Une étude clinique menée sous la direction du Prof. Shamgar Ben-Eliyahu de l’École de psychologie et de l’École des neurosciences de l’Université de Tel-Aviv, a montré qu’un traitement court et simple à base de médicaments existants contre le stress et la douleur conduit à une réduction considérable des risques de récidive post-chirurgicale du cancer.
Elle a été réalisée en collaboration avec des chercheurs de l’Ecole de médecine de l’Université de Tel-Aviv travaillant dans des hôpitaux affiliés: les Prof. Oded Zmora et Moshe Shabtai, du Sheba Medical Center, le Dr. Eran Sharon du Centre médical Rabin et le Dr. Tanir Allweis, du Centre médical Kaplan.
Ses résultats viennent d’être publiés dans la revue médicale Clinical Cancer Research.
15% des patientes atteintes du cancer du sein et 20% à 40% de ceux atteints d’un cancer colorectal connaissent une récidive métastasique après l’ablation d’une tumeur cancéreuse. Ce taux peut même atteindre jusqu’à 96% dans le cas du cancer du pancréas.
Le stress favorise le développement des métastases
“Quand le corps est en état de stress, physiologique ou psychologique, il secrète une grande quantité d’hormones de la famille des prostaglandines et des catécholamines”, explique le Prof. Ben-Eliyahu. “Ces hormones, qui diminuent l’activité des cellules immunitaires, favorisent indirectement le développement des métastases. De plus, elles aident directement les cellules cancéreuses restées dans le corps après l’opération à créer et développer des métastases dangereuses. Ainsi, en raison de l’exposition à ces hormones, les tissus cancéreux deviennent plus agressifs et métastatiques”.
Lors d’une étude préliminaire menée en laboratoire à l’Université de Tel-Aviv au cours des deux dernières décennies, le Prof. Ben-Eliyahu et ses étudiants ont montré que l’opération chirurgicale et les réactions physiologiques qui l’accompagnent augmentent les risques de développement de maladies cancéreuses métastasiques, mais que ce processus pouvait être freiné par l’utilisation d’une combinaison de médicaments existants, bloquant les effets des hormones de stress et d’inflammation.
Des résultats significatifs avec des médicaments banals
Le traitement a été testé sur 38 patientes atteintes d’un cancer du sein et 34 patients atteints de cancer colorectal dans les centres médicaux Sheba, Rabin et Kaplan. Les chercheurs ont administré aux patients deux médicaments connus et sûrs: du Propranolol (Deralin), bêtabloquant utilisé pour le traitement de l’hypertension et de l’anxiété, et de l’Etodolac (Etopan), anti-inflammatoire non-stéroïdien qui sert à prévenir la douleur et l’inflammation. Les malades ont pris les médicaments pendant onze jours, cinq jours avant l’intervention et cinq jours après.
“Le traitement a considérablement réduit le potentiel métastasique de la tumeur, mesuré selon des marqueurs moléculaires des cellules cancéreuses “, explique le Prof. Ben-Eliyahu. “En outre, il a amélioré la quantité et le type de leucocytes (globules blancs) des patients, mesures qui elles aussi prédisent une probabilité plus faible de récidive du cancer. En plus des échantillons pris sur la tumeur enlevée, nous avons examiné dix autres marqueurs biologiques (bio-marqueurs) dans le sang des patients avant et après la chirurgie et les résultats ont indiqués de nets changements physiologiques anti-métastatiques. Entre autres, le traitement médicamenteux a réduit de près de 50% les niveaux d’IL-6 (hormone immunitaire), de CRP (protéine inflammatoire) et de EMT (marqueur biologique moléculaire des tissus cancéreux), tous ces marqueurs prédisant le processus métastatique.
“L’un des résultats intéressants et importants de cette étude est que les réactions de stress et d’inflammation que le corps développe avant l’opération conduisent apparemment à des changements pro-métastatiques dans la tumeur. Il semble que l’anxiété et les réactions endocriniennes qui l’accompagnent pendant la période d’attente de l’intervention chirurgicale peuvent avoir un impact négatif sur la tumeur et les paramètres du corps du patient. Les études réalisées sur des patients atteintes du cancer du sein et ceux atteints d’un cancer colorectal ont obtenu des résultats similaires. Il est important de noter que dans les deux cas le traitement médicamenteux s’est caractérisé par un profil de sécurité favorable”.
Empêcher le retour du cancer
En dépit de ces résultats, le Prof. Ben-Eliyahu relève qu’une partie du corps médical ne croient toujours pas à l’influence des effets du stress, en particulier de ceux qui résultent de facteurs psychologiques, comme l’attente de l’opération ou la peur de la propagation de la maladie. “Il y a des indicateurs biologiques qui indiquent clairement la propagation du cancer à la suite de réactions de stress et d’inflammation corporelles, au moins chez les animaux, mais il n’y a pas encore de conscience de l’importance des effets psychologiques sur la progression de la maladie chez l’homme”, dit-il.
Après le succès de cette étude, les chercheurs ont l’intention de mener d’autres recherches pour réduire les réactions de stress préopératoire au moyen d’une intervention comportementale psychologique, peut-être sans l’usage de médicaments. Le Prof. Ben-Eliyahu ajoute que bien que l’étude clinique ait été menée sur des patients atteints de cancer du sein et du côlon, la réduction du risque de propagation des métastases après la chirurgie n’est pas propre à un type de cancer ou à un autre.
Selon lui, à l’encontre des médicaments anticancéreux existants qui sont consommés par le patient pendant le restant de ses jours, et ne parviennent pour le moment qu’à prolonger la vie, le traitement mis au point par les chercheurs de l’Université de Tel-Aviv: “vise à augmenter la proportion de patients chez qui le cancer ne reviendra pas, et par là à sauver des vies”.
“Après le succès de cette recherche, nous prévoyons de réaliser dans une prochaine étape une étude clinique élargie parmi 600 patients atteints du cancer du côlon, puis chez 200 patients atteints d’un cancer du pancréas, mais pour ce nous devrons mobiliser au moins un million de dollars!” dit le Prof. Ben-Eliyahu. “Les entreprises pharmaceutiques ne sont pas enclines à soutenir ce genre d’études, car le traitement que nous proposons est court et basé sur des médicaments déjà existants et peu coûteux”.
L’idée et ses applications pratiques ne sont pas nouvelles ! Mais là, c’est un “grrrrrrrand professeurrrrr” qui le dit ! Et en Israel ! après avoir fait une expérimentation…. somme toute banale, à partir d’une idée qui a bien 10 bonnes années d’existence.