Tribune Juive

Sarah Cattan : Jours de colère chez Macron

Allez, te fâche pas, Manu, et choisis bien tes combats : il reste moins de deux mois et votre campagne, c’est vrai que tous, nous en étions déjà écœurés. L’offre, d’abord, pas glamour, pas sérieuse, pas rassurante. Après des Primaires que l’on eût cru pourtant prometteuses.

 

Déjà, toi, Manu, tu t’étais fait remarquer. Te cassant du gouvernement. Pourquoi non. Affirmant ensuite ta loyauté envers celui qui croit qu’il te fit, mais annonçant aussitôt que tu allais marcher. En Marche, ce n’est qu’hier que j’ai réalisé que ton parti portait tes initiales.

Aujourd’hui tu es très en colère et moi, je ne sais plus, avec toi, si c’est du lard. Ou du cochon. Pourtant les raisons de ta colère, a priori, elles me hérissent, Manu.

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D’abord, t’as ton porte-parole, Benjamin, qui demande via un communiqué le retrait de Vincent Peillon de la campagne du petit Benoît. Il a fait quoi, cette fois, notre Vincent ? Une référence hasardeuse aux chambres à gaz. Sur France Info. Il a dit quoi précisément ? Qu’il semblerait qu’il y ait des gens de l’UMP et du PS qui se mettaient ensemble, et le philosophe d’ajouter : vous savez, il y a quelque chose heureusement de têtu dans l’Histoire, c’est comme ça qu’on sait qu’il y a eu des chambres à gaz, et qu’on ne peut pas le nier, il y a aujourd’hui des gens de l’UMP […], il y a des gens du PS, […] Je suis sur des faits […] on n’est pas dans l’interprétation qu’il a dit, le Vincent, opérant un rapprochement de fort mauvais goût entre ta volonté de rassemblement – c’est vrai que tu y vas fort – et les chambres à gaz : Qu’on le fasse taire, Vincent Peillon, on n’en peut plus de l’écouter débiter des âneries et la comparaison d’En marche avec les chambres à gaz est un point de non-retour. Peillon, ta tête est demandée.

LA GALAXIE MACRON

Mais s’il n’avait eu que ça, notre Manu, votre Manu, vous tous qui fûtes si prompts à déménager Boulevard Macron, de quelque bord que vous ayez jadis été…

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Non. Encore aujourd’hui, une caricature de notre Manu publiée par Les Républicains. Elle suscite l’indignation générale sur twitter : Haut de forme, nez crochu, coupe-cigare en forme de faucille communiste, bref vous l’aurez compris un dessin qui reprend tous les codes des dessins antisémites des années 30. Son titre ? La vérité sur la galaxie Macron, le candidat étant entouré de douze de ses soutiens, un attelage improbable s’il en est mais là est un autre sujet bien sûr. Intéressant ce choix d’illustration qui rappelle les plus grandes heures de l’antisémitisme, tweeta le journaliste Hugo Clément, alors que ton porte-parole, Benjamin donc, dénonça à raison l’usage de vocables et de représentations puisant dans l’imaginaire antisémite, tant cette caricature à l’évidence reprenait l’iconographie du régime de Vichy : nez crochu, chapeau, cigare, air machiavélique. La totale.

Alors ce soir le parti LR l’a retirée, sa caricature, et l’a remplacée par ta photo pour éviter, qu’ils ont dit, toute polémique inutile.

Tu sais quoi, Manu ? Moi tout d’un coup je me suis demandé : il est Juif, Macron ? Ben non. J’imagine que, l’aurais-tu été, nous l’aurions tous su. Forcément. Déjà que tu bossas à la Banque Rothschild. Tu n’es pas Juif, en plus ?

BOULEVARD MACRON

Alors voilà. Cette campagne nauséabonde, nous aussi on n’en veut plus, parce qu’on n’en peut plus. Moi ? Je préparais un travail, sérieux, basé sur ton programme fraîchement arrivé mais surtout s’interrogeant sur ce qui arrivait à mes amis et mes relations, de tous bords, qui déménageaient, d’un coup d’un seul, sans état d’âme, Boulevard Macron. Certains à la minute-même où Valls perdit la Primaire.

Tu vois, ce soir, je pactise. Je me range – juste ce soir- à ton côté. T’as vu ? C’est particulier d’être Juif, hein ? Ne t’inquiète pas, la honte, elle l’est pour ceux qui les firent, ces amalgames nauséabonds. Pour ceux qui n’hésitèrent pas à recourir à de vieilles recettes, parce qu’ils se sont dit : et si elles marchaient encore, ces recettes ?

Serais-tu mon fils, Manu, que tu serais le benjamin. Demain, je te vouvoie à nouveau. Hey ! Tu ne vois pas qu’un soir de mai, je sois amenée à te donner du Monsieur le Président ? En attendant, Manu, pense à la chanson de Pierre Perret, mon p’tit loup, et oublie-les, les p’tits cons qui t’ont fait ça.

Sarah Cattan

 

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