Elle est une des étoiles montantes de la politique israélienne: la députée Sharren Haskel effectue son premier mandat (Likoud) sur les bancs de la Knesset et fait déjà beaucoup parler d’elle, en bien.
Née au Canada, Sharren Haskel arrive en Israël avec sa famille, alors qu’elle n’a qu’un an. Son père israélien d’origine et sa mère française, s’installent à Kfar Saba où Sharren passera son enfance. Militante au sein des mouvements de jeunesse, combattante dans l’unité des gardes-frontières de la police, Sharren Haskel s’engage en politique il y a 7 ans au Likoud.
LPH a pu interroger cette jeune femme de 33 ans, qui ambitionne d’effectuer une longue carrière au service de son peuple.
Le P’tit Hebdo: Entrer en politique: était-ce une envie ou une nécessité?
Sharren Haskel: Lorsque je décide de devenir volontaire au sein des jeunes du Likoud, je ne sais pas ce qu’est la politique. C’est pour cette raison, en fait, que je m’engage: j’estimais indispensable de savoir comment fonctionne notre système politique. Nous devons absolument comprendre ce monde qui dirige notre pays et décide de notre avenir. C’est ainsi que doucement, je suis entrée plus profondément dans la politique.
Après quelques années de militantisme, je me suis dit qu’il était temps de passer à l’action. J’ai alors posé ma candidature aux primaires du Likoud. Ce système de primaires m’a paru très sain, puisque l’on laisse aux militants du parti, le soin de définir qui seront leurs représentants sur les bancs de la Knesset.
Lph: Vous entrez donc comme député à la Knesset actuelle. Depuis le début de votre mandat, quelles sont vos observations sur cette vie politique que vous vivez au plus près?
S.H.: Tout d’abord, c’est évident que depuis que je suis députée ma vie a changé. Je comprends aussi que l’expérience que j’avais acquise dans ma vie civile comme bénévole dans le domaine social, mais aussi dans ma vie de combattante chez Magav, me permet d’avoir des idées, de formuler des suggestions et au final d’agir pour mon pays. Si je ne m’étais pas engagée en politique, cette expérience n’aurait pas eu la même importance!
Par ailleurs, ce qui occupe une grande partie de mon temps de parlementaire est mon rôle dans la commission affaires étrangères et sécurité.
Lph: En quoi cela consiste-t-il?
S.H.: Il existe deux types de délégations qui représentent Israël à l’étranger. Les premières sont celles qui visent à renforcer les liens avec les communautés juives de Diaspora. En général, je n’y participe pas.
Les secondes sont envoyées là où les associations politisées anti-israéliennes comme le BDS sont particulièrement actives. Ces endroits mettent au défi, permettent de donner le meilleur de soi et de toucher un plus grand nombre de personnes.
Lph: Justement, ce type de mission n’est-il pas frustrant? N’avez-vous pas l’impression que peu importe ce que dit ou fait Israël, il sera toujours condamné?
S.H.: Je réfute cette impression. Je vais vous dire, lorsque l’on va sur des campus américains, sur les terres du BDS, nous nous adressons à un public composé peut-être de 10 membres du BDS, les autres sont soit des supporters d’Israël, soit des personnes qui ne demandent qu’à se faire une opinion. Il est évident que nous ne ferons pas changer d’avis les membres du BDS, mais ceux qui ne savent pas quoi penser de tout ça, doivent entendre notre voix. Lorsque j’interviens dans ce type d’endroits, je laisse toujours la parole en premier aux représentants du BDS afin de mieux pouvoir démonter leurs arguments. Notre action a ainsi un double bénéfice: faire réfléchir voire convaincre les indécis et donner du courage aux pro-israéliens, qui se battent quotidiennement contre la propagande du BDS.
Lph: Vous étiez il y a quelques semaines à Saint-Pétersbourg pour un séminaire avec des parlementaires du monde entier. Le dernier jour a été marqué par une scène particulièrement choquante où l’on voit les parlementaires de plusieurs pays musulmans vous empêcher de vous exprimer, vous et les autres membres de la délégation israélienne. Comment avez-vous vécu ce moment?
S.H.: C’était particulièrement désagréable. Imaginez une réunion de 1500 parlementaires, dont 400 sont ouvertement hostiles à Israël. A la fin, les représentants palestiniens demandent de libérer Marwan Barghouti, qu’ils présentent comme un héros injustement détenu par Israël. Nous rappelons alors qu’il n’est autre qu’un criminel, un terroriste. La vérité étant dure à entendre, les parlementaires de plusieurs pays musulmans ont commencé à taper sur les tables pour couvrir nos propos. Mais on ne nous fera pas taire.
Lph: Pourtant la délégation israélienne quitte la salle dans l’indifférence générale. Capitulation ou acte fort?
