Les ultraorthodoxes ont obtenu du maire la fermeture des commerces juifs situés près de la vieille ville, le samedi. Les contrevenants s’exposent à de fortes amendes.
L’histoire débute à l’été 2015, avec l’ouverture d’un complexe cinématographique dans la ville trois fois sainte. Avec ses seize salles, le Yes Planet, installé dans le sud de Jérusalem, est ouvert sept jours sur sept. Y compris, donc, pendant shabbat, du vendredi au coucher du soleil au samedi soir, lorsque les juifs religieux sont tenus de limiter leur interaction avec le monde moderne. Des manifestations sont rapidement organisées par des riverains craignant des nuisances sonores mais surtout par des ultraorthodoxes qui veulent étendre l’interdiction religieuse partout dans la ville.
Entre alors en jeu Nir Barkat, maire de Jérusalem « réunifiée », dénomination qui englobe la partie ouest et la partie est de la ville, annexée par Israël en 1967, où vivent 200 000 Palestiniens. Pour éteindre la grogne des hommes en noir, le premier magistrat décide début janvier de faire appliquer une loi de 1955 qui prévoit la fermeture des commerces juifs pendant shabbat. Mais son injonction se limite à sept épiceries de Jérusalem-Ouest au motif qu’elles sont situées non loin de la vieille ville. Depuis le 1er avril, leurs rideaux sont censés rester baissés à partir du vendredi soir.
Perte de 20 % du chiffre d’affaires
Derrière sa caisse, Gidon Siboni ne décolère pas. Propriétaire d’un petit supermarché sur l’une des artères très fréquentées de Jérusalem-Ouest, ce Hiérosolymitain grisonnant salue toutes les deux minutes un ami ou une connaissance de l’autre côté de la rue. Son épicerie est ouverte tous les jours « et elle le restera », affirme haut et fort le commerçant, qui se dit prêt à se battre contre cette décision. Cette mesure, si elle était appliquée, lui ferait perdre, selon ses calculs, près de 20 % de son chiffre d’affaires.
En activité depuis vingt-cinq ans, Gidon Siboni n’a pas de mots assez durs pour qualifier son premier édile. « Peu importent les conséquences, nous irons jusqu’au bout », assure-t-il avec un aplomb étonnant quand on sait que les amendes prévues s’élèvent à plus de 200 euros par shabbat et une possible perte de la licence d’exploitation. Avec quatre compagnons d’infortune, Gidon Siboni a embauché Yossi Havilio, un avocat qui connaît par cœur les rouages de la municipalité, dont il était le conseiller juridique jusqu’à il y a peu dans d’autres affaires. Sa mission : contester les amendes qui seront dressées contre les réfractaires. Les deux autres propriétaires concernés, moins téméraires, ont annoncé qu’ils seraient désormais fermés ce jour-là.
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