turcs ou juifs non turcs ».
Les demandes d’aides dont le consul est destinataire couvrent un large registre : obtenir un sauf-conduit pour circuler en règle ; échapper à la réquisition de main-d’œuvre, dans le cadre de l’organisation Todt ou du STO ; déjouer l’internement ou l’assignation à résidence ; trouver un appui pour faire libérer des proches internés ; objecter des arguments pour conserver ses biens, face à l’aryanisation ; obtenir un certificat de nationalité pour régulariser sa situation et faire entendre raison aux autorités de Vichy ; monter un dossier pour retourner vivre en Turquie (une démarche largement encouragée par l’État français en 1943), se faire délivrer en conséquence un passeport, un visa pour les pays à traverser, Italie et Croatie.
Les nombreuses lettres de remerciements adressées à Albert Routier* après la guerre attestent du capital de sympathie et de la confiance dont il a bénéficié, du bien qu’il a semé autour de lui. Son humanisme, dénué de tout intéressement, est unanimement salué, en des termes élogieux qui dévoilent en filigrane les risques qu’il a su encourir.
Il a, entre autres, fourni de faux papiers au rabbin Benjamin Assouline, originaire d’Algérie, sous le faux nom turc de “Ahmet Elma” et à son épouse Sarah et sauvé ainsi que Alexandre Mersel, Mendel et Perle Mersel, ainsi que Vitalis Behar, né à Istanbul (Ortaköy) en 1902, juif qu’il fait passer pour grec orthodoxe.
“Chaque année, mes grands-parents recevaient une dinde à Noël d’une certaine famille, les Semelman, mais on ne savait pas pourquoi.” raconte sa petite-fille Isabelle Chapuis au Progrès. De fait, Albert Routier se vantait peu d’avoir accompli ce qu’il considèrait comme un devoir, explique son fils cadet, Airy Routier.
Albert Routier, décédé en 1977, a reçu la médaille des Justes parmi les Nations à titre posthume ce dimanche.
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