Il est quand même paradoxal de constater qu’après la perte de six millions d’âmes au XXe siècle, des millions d’autres de par le monde se réclament de leur identité d’êtres juifs.
Il y a de cela 2700 ans, les Assyriens qui avaient conquis le royaume d’Israël en avaient exilé ses dix tribus. En fait, le peuple juif descend essentiellement des deux seules tribus de Juda et de Benjamin et les légendes sur les dix tribus perdues sont légion. Dans les Écritures, il est indiqué que la fin des temps sera marquée par le rassemblement des exilés, ainsi que le prédisait Isaïe (27-13) : « Alors arriveront ceux qui étaient égarés dans le pays d’Assyrie et des éconduits en terre d’Égypte. » Durant des siècles, des rêveurs et des aventuriers se rendirent aux confins de l’Orient et de l’Afrique afin de retrouver ces tribus que la légende situe au-delà de la rivière Sambation, rivière qui arrêterait de couler le sabbat…
Aujourd’hui, près d’un million et demi de Bné Ménashé de la région bordant la frontière indo-birmane à l’Est du Bangladesh se réclament de la tribu israélite de Manassé. Ce sont : les Chhinlung de la région tibéto-birmane connus sous le nom de Mizo et Kuki en Inde, Chin en Myanmar et Lushai au Bangladesh. Selon leur tradition, ils auraient fui la Chine et les Chinois leur auraient subtilisé leur parchemin sacré. De nos jours, les Juifs chinois sont pour la plupart originaires de Kaifeng, entre le Tibet et le Szechuan. Ils constituent une communauté d’environ cinquante mille âmes.
Force est de reconnaître que depuis près de 2700 ans, ce sont les traditions bibliques diluées au travers des âges qui sont à la source de la conscience identitaire des Chhinlung.
Les Bné Ménashé pratiquent le sacrifice, chantent l’exode de l’Égypte, et il est possible d’identifier chez eux un certain nombre de coutumes remontant aux temps bibliques. Force est de reconnaître que depuis près de 2700 ans, ce sont les traditions bibliques diluées au travers des âges qui sont à la source de la conscience identitaire des Chhinlung. Au début du XXe siècle, les missionnaires chrétiens entreprirent de les convertir en ne leur présentant que le Nouveau Testament. Toutefois, bien que près d’un siècle se soit écoulé, ils sont restés convaincus que leur identité était ailleurs. Ils font de grands efforts pour que l’on reconnaisse leur spécificité et leur appartenance à une des tribus d’Israël. L’organisation Amishav fondée par le rabbin Eliyahu Avichail s’est donné pour mission de repérer les tribus perdues et de faciliter leur venue en Israël.
Les sources historiques rapportaient des légendes ou des ouï-dire, mais souvent, elles étaient teintées de l’idéologie de l’espoir de retrouver les tribus perdues. Mais le fait est là. Plusieurs milliers de Chinlung ont émigré en Israël et beaucoup d’autres veulent suivre. Il existe une très forte identité à Israël au sein des Chhinlung – et de beaucoup d’autres populations d’ailleurs. En 1986, le front national Mizo a obtenu un statut d’état en Inde et bien de nombreux de ses ressortissants ont demandé à l’État d’Israël d’être reconnus comme une des tribus perdues d’Israël. Il y a également une mouvance indépendantiste qui vise à faire du Mizoram un pays des 7 millions de Mizos éparpilllés dans les états voisins du Manipurm d’Assam et de Tripura en Inde ainsi qu’au Myanmar et au Bangladesh.
Hillel Halkin est un journaliste qui a décidé de retourner dans la région et de vérifier si ces tribus sont vraiment de la descendance des exilés du royaume d’Israël. Pour cela, il s’est proposé d’étudier leurs légendes et de les dépareiller des adaptations modernes en raison de la diffusion de la Bible hébraïque pour confirmer la validité de leur origine remontant au Royaume d’Israël. Il a fini par mettre la main sur des écrits qui déstabilisent la théorie du mythe.
Grâce à la rencontre avec les Chhinlung, on a réussi à trouver la signification du mot hébraïque séla qui termine beaucoup de psaumes : amen-séla revient fréquemment. Jusque-là, on en ignorait la signification exacte. Chez les Chhinlung, ce terme signifie qu’il revient à l’assistance de répéter le dernier verset. Il s’agirait donc d’une annotation musicale.
Il est quand même paradoxal de constater qu’après la perte de six millions d’âmes au XXe siècle, des millions d’autres de par le monde se réclament de leur identité d’êtres juifs.
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“Il est quand même paradoxal de constater qu’après la perte de six millions d’âmes au XXe siècle, des millions d’autres de par le monde se réclament de leur identité d’êtres juifs.”
Si les juifs veulent assurer leur pérennité les rabbins devraient maintenant penser sérieusement à assouplir un peu les règles de reconnaissance et de conversion. A commencer par reconnaître comme juif celui ou celle dont le père est juif. Dans la Thora la transmission se faisait aussi et surtout par le nom du père…