1994, Atlanta. Le britannique David Irving, archiviste et négationniste notoire, fasciné par Hitler et le IIIème Reich, assiste dans un amphithéâtre à une conférence de Déborah Lipstadt, historienne et auteure reconnue défendant farouchement la mémoire de l’Holocauste.
Devant une assemblée prise à témoin, Irving accuse alors l’historienne de ne disposer d’aucune preuve concrète qu’Hitler a ordonné le massacre de six millions de Juifs en Europe, allant même jusqu’à proposer 1.000 dollars à quiconque pourra le prouver.
Admiré des groupuscules néo-nazis, glorifiant Rudolf Hess, l’un des instigateurs des lois de Nuremberg, la réputation de David Irving a été salie par Déborah Lipstadt dans son dernier ouvrage. Aussi assigne-t-il l’auteure ainsi que sa maison d’édition en justice pour diffamation. Mais contrairement aux Etats-Unis, le principe de la présomption d’innocence n’a pas cours au Royaume-Uni où, en termes de diffamation, la charge de la preuve revient à l’accusé.
Déborah Lipstadt, juive de surcroit, se retrouve alors dans la situation aberrante de devoir prouver l’existence des chambres à gaz.
Avec le concours de Richard Rampton et d’Anthony Julius, un médiatique avocat qui a déjà à son actif le retentissant divorce de Diana, la princesse de Galles, elle va se rendre à Auschwitz – le « cœur » de la Shoah, mais aussi celui de ceux qui la dénie –, puis à Cracovie, afin d’apporter les preuves que l’Holocauste a existé, que ce qu’elle dit est vrai… Seulement, aucun des deux hommes ne veut que des victimes des atrocités nazies ne soient appelées à la barre, craignant que ces dernières soient également interrogées par David Irving et finissent par desservir le procès. Un procès qui n’est pas seulement celui de la Shoah, mais celui de tout le Peuple Juif… La question est : une cour de justice est-elle apte à juger l’Histoire ?
Denial (« le déni », « la négation » en français), dont le titre résonne mieux dans sa version originale que celui choisi pour son exploitation en France, est basé sur le livre éponyme écrit par Déborah Lipstadt, Denial : Holocaust history on trial, qui retrace le procès en diffamation que lui a intenté David Irving.
Essentiellement filmé à Londres, certaines scènes ont également été tournées en Pologne, et dans l’ancien camp de concentration et d’extermination d’Auschwitz-Birkenau. Il convient cependant de noter que par respect pour la mémoire des victimes, aucune scène avec des comédiens n’a été tournée dans le camp, la production ayant reconstruit certaines zones de ruines dans une ancienne base de la R.A.F., entre Londres et Oxford.
Ouvert le 11 janvier 2000 à la Cour Royale de Justice de Londres – pour plus de réalité historique, les scènes du procès ont d’ailleurs été tournées dans ces mêmes lieux – le verdict sera rendu trois mois plus tard, après 32 jours d’audience. Le juge Charles Gray, chargé de l’affaire, estima que David Irving était coupable d’avoir délibérément manipulé des faits historiques à des fins idéologiques personnelles.
Si Déborah Lipstadt fut contrainte de lever des fonds pour pouvoir assurer le financement de ce procès – Steven Spielberg entre autre y contribua – ce dernier a coûté à Irving la somme de deux millions de livres sterling, qu’il dut verser à Déborah Lipstadt et à sa maison d’édition Penguin Books. Ruiné, il dut vendre sa maison et tous ses biens.
Pour ne pas être accusé à son tour de réécrire l’Histoire, le scénariste du Procès du siècle, David Hare, se devait d’être d’une précision sans faille dans l’écriture du scénario :
Il fallait que je sois inattaquable en matière d’authenticité des faits, afin que les ennemis du film – les partisans de David Irving – ne puissent m’accuser de réécrire l’Histoire.
Ainsi, tous les dialogues des séquences de prétoire sont mot pour mot les échanges consignés dans les archives officielles.
Rachel Weisz, qui brille dans le rôle-phare du film, habituée aux rôles difficiles, avait rencontré Déborah Lipstadt à New York avant le début du tournage afin de s’entretenir avec elle sur le personnage qu’elle devait incarner. Elle ira même jusqu’à porter certaines de ses tenues dans le film pour un souci d’authenticité poussé à l’extrême.
Quant à Timothy Spall, primé en 2014 pour son interprétation dans Mr. Turner, il campe avec tant de brio un David Irving déplaisant et agressif qu’on aurait presque pitié de lui.
Un film à ne pas manquer !
Le procès du siècle, en salle le 24 avril.
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