Pizza Hut Israël a fait le buzz en se moquant de Marwan Barghouti, que le service des prisons israélien a affirmé avoir filmé en train de manger dans sa cellule alors qu’il était supposé mener une grève des prisonniers palestiniens qui purgent leurs peines, comme lui, pour avoir commis des actes de terrorisme ayant ôté la vie à des Israéliens.
Un post Facebook montrait une capture d’écran de la vidéo photoshoppée avec une boîte de pizza traînant dans la cellule et les mots : « Barghouti, si tu arrêtes déjà la grève, tu ne préfèrerais pas de la pizza ? »
L’histoire ne s’arrête pas là. Une campagne a été montée contre Pizza Hut sur Twitter par les pro-Palestiniens sous le hashtag #boycott_pizzahut, comme avec cette vidéo d’AJ+ (Al Jazeera).
Palestinians call for #Boycott_Pizzahut after ad mocks leader of prison hunger strike. pic.twitter.com/r88DKc6mDO
— AJ+ (@ajplus) 10 mai 2017
La campagne semblait avoir porté ses fruits avec une apparente déclaration de Pizza Hut International condamnant le post de sa filiale israélienne, ce qui a incité cette dernière à faire marche arrière en le supprimant .
Et la presse s’est mise à relayer l’histoire de ce rétropédalage : suivant le Jerusalem Post (Pizza Hut s’excuse pour un post se moquant de la grève de la faim palestinienne), l’AFP et la presse française (Le Parisien, L’Express, Le Point, LCI…) ont affirmé que Pizza Hut s’était excusé :
Des excuses made in Lebanon
Pourtant, après la parution de l’article du Jerusalem Post le 9 mai mais avant celle des articles français le 10 mai, le blog Israellycool, qui avait lui-même d’abord cru aux excuses de la chaîne, a soulevé le lièvre : « Pizza Hut International » n’a visiblement jamais émis de condamnation. Le post de condamnation venait en réalité de la page Facebook de Pizza Hut Liban !
L’entête « Pizza Hut » (Lebanon n’apparaissant que sur la page elle-même mais pas sur le post) aura suffi à tromper les médias. Des journalistes sérieux auraient quand même dû aller lire le post. Ils se seraient rendus compte qu’il ne s’agissait pas, comme cela se pratique sur Facebook, d’un partage de post depuis une page « Pizza Hut International », mais d’un texte rédigé directement sur la page de Pizza Hut Liban.
Les journalistes auraient aussi pu consulter la page de relations publiques de Pizza Hut et y constater qu’aucun communiqué n’y figurait sur cette affaire.
Les administrateurs des comptes Facebook et Twitter de Pizza Hut France, qui ont cru bon de diffuser à leurs clients ces « excuses », auraient pu en faire autant (le tweet diffuse d’ailleurs le texte en capture d’écran, puisqu’il n’y a eu pas de tweet d’excuse émis par un compte international de Pizza Hut).
Pizza Hut International présente ses excuses et
répond à #BoycottPizzaHut pic.twitter.com/rfNXCtyLCz— Pizza Hut France (@pizzahutfr) 10 mai 2017
D’ailleurs, il semble qu’il n’existe pas de structure appelée Pizza Hut « International ». Sur le site internet de Pizza Hut, la page « international » liste simplement les sites de Pizza Hut dans le monde. La page Facebook à ce nom, celle-là même qui est sensée avoir diffusé le communiqué, est vide, suivie par 28 personnes et référence un numéro de téléphone au Pakistan…
Fausses excuses, fausse grève, fausses nouvelles
Ainsi les excuses de Pizza Hut n’en sont pas.
La grève de la faim n’en est pas vraiment une – non seulement si l’on en croit la vidéo, mais aussi parce que ses motivations n’ont rien à voir avec les conditions de détention des prisonniers palestiniens, mais plutôt avec une lutte politique interne aux Palestiniens, qui voit Marwan Barghouti contester la place de Mahmoud Abbas.
Malgré cela, depuis des semaines, les journaux parlent complaisamment de ce mouvement en relayant la propagande palestinienne la plus éhontée. Par exemple, « Plus de 850 000 Palestiniens ont été incarcérés par Israël depuis l’occupation, en 1967, de leurs Territoires, selon leurs dirigeants », répète l’AFP sans remettre en question ce chiffre invraisemblable ni jamais en donner de source.
Barghouti, qui est quand même un meurtrier (si déterminé à tuer des Juifs que l’une des victimes des assassinats qu’il a commandités était un moine orthodoxe grec confondu avec un Juif religieux à cause de sa barbe), est tellement brimé qu’il a tous les outils nécessaires pour rédiger depuis sa cellule un texte de lancement de sa campagne de « grève de la faim » et le faire publier dans le New York Times. Le quotidien américain, qui l’avait introduit comme un « leader et parlementaire palestinien », a été obligé de publier une note de l’éditeur dans un numéro suivant pour préciser que l’article « expliquait la condamnation à la prison de l’auteur mais négligeait de fournir un contexte suffisant en mentionnant les offenses pour lesquelles il a été condamné. Il y a eu 5 cas de meurtres et l’adhésion à une organisation terroriste. »
Alors que la grève a été largement couverte par la presse française, lorsque la vidéo de Barghouti mangeant en cachette est sortie, les médias français n’en ont presque pas parlé (ou alors en l’évoquant comme France Info comme une « vidéo pour discréditer Barghouti » – mais de quel crédit peut donc bien se prévaloir un terroriste ?).
Et maintenant, ils relaient une fausse déclaration émanant du Liban comme s’il s’agissait d’un communiqué officiel émanant du siège d’une entreprise américaine.
S’il s’avère effectivement que la déclaration d’excuses de Pizza Hut n’est pas authentique, il nous paraîtrait déontologique de la part des médias ayant relayé cette information d’émettre un correctif.
InfoEquitable contacte les médias concernés et informera ses lecteurs des développements.
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