Montpellier : plongée au cœur du mikvé

Vestige d’une synagogue médiévale ce bain rituel a été classé en 2004. L’imposante porte de bois sombre s’ouvre sur une volée de marches. Au 1 rue de la Barralerie, l’histoire, plus que millénaire de la présence juive à Montpellier s’écrit en lettres de pierre. le-mikve_montpellier

La lumière blafarde préserve une sorte de mystère tout autant que la surprise de la découverte : celle d’un bassin creusé à même le sol, le mikvé, empli d’une eau limpide aux reflets bleu-vert, essentiellement réservé, durant les XIIe et XIIIe siècles, aux bains de purification des dames.

Notamment la veille des noces pour les jeunes filles

 » Ce mikvé est l’un des plus anciens, des mieux conservés d’Europe, commente l’historien Michaël Iancu, directeur de l’institut Maïmonide. Il est d’ailleurs toujours licite, apte à l’utilisation, selon les principes de la loi juive. »

Soit celui d’un bain rituel après chaque cycle féminin menstruel ainsi, qu’impérativement, la veille des noces pour les jeunes filles.  » Elles passent ainsi d’impures à pures, de tamé à tahor en hébreu. » Mais les hommes fréquentent, eux aussi, le mikvé.

 » La veille du shabbat et des grandes fêtes du calendrier lunaire hébraïque. » L’immersion des corps, entièrement dénudés – un vestibule, aménagé avec des niches creusées et des bancs, sert de vestiaire -, dure quelques secondes dans une eau renouvelée en permanence par un petit orifice.

 » On y voit l’origine du baptême chrétien autant que de l’eau bénite. Certains disent qu’il y avait sept immersions, chiffre symbole du monothéisme, brèves mais successives. » Femmes, et hommes donc, ressortent du bassin d’eau vive, d’une contenance approximative de 800 litres, prêts à recommencer un nouveau cycle de leurs vies.

Plus anecdotique, l’usage du lieu pour la purification des ustensiles de cuisine, semble également avéré. Daté du XIIe siècle par les archéologues, le mikvé a finalement été peu utilisé, grosso modo un peu plus de deux siècles, dans son but premier.

 » À l’expulsion des juifs par Philippe Le Bel, en 1306 puis, surtout, après l’édit définitif de Charles VI en 1394, le mikvé a probablement été utilisé par la population locale non-juive. Il n’a pas été détruit car c’est une source d’eau, élément très précieux au Moyen-Âge. »

Une certitude, confirmée par les archéologues qui ont observé des frottements de cordes sur une ouverture au plafond, « l’utilisation comme puits au XVIIesiècle».

Utilisé ensuite comme puits, cave à charbon, à vin, débarras…

Le mikvé est ensuite tombé de Charybde en Scylla : cave à charbon au XIXe, cave à vin puis débarras propriété des numismates au XXe.

 » Les deux premières campagnes de fouilles archéologiques, menées au début des années 1980 sous l’égide d’Alain Gensac, architecte de la Ville, ont permis de mettre à jour, outre ce mikvé, un grand ensemble synagogal. » Philippe Saurel, le maire, accompagnateur passionné d’une visite retient d’autres éléments de ce site remarquable.

 » Une cuve à vin du XIVesiècle a été mise au jour. Trois grandes arcatures, large de 1,40m, prouvent, au niveau supérieur, l’importance de l’ensemble synagogal du XIesiècle. Lequel avait, outre une salle de prière, un jardin et une fontaine. »

La communauté juive montpelliéraine médiévale, estimée entre 600 à 1 000 âmes avant l’expulsion de 1306, compte alors pour beaucoup dans le rayonnement intellectuel de la cité. « Le judaïsme a été d’un apport considérable aux sciences exactes, médecine et philologie, comme à la science mystique et exégétique », insiste Michaël Iancu.  » Ce sont des médecins juifs, arabes et chrétiens qui sont à l’origine de la faculté de médecine », appuie, de son côté, l’édile.

Source midilibre

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