Sarah Halimi. De son nom Lucie Attal. Vous n’avez pas oublié. Moi non plus. Même si nous trouvons que le temps s’étire avec une insolente indécence.

XXIème siècle. Qu’on ne vienne pas nous parler du temps de la justice Et plutôt qu’on vienne exiger que les choses soient nommées. Presque 9 mois après.
L’affaire Sarah Halimi ? La presse en parle si peu qu’on ne sait même plus qui sont à ce jour les avocats des parties civiles. Au début, Gilles-William Goldnadel, David-Olivier Kaminski, Alex Buchinger, donnèrent des conférences de presse. Et la juge, Anne Ihuellou, elle trouvait et elle trouve encore qu’il y eut un sacré tapage médiatique au sujet de L’affaire Sarah Halimi. Aujourd’hui, on sait que Maîtres Szpiner et Toby. Jeu des chaises musicales.
Presque 9 mois. Eh bien vous savez quoi ? A ce jour, le chef de mise en examen est toujours L’homicide volontaire.
La honte, non ? Quand vous apprenez que ce 11 décembre, acculé, écœuré, un des avocats procède à une demande d’acte et exige au nom des trois enfants de Sarah la requalification du chef de mise en examen initial d’homicide volontaire en assassinat, précédé de séquestration, de torture et d’actes de barbarie, avec la circonstance que les faits ont été commis à raison de l’appartenance vraie ou supposée de Mme Lucie ATTAL, à une race ou à une religion déterminée.
Le scandaleux silence. La complicité. Lorsque tous on sait que Sarah fut tuée en plein Paris. En direct. Devant témoins. Le 4 avril 2017. Parce qu’elle était juive. Seulement parce qu’elle était juive.
Alors ce 11 Décembre, un des avocats a envoyé à Anne Ihuellou cette demande d’acte en application de l’article 82-1 du code de procédure pénale.
Après avoir rappelé les chefs au nom desquels l’information fut ouverte, soit Homicide volontaire au préjudice de Sarah, ET Séquestration de la seule famille Diarra, l’avocat rappelle les relations d’amitié de longue date et de grande proximité qu’entretenait le mis en examen, Kobili Traoré, avec la famille Diarra, originaires qu’ils étaient du même village malien.
Il s’étonne, l’avocat des trois enfants, le croiriez-vous, que Kobili Traoré n’ait donc pas été mis en examen pour avoir surpris Sarah dans son sommeil, pénétré dans son appartement par effraction, pour l’avoir séquestrée, torturée, commettant ainsi des actes de barbarie constatés par plusieurs témoins, avant de la défenestrer.
En fonction de quoi, le croiriez-vous, il ose, l’avocat, au nom des parties civiles, solliciter que soit étendue la mise en examen de Kobili Traoré à la séquestration de Sarah Halimi. Aussi.
Car le croiriez-vous, que cela n’est pas encore le cas. Pas davantage, l’infraction de torture et actes de barbarie, faits prévus et réprimés par l’article 222-1 et suivants du Code Pénal, ne sont à ce jour retenus à l’encontre de celui qu’il faut appeler le mis en examen.
Souvenez-vous. Alors que la torture et des actes de barbarie d’une particulière sauvagerie infligée par Kobili Traoré à Sarah furent longuement décrits par des témoins réveillés par les cris de la victime et qui donc assistèrent au dernier moment de son supplice, peu avant qu’elle ne soit défenestrée, alors que de nombreux témoins tant visuels qu’auditifs firent des déclarations circonstanciées quant aux atrocités commises par l’assassin sur la personne de Sarah, eh bien seul l‘homicide volontaire fut retenu lors de la mise en examen.
Y a-t-il ici, parmi vous, un seul qui puisse douter que Kobili Traoré prémédita le meurtre de Sarah. Sarah dont il était le voisin d’immeuble depuis une dizaine d’années. Dont il avait croisé les enfants. Les petits enfants. Sarah sur le passage de laquelle il crachait. Sarah qui le craignait.
Qui ici pour douter que Traoré savait que le seul moyen d’accéder à l’appartement de celle qu’il avait projeté de tuer obligeait de traverser l’appartement de ses amis maliens, passant de leur balcon à celui de Sarah.
Ce qu’il fit. A 4 heures du matin. Sans faire le moindre mal à la famille Diarra. Et ce malgré l’état second dans lequel on nous le décrit.
Etat second qui, je vous le rappelle, n’empêcha en rien que se déroulât son funeste projet, conforme au rituel religieux islamiste consistant à changer de vêtements et à dire des prières nocturnes.
Tout ça avant de surprendre une femme dans son sommeil. De la séquestrer. De la torturer durant près d’une heure. De la défenestrer au cri d’Allah Ouakbar.
Encore un doute ? Alors n’oubliez jamais que l’assassin eut la lucidité suffisante pour simuler auprès des témoins massés dans la cour le suicide de Sarah.
Kobili Traoré. Conseillé par son avocat. Qui pousse l’imposture jusqu’à déclarer, lors de sa mise en examen, qu’il ignorait connaître l’identité de la personne qui habitait l’appartement dans lequel il allait s’introduire par effraction. Qu’il a découvert sa judéité en voyant une torah dans l’appartement. C’est ballot hein. Ça tomba sur une Juive.
Et tous, nous savons que ce déferlement de haine et de violence extrême sur la personne de Sarah ne put être motivé que par le seul fait que son assassin avait à l’évidence ciblé sa victime.
Souvenez-vous. Au rendu de l’expertise psychiatrique de Daniel Zaguri, tous nous pensâmes qu’enfin, l’affaire était actée. François Mollins himself n’avait-il pas, par réquisitoire supplétif en date du 20 septembre, indiqué que :
« Attendu qu’il en résulte contre
– Kobili TRAORE,
des présomptions d’avoir commis les faits suivants :
– Homicide volontaire au préjudice de Lucie ATTAL avec cette circonstance que les faits ont été commis à raison de l’appartenance vrai ou supposée de la victime à une race ou à une religion déterminée
Faits commis le 04/04/2017 à PARIS et réprimés par les articles 221-16ème, 228-8, 228-9, 221-9 et 221-11 du Code Pénal
Vu l’article 80 du CPP
Requiert qu’il plaise à Mme le juge d’instruction de continuer à informer sur ces faits par toutes voies de droit »
20 septembre. Croiriez-vous que la Juge donc, Anne Ihuellou, eût obtempéré ? Qu’elle eût acté cette circonstance aggravante d’homicide volontaire commis par Kobili Traoré du fait de l’appartenance vraie ou supposée de Sarah à une race ou à une religion déterminée, circonstance qui paraissait dès lors évidente et dont on se demandait pourquoi elle n’avait pas mérité d’être prise en compte dès la mise en examen ?
Eh bien non. Pour des raisons étonnantes, la Juge, donc, continua à traîner des pieds, expression reprise par tous les avocats concernés, qui répétèrent à l’envi ce sentiment étrange qu’ils avaient de la déranger lorsqu’il leur venait à l’esprit de s’enquérir de l’avancée du dossier.
Alors c’est reparti. Les parties civiles sollicitent par la voix de leur avocat la requalification du chef de mise en examen initiale d’homicide volontaire en assassinat.
Quoi ? Vous dites qu’il est rarissime que de telles horreurs soient perpétrées pour partie au vu et au su de nombreux témoins tant visuels qu’auditifs ? Que les propos ponctués de coups de poings portés par Kobili Traoré sur Sarah ressortent on ne peut plus clairement des nombreux témoignages se trouvant au dossier ? Que les expressions Tuer le shetan Allah Ouakbar Dieu m’en est témoin suffisent à démontrer le mobile antisémite de cet assassinat ? Que le rapport d’expertise psychiatrique mentionne à la page 54 que le crime de Kobili Traoré est un acte délirant et antisémite ? Eh ben pas pour Anne Ihuellou.
Vous savez quoi ? Dans cette demande d’acte, les parties civiles demandent à ce qu’une reconstitution soit ordonnée dans les meilleurs délais, afin que toute la lumière soit faite sur les circonstances de ce drame. Ben quoi ? La juge, elle se demande si elle est bien utile, cette reconstitution. Ben oui, quoi. Des fois qu’on aurait l’idée farfelue d’interroger aussi sur ce que nous allons appeler ironiquement le dysfonctionnement qui opéra cette nuit : être lynchée puis défenestrée en présence de 28 policiers, ça mérite une reconstitution ? Oh ? Tu crois ?
Alors voilà. A ce jour, l’appartement de Sarah est placé sous scellé. Plus un membre de sa famille n’est resté en France. Mais n’ayez crainte : les enfants le paient, le loyer de Sarah. Le temps judiciaire.
Sarah Cattan