Pas de mélanges lactés et carnés, des desserts sans beurre, le contrôle sourcilleux d’un superviseur rabbinique… Laurent Delarbre, ancien chef du restaurant parisien la Tour d’Argent, a découvert à Jérusalem la gastronomie casher auprès du plus célèbre chef israélien Shalom Kadosh.
Ce fut la rencontre de deux noms de la gastronomie. Laurent Delarbre fut pendant six ans, jusqu’en 2016, le chef d’une adresse historique devenue synonyme de bonne chère jusque dans le langage courant français.
Shalom Kadosh est quant à lui le “Bocuse casher”, estime le critique français Gilles Pudlowski en évoquant avec Paul Bocuse l’une des plus célèbres références du bien-manger français.
Le chef israélien est un habitué des grands de ce monde. Il a cuisiné pour le président français Jacques Chirac en visite – “il ne voulait pas croire que ce qu’il avait mangé était casher” – et pour le président américain Barack Obama. Mais “recevoir dans mon restaurant un chef de ce niveau, c’est un honneur”, se félicite-t-il.
Les deux toques ont été réunies par la cinquième semaine de la gastronomie française en Israël, organisée par l’ambassade de France.
Shalom Kadosh, qui se veut lui-même ambassadeur de la cuisine israélienne dans le monde, travaille depuis 40 ans à “la Vache sur le toit”. Ce restaurant, qui tient son nom d’une reproduction d’une œuvre du peintre juif Marc Chagall exposée à l’entrée, est l’une des adresses les plus réputées de la ville trois fois sainte.
Depuis cinq ans, “la Vache sur le toit” et sa petite salle claire d’une quarantaine de couverts au rez-de-chaussée d’un hôtel de luxe n’ouvrent plus que sur commande ou pour des événements spéciaux.
“Expérience enrichissante”
Deux soirs de suite cette semaine, les deux chefs ont concocté ensemble pour des amateurs – qui avaient réservé leur place par avance – un menu franco-israélien respectant scrupuleusement les règles de la “casherout”.
Laurent Delarbre a découvert les contraintes du code alimentaire juif, qui interdit le mélange viandes-produits laitiers, le porc, les fruits de mer et certains poissons.
Dans les cuisines, il a opéré au côté de Shalom Kadosh sous le contrôle d’un envoyé du rabbinat. C’est ce dernier qui a allumé les fourneaux, seul un juif étant autorisé à le faire.
“Découvrir le casher a été une expérience enrichissante”, témoigne Laurent Delarbre, qui a fait ses courses comme tout chef qui se respecte dans un marché populaire de Jérusalem.
Au menu: tartare de daurade accompagné d’un guacamole d’avocat, consommé de légumes, filet de bar sur des poireaux, côte d’agneau fumée ou poitrine de poulet et plusieurs desserts. Il en coûtait 480 shekels (120 euros), vins compris.
A près de 70 ans, Shalom Kadosh se dit “fier d’avoir mis la cuisine de mon pays sur la carte de la gastronomie mondiale”. Et il confie avoir découvert une cuisson nouvelle de l’avocat grâce à Laurent Delarbre, Meilleur Ouvrier de France 2004.
“La casherout ne m’a pas bloqué”, lui répond Laurent Delarbre. Les deux cuisiniers se sont rendus ensemble en