S.H.: En quittant la salle, nous avons signifié avec force notre désapprobation de rester dans un lieu où le débat était rendu impossible.
Oui, vous avez raison, l’assemblée est demeurée indifférente. Sur le moment, personne n’a eu le courage de dénoncer ce qui était en train de se produire. Mais en coulisses, de nombreux parlementaires sont venus nous témoigner leur soutien.
Lph: Le problème n’est-il pas là? En coulisses, beaucoup nous serrent la main et se déclarent nos amis, mais quand il s’agit de prendre publiquement et officiellement position pour Israël, on trouve beaucoup moins de monde…
S.H.: Cela fait 70 ans que nous nous battons, y compris sur la scène diplomatique. Cela ne peut pas se faire en un claquement de doigts. La réalité est dure mais elle est en train de changer. Sur ce plan, Binyamin Netanyahou fait un travail énorme, notamment avec les pays d’Afrique. Son génie politique a réussi à renverser une tendance qui faisait que ces pays se rangeaient automatiquement avec les pays musulmans contre Israël. Aujourd’hui, doucement, nous assistons à un changement d’attitude de certains pays et ce n’est que le début. Sans oublier que depuis l’accession de Trump à la Maison Blanche, les choses sont plus faciles pour Israël, sur le terrain diplomatique.
Lph: Vous êtes une femme qui parcourait le monde pour défendre Israël. Cela influence-t-il le regard de vos interlocuteurs? Par exemple, pensez-vous que les réactions à Saint-Pétersbourg auraient été moins violentes face à un homme?
S.H.: Je n’ai pas l’ombre d’un doute que ces personnes considèrent les femmes comme une sous-catégorie, envers laquelle ils n’ont aucun respect.
Je n’ai pas grandi en Iran, ni en Arabie Saoudite, ni au Koweït et les représentants de ces pays ont du mal à accepter qu’une femme leur fasse la leçon.
Hormis ces cas, je dois dire que je me sens tout à fait considérée dans mon statut de femme politique, en particulier dans mon pays. Israël peut se targuer d’être à la pointe dans ce domaine aussi. Nous avons des femmes à des postes considérés encore comme typiquement masculins dans bon nombre de pays occidentaux, que ce soit dans les domaines politique ou militaire. Bien entendu, la route est encore longue et nous avons toujours le devoir de continuer à nous améliorer.
Lph: Vous n’avez que 33 ans. En Europe, de très jeunes dirigeants ont pris la tête de certains gouvernements comme en France ou en Autriche. Pensez-vous appartenir à cette génération qui fait de la politique autrement? N’est-il pas temps pour Israël aussi de tourner la page de ses »vieux » dirigeants?
S.H.: Je ne crois pas que l’on puisse transposer en Israël ce qui se passe en Europe. Ici, notre premier ministre comprend très bien la politique, il sait justement se renouveler, ce que les dirigeants européens n’ont pas compris.
De plus, en Israël, on donne vraiment une place aux jeunes. Il y a un bon mélange entre anciennes et nouvelles générations.
Lph: Votre mère est française, vous-même parlez le français. Quel est votre rapport avec les olim francophones?
S.H.: Ma mère ayant été ola hadasha francophone, j’ai grandi avec cela. J’ai vu que l’alya posait des défis importants. Beaucoup d’olim francophones sont venus me voir pour m’exposer leurs problèmes. J’ai commencé à intervenir devant des publics restreints à domicile (Houg Bayit), à l’aide de Binyamin Lachkar. J’ai beaucoup œuvré notamment pour la reconnaissance des permis de conduire français. Nous avons un groupe des »Français au Likoud » sur FaceBook qui, je l’espère, attirera bon nombre d’olim de France qui s’identifient pour la plupart aux idées de la droite israélienne.
Lph: Quel est votre principal message aux olim francophones?
S.H.: Leur bien-être en Israël dépend de leur engagement politique. Sans pour autant devenir député, ils doivent comprendre comment fonctionne la politique israélienne et s’engager, comme d’autres l’ont déjà fait au sein du Likoud. C’est une condition fondamentale pour se faire entendre.
Lph: Et votre avenir? Où vous voyez-vous dans 10 ans?
S.H.: Même si la vie politique demande des sacrifices, je me lève tous les matins avec le sourire, à l’idée d’aller servir mon peuple. Alors je souhaite continuer encore longtemps en politique, j’espère que les électeurs me feront confiance pour que je puisse poursuivre ce que je considère comme ma mission pour mon pays.
Propos recueillis par Guitel Ben-Ishay
Quelle différence avec nos féministes beni-oui-oui qui n’arrivent aux responsabilités que par la magie de la sacro-sainte parité à tout prix ! Continuez, Madame !