Macron, Mélenchon ou Valls: qui a tué le Parti socialiste?

Les législatives en vue, les socialistes s’inquiètent, qui redoutent une défaite sans précédent qui condamnerait le PS à la mort politique. Qui veut tuer le PS? Macron? Mélenchon? Valls? Ou les socialistes eux-mêmes?ob_e03af0_rose-fanee-01

Le PS se meurt, le PS est mort… Ainsi s’accomplit, à travers sa personne, l’oracle de Manuel Valls, première victime de ce printemps 2017 qui prend de plus en plus des airs de printemps 1958.

Souvenez-vous, c’était le 14 juin 2014, devant un conseil national du Parti socialiste. Manuel Valls occupait Matignon depuis trois mois, ayant obtenu la tête de Jean-Marc Ayrault en formant un triumvirat avec Arnaud Montebourg et Benoît Hamon. Le Premier ministre était venu à la Maison de la Chimie avertir ses camarades en amitiés socialistes des dangers qui se présentaient à eux.

Le risque de voir Marine Le Pen au second tour de l’élection présidentielle existe » avait-il dit. Et de prévenir : « oui, la gauche peut mourir ». Et de prophétiser: « Nous sentons bien que nous sommes arrivés au bout de quelque chose, au bout peut-être même d’un cycle historique pour notre parti », actant que « la gauche n’a jamais été aussi faible dans l’histoire de la VeRépublique ».

Rendons justice à Manuel Valls. Le PS en est bien là où il pensait le voir finir. Le PS se meurt, le PS est mort… Détruit par Macron, Mélenchon mais aussi et peut être surtout par les socialistes eux-mêmes…

Agents doubles électoraux

 » C’est horrible, Macron veut nous tuer!  » Les députés socialistes sortant s’alarment. La publication par En Marche des listes de candidats « République en marche « , si tôt, si vite après la victoire d’Emmanuel Macron les prend presque par surprise. C’est que beaucoup d’entre eux ont cru (et peut être certains l’espèrent-ils encore) qu’il serait possible, au cas par cas, en douce, de conclure des petits arrangements entre amis, histoire de sauver son siège en jouant les agents doubles électoraux.

Mais las… Ce n’est pas ainsi (pour le moment) que les choses se passent… On ne met le pied dans la porte d’En Marche au nom des avantages et privilèges anciens… Ce monde politique là est révolu… Et l’exemple fait avec Manuel Valls a valeur édificatrice. Le renouvellement n’est pas la reconduction. Valls, n’en déplaise, évoque Apollinaire, « A la fin tu es las de ce monde ancien »…

Etrange monde que le Parti socialiste. Qui n’a pas entendu Manuel Valls. Qui n’a pas compris ce qu’emportait, et emporte encore, Emmanuel Macron avec sa victoire. Les élus socialistes sont comme les 500 du Directoire le 18 Brumaire, dispersés façon puzzle dans les jardins du château de Saint-Cloud. Ils s’égayent à tous les vents, affolés et apeurés. Et n’ont plus pour seul espoir que de se répéter, comme ils le font depuis six mois, que le PS est là pour toujours, qui a connu Jaurès, Blum et Mitterrand.

 » Il ne peut rien faire sans nous, le PS c’est quand même le PS  » décrètent ceux qui entendent jouer les inflexibles. Alors qu’il a déjà fait sans eux. Et que tout indique qu’il entend persister. Ce que disent les socialistes a déjà été dit par les radicaux, maîtres de la IIIe république. Ou les MRP, pivots de la IVe.  » De Gaulle ne pourra rien faire sans nous  » proclamaient-ils avec la même martiale assurance. Et de Gaulle a fait. Sans eux.

Le PS se meurt, le PS est mort. Et les assassins ne sont ni Macron, ni Mélenchon, ce sont les socialistes eux-mêmes. Il n’est pas d’autre vérité à constater. Contemplons le spectacle des derniers jours pour nous en convaincre.

Ici, Benoît Hamon, le Gaston Defferre de l’époque, qui après avoir offert un tête-à-queue électoral sans précédent au PS, digne de 69, annonce qu’il lance son mouvement personnel…  » Un mouvement pour reconstruire une gauche inventive, qui dépassera les étiquettes politiques  » dit-il, fort de ses 6% au premier tour de l’élection présidentielle, lui qui moqua souvent les 6% de Valls au premier tour de la Primaire socialiste de 2011…

Là, ce sont Martine Aubry, Anne Hidalgo et Christiane Taubira qui, vexées paraît-il d’avoir été doublées par Hamon, annoncent qu’elles lancent leur mouvement personnel… « Dès demain »disent-elles. Et Pourquoi pas Ici et maintenant?

Les synthèses ne font plus illusion

Ailleurs, c’est Stéphane Le Foll qui, agacé par l’annonce des mouvements annonçant la création de mouvements, moque ses initiatives qui ne sont pas sans évoquer la période post 1958, quand la gauche éclatée par le retour du général au pouvoir se dissolvait dans des aventures multiples sans perspective…  » On pourrait attendre un peu plus de maturité. Plutôt qu’au dépassement du PS à travers ces mouvements, on devrait penser au dépassement des ego  » déclare celui qui est encore pour quatre jours porte-parole du gouvernement. Il n’a pas tort.

Ces agitations révèlent un Parti socialiste hébergeant des socialistes qui ne se reconnaissent plus comme tels dès lors qu’ils sont entre eux. On a déjà noté l’empressement à lancer une procédure d’exclusion contre Manuel Valls, héros girardien du PS, et l’on contemple, médusé, le processus d’autodestruction qui se poursuit, comme si rien ne pouvait l’arrêter.

Parce qu’il ne faut pas s’y tromper. La Vieille maison chère à Léon Blum ne peut plus être la maison commune de personnalités qui passent leur temps à s’exclure du mouvement les unes les autres, au prétexte que les unes et les autres s’excluent d’eux-mêmes du mouvement. Quand Stéphane Le Foll en appelle à la maturité des socialistes tout en signifiant “Si certains veulent partir, alors qu’ils quittent le PS, au moins c’est clair!”, il participe de ce mouvement de dissolution.

Les électeurs qui votaient socialistes et ont fini par voter Macron et Mélenchon au premier tour de l’élection présidentielle ne sont plus dupes du spectacle joué par les socialistes depuis trop longtemps. Ils ont trouvé en Macron et Mélenchon la cohérence et la pertinence que les socialistes divisés et clivés ne leur proposaient plus. Les  » synthèses  » en carton des congrès socialistes ne font plus illusion.

Le lancement de mouvements à côté du PS atteste de la dispersion. Et il n’y a plus de Jospin Premier secrétaire pour enrayer ce mouvement, lui qui avait été confronté, en son temps, à une possible dissolution des énergies socialistes :  » j’apprécie que certaines et certains ouvrent des clubs des fondations des mouvements, pourquoi pas si ils le veulent mais voyez-vous moi mon club c’est le PS « . Sauf qu’aujourd’hui, le PS n’est plus un club, mais un ciné-club, pour amateurs de vieux films socialistes. Mitterrand au Panthéon, ça avait une autre gueule que Hamon à Bercy…

bruno_roger_petit-challengeBruno-Roger Petit

Source Challenges

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