Quand elle prit les commandes de C à vous, Anne-Sophie Lapix en fit exploser le succès, maîtresse de maison à la cool de ce type de talk-show qui prétend allier sérieux et divertissement.

Outre son professionnalisme, l’animatrice retrouvait en même temps les joies du week-end, sacrifiées lorsqu’elle assura 5 ans durant les interviews politiques de Dimanche+ sur Canal, et put les partager avec son Arthur de mari et leurs 3 enfants, nés de leurs précédentes unions respectives.
Arthur Sadoun, celui qui sera sacré jeudi le nouveau roi de Publicis, c’est lui son mec, lui qui succèdera jeudi à Maurice Lévy, 75 ans: qui d’autre en effet que ce pur produit maison de 46 ans pour prendre les rennes du groupe dont l’emblème est une tête de lion.
Diplômé de l’European Business School et titulaire d’un MBA de l’Insead, Arthur Sadoun, d’origine algérienne séfarade, a pour père l’illustre Roland Sadoun, grand résistant et ancien dirigeant de l’IFOP. Arthur, il fonda l’agence Z Group au Chili, dirigea le développement international de TBWA Worldwide avant d’en être le DG puis le PDG, présida Publicis Conseil jusqu’en 2009 avant d’être nommé Président de Publicis Worldwide France et Président du directoire de Publicis.
Capital en avril le surnomma Flippé le dauphin, et révéla qu’on ne pouvait, dans son bureau, louper ce siège éjectable chiné aux Puces, comme pour rappeler qu’on pouvait descendre aussi vite qu’on est monté. Monter, il ne cesse de le faire, lui qui dès jeudi, remplacera le Baobab, Maurice Levy, 75 ans, icône mondiale de la pub lui-même appelé à remplacer Elisabeth Badinter à la présidence du conseil de surveillance, et qui, évoquant la retraite, disait dans Libération en 2011: en langage militaire, on appelle cela la déroute.
ARTHUR , LA CGT LE SURNOMMA EJECTATOR
Arthur ? Le Lion rugissant, magazine CGT de Publicis, le surnomma en 2015 Ejectator, eu égard à un style de management brutal. Le voilà promu patron, Président du Directoire du géant mondial de la communication, cette ex PME franco-française de 3 000 personnes employant aujourd’hui 80 000 personnes et pesant près de 15 milliards d’euros en Bourse.
Voici donc, après le règne Maurice Lévy, patron très charismatique qui tutoyait les plus grands de la planète, l’ère Sadoun : le jeune homme occupera le bureau futuriste de son prédécesseur au 133, Avenue des Champs Elysées, et devra en relever, des défis complexes, Publicis, comme ses concurrents, devant aussi faire face au poids grandissant de Google ou Facebook, qui captent l’essentiel de la croissance de la publicité numérique.
Aura-t-il l’entregent et l’influence de celui qu’il va remplacer, cet anxieux positif ? Ça devrait le faire, vu que ceux qui le connaissent le décrivent comme un bourreau de travail, ultra-compétitif, toujours jet-lagué, avec une endurance folle, devant toutefois travailler … sa diplomatie. Sa fougue ? Maurice Lévy raconta, dans un entretien au JDD qui remonte déjà à 2006, qu’en anglais, on aurait dit que son poulain était laser focused : Quand il est focalisé sur quelque chose, c’est un laser, il n’y a pas de dispersion. Avec les conséquences négatives que cela peut avoir. Clac ! Clac ! Clac ! , mime d’un geste de la main cet autre qui le connaît bien.
Tiens, il a encore un défaut, Arthur, et celui-là, je le partage: à l’écrit, il paraît qu’il ne sait pas faire court et que ses mails, personne ne les lit jusqu’au bout.
Et dire que son CV fut d’abord rejeté avec la mention aucun avenir dans la pub… C’est en réalité dès son recrutement par Maurice Lévy en 2009 qu’Arthur Sadoun fit des étincelles, redressant Publicis Conseil en quelques mois. Le seul domaine dans lequel Arthur me dépasse, c’est la taille ! s’amuse fréquemment Maurice Lévy, évoquant le géant qu’il découvrit à la sortie d’un ascenseur : c’est que le lionceau Sadoun dépasse avec son mètre quatre-vingt-dix-sept le lion Lévy. Et de 7 cm ! Son patron, quoi ! Son mentor !
Le goût d’entreprendre, il le démontre dès l’école en créant Want, une société qui monte des soirées étudiantes dans des lieux mythiques de Paris, tout en gérant une bourse d’échange d’objets d’occasion par Minitel, avant d’aller à l’international, avec en tête une dizaine de projets hétéroclites allant de l’achat de stocks de vêtements Kookaï, Régina Rubens et Diapositive, en fin de saison en France, pour les revendre 10 à 50 fois plus cher au Chili, à l’achat d’objets promotionnels en Chine pour les revendre dans le cadre de campagnes de « promo » clés en main à des géants comme Nestlé ou Coca. La publicité, il y vient par hasard, s’intéressant plus aux manières de faire avancer les choses et de faire bouger les lignes qu’à la réflexion en chambre. C’était l’anti-intellectuel. Lorsque l’on sortait de son bureau, on était regonflé, prêt à décrocher la Lune, dit cet ancien manager de TBWA, avec une manière de te regarder comme si tu étais la personne la plus importante au monde.
Pour Maurice Lévy, son dauphin a les deux qualités fondamentales d’un publicitaire : le doute et l’écoute. Depuis dix ans, ils échangent une vingtaine de mails chaque jour, y compris les jours fériés, travaillant très étroitement et n’ayant pour autant jamais abandonné le vouvoiement.
Vous savez quoi ? On dit de lui qu’il a une énergie physique épuisante, ne tient jamais en place, consomme en permanence du sucre avec des Malabars, des fraises Tagada qu’il sort de sa poche tout en écrivant des textos. Il paraît même que lui, lorsqu’il nage le week-end au Racing pour officiellement régler des problèmes de dos, eh bien il trouve dans le bassin la clé de bien des dossiers complexes. Son ami et son rival ? C’est Yannick Bolloré, le P-DG d’Havas, fils de Vincent Bolloré. Publicis et Havas, on dirait une pub pour la pub : les deux géants français. Qui se claquent la bise. Des potes quoi.
POWER COUPLE
Regardez-le, Arthur : avec sa coupe de cheveux en pétard, on croirait Sting, vous savez, le chanteur. C’est que Arthur Sadoun, lui, il l’a pas, le look des hommes de pub branchouillés, invariablement vêtu qu’il est de son costume sombre, chemise blanche et cravate noire of course.
Coïncidence ? Ne voilà-t-il pas qu’au moment où lui débute dans ses nouvelles fonctions, sa journaliste d’épouse, qui avoue avoir gardé beaucoup d’appétit pour la politique, et répéta que son rêve était d’avoir comme invités un Martin Scorsese ou un Woody Allen, pourra se faire plaisir puisqu’elle remplacera David Pujadas au JT de 20 heures de France 2, devenant la seule femme sur cette case depuis Christine Ockrent.
L’appellation power couple, ces deux-là la récusent, eux qui sèchent les dîners en ville et ont même mis fin, timing et enfants obligent, au traditionnel dîner qu’ils donnaient chaque mois dans leur maison de maître du XVIe arrondissement. Où ils se ressourcent ? Au Pays Basque, elle étant la fille du plus grand promoteur de Saint-Jean-de-Luz. Mais lui, deux jours de vacances, paraît que ça lui suffit. A quoi ils n’ont pas renoncé ? Aux tribunes de Roland-Garros et au tapis rouge de Cannes, Pierre Lescure, président du Festival, étant un des chroniqueurs de C à vous.
Voilà : Arthur, longtemps moins connu que son épouse, entre jeudi dans la lumière. Power couple, vous disais-je. Bonne chance à eux.
Sarah Cattan