Excusez mon analyse iconoclaste de la Seoudat Yithro, mes amis.
Nous sommes dans la semaine de la lecture de la Paracha de Yithro, parlant des ” dix paroles ” ou ” dix commandements “. Pour les tunisiens, un Minhag important est de rappeler un miracle qui a fait que subitement les enfants contaminés par une épidémie de croup ont cessé de mourir. C’est ce qu’on m’a enseigné.
Nous avons donc la tradition magnifique d’organiser, le cinquème soir (donc le sixième jour) de la semaine, une séouda (repas) où les enfants (mâles) sont à l’honneur, avec des tables et chaises miniatures, une dinette en guise d’assiettes et de couverts, et des pigeons comme plat principal; couronné d’une pièce montée bien mielleuse en fin de parcours gastronomique.
Je me suis toujours étonné de cette si belle coïncidence avec la lecture des fameux ” dix commandements “. Et soudain j’ai imaginé, rêvé, une explication un peu sophistiquée, qui ne vient que de moi et qui peut être amusante…
Je rappelle d’abord que, pour les tunes peu éduqués dans la rigueur religieuse la plus stricte, mais tout de même très traditionnels, trois minhaguims (coutumes spécifiques) sont connues de tous:
1) A la naissance d’un garçon, le troisième jour qui suit la Brith Mila, nous recevons qui veut entrer chez nous et partager notre repas. Ceci en souvenir du troisième jour du premier circoncis de l’Histoire, Abraham, qui reçut les trois anges venus s’enquérir de sa bonne santé après cet acte d’alliance, et c’est effectivement le moment où la douleur s’estompe (cicatrisation) .
Ce Minhag est considérable car il est tiré directement de la Thora écrite , contrairement à la très grande majorité des coutumes très limitées en terme de support historique.
L’autre fait intéressant: seuls les tunisiens ET les constantinois (qui sont des tunisiens jusqu’à l’arrivée des français au milieu du 19è siècle) ont cette coutume très forte.
2) Le premier jour du mois de Nissan, à la nuit tombée ,les femmes allument une veilleuse, et plongent dans ce mélange d’eau et d’huile des bijoux en or.
Etant rappelé que le premier Nissan est, selon la Thora, le jour où s’est formé le peuple juif ; donc c’est le Rosh Hachana du peuple d’Israël, symétriquement au Rosh Hachana de la création de l’homme (juif ou pas).
Cet allumage est unique aux tunes ET aux constantinois.
Or, les bijoux en or sont un rappel de ces bijoux que les femmes ont offerts pour le Mishkan (le Temple portatif du désert). Ainsi, une fois de plus notre Minhag prend sa source directement dans la Thora écrite…
3) Notre séoudat Yithro rappelle la guérison des enfants; et , pour certains, rappelle aussi un repas organisé par Yithro pour fêter sa conversion au judaïsme (j’ai lu cela, mais je n’ai pas cherché les sources). Or, voilà que ce Minhag vient se coller au point d’orgue de tout notre parcours : la réception des Tables, de notre Thora.
Ainsi, une troisième fois, voici un Minhag qui se “colle” à un évènement fondateur du judaisme.
Et bien sûr spécifiquement tunisien. Je crois savoir que les constantinois n’ont pas ce Minhag (?); et cela corroborerait l’hypothèse d’une épidemie au cours du 19è siècle, qui aurait touché les enfants de Tunis; a priori pas ceux de Constantine.
Je trouve ces rapports entre nos coutumes et le texte le plus essentiel, les dix commandements, tout à fait édifiant du regard des juifs tunisiens de l’Histoire …
Pour terminer sur un clin d’œil : lorsqu’on regarde une carte du pourtour de la Méditerranée, la Tunisie trône au Sud Ouest. présentant un littoral de haut en bas , et orienté tout vers l’Est. Israël en est le symétrique direct. Nous sommes au fin fond de Orient, et le littoral est lui aussi de haut en bas. Entre ces deux pays les navigateurs de l’Histoire de l’Europe ont circulé, ont échangé, ont appris des autres. Et tout s’est fait avec nos deux pays à nous comme pivots, piliers de cette ouverture. Il me semble que ce n’est pas un hasard .
José Boublil
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