Le rebetiko est une musique grecque passionnée et passionnante , trop peu connue en France, qu’il ne faut surtout pas confondre avec le Sirtaki. On trouve dans le monde du rébètiko plusieurs figures juives majeures.
Des compositeurs
D’abord un dénommé Pol dont on ne sait quasiment rien, mais qui nous a laissé un très beau et très intéressant rébètiko au rythme extraordinaire : Εμαθα πως εισαι μαγκας (J’ai appris que tu étais un Mangas)
Plus tard un autre rébète : Kostas Kaplanis
Né en 1921 à Chios, Kostas Kaplanis fut coiffeur de son métier et parallèlement jouait du bouzouki; lorsqu’il vint à Athènes pendant l’occupation il abandonna la coiffure pour se consacrer seulement à la chanson rébètique. Après la guerre il s’installa aux USA et y vécut jusqu’à sa mort en 1975.
Il est l’auteur entre -autres de Ενας αλήτης πέθανε(Un vagabon est mort)
Κλάψε μπουζόυκι μου(Pleure mon bouzouki)
httpv://www.youtube.com/watch?v=6BRD3pZb4bY
Minos Matsas,(Prévéza 1903-1970)auquel le rébètologue Panayotis Kounadis vient de consacrer un livre fut aussi compositeur et surtout parolier de rébètika .Mais c’est comme directeur artistique d’Odeon-Parlophone puis créateur avec ses fils du label Minos EMI qu’il apporta une contribution des plus précieuses à la diffusion du rébètiko dans toute la Grèce d’abord puis dans le monde entier
Des chanteuses
L’arrivée des réfugiés d’Asie Mineure en 1923 avait amené un changement radical dans le rébétiko du Pirée :introduire des chanteuses dans un univers jusque là uniquement masculin ;A Smyrne,à Constantinople, dans la tradition du café-chantant et du café –aman des femmes chantaient, les femmes aussi sortaient en famille pour écouter de la musique. Les mœurs étaient à cette époque parfois plus évolués en Orient qu’en Occident ! Ainsi apparurent les premières chanteuses de rébètiko et parmi elles plusieurs juives ,celles qui se produisaient déjà dans le Smyrnéiko comme Amalia Vaka (Ioannina 1890-New-York 1980)et Victoria Hazan (Salihli de Smyrne 1896-New-Υork 1995) qui finirent leur carrière aux USA et surtout Roza Eskenazi (née Sarah Skinazi à Constantinople entre 1890 et 1900,morte à Athènes en 1980) puis Stella Haskil (Née Stella Gaégou à Salonique en 1918,morte à Athènes en 1954).
Ces deux dernières furent parmi les plus grandes figures féminines du rébètiko. Toutes connaissaient aussi le chant judéo-espagnol ,ces romances que de générations en générations les femmes se chantaient dans les familles juives depuis leur arrivée dans l’empire Ottoman, chassées d’Espagne en 1492 .Elles ont même fait des enregistrements de ces romances judéo-espagnoles et les ont chantées sur scène .Sans doute les ont-elles fait connaitre aux rébètes .Utilisant les mêmes modes que les rébètika elles leur parurent familières et influencèrent quelques-unes de leurs compositions.
httpv://youtu.be/t2ZKR6OldHE
On trouve ainsi un rébètiko attribué à Iannis Dragatzi (Ogtontakis) ou à Kostas Karipis (On sait combien il est souvent difficile d’attribuer les chansons rébètiques car entre amis on avait coutume de se les offrir) interprétée par Roza Eskenazi sous le nom de Ελενίτσα μου ou Τα ματάκια σου τα δυό (Ma petite Hélène ou Tes deux petits yeux) qui est la réplique musicale fidèle d’une chanson sépharade connue sous le nom de Jaco.
https://youtu.be/w6CSSy0kmfs
On a seulement remplacé les paroles : Jaco s’est métamorphosé en une Hélène cruelle qui non contente d’avoir fait boire du poison à son amoureux lui transperce perce aussi le cœur avec un couteau !
La musique d’une autre chanson rébétique attribuée cette fois à Stella Haskil et Vassilis Tambakis Φιλαναδίτσα μου (Ma petite amie)est inspirée d’une chanson judéo-espagnole le roi Nemrod.
Dans un des plus fameux rébètiko de Kaldaras chanté par Stella Haskil Νύχτωσε χωρίς φεγγάρι (Nuit sans lune) on peut entendre des bribes d’un chant juif connu, ainsi que dans Παραπονούνται οι μάγκες μας (Nos mangkés se plaignent) de Iovan Tsaous, où l’on retrouve le refrain d’une chanson juive interprétée lors des mariages.
httpv://youtu.be/mldi3_rwAM0
Il ne faut point s’étonner donc qu’aujourd’hui en Grèce des orchestres comme « Printemps à Salonique »,et des chanteuses comme Savina Yannatou connaissent un grand succès en interprétant du chant judéo-espagnol et qu’en Israël des chanteuses grecques de rébètiko comme Glykeria ou Dalaras soient de grandes stars.
Article très intéressant, merci beaucoup! Juste une remarque le mot grec μαγκας veut dire “rusé” pas “mangas”. Peut-être souhaiterez vous revoir le début de votre article (très intéressant rébètiko au rythme extraordinaire : Εμαθα πως εισαι μαγκας (J’ai appris que tu étais un Mangas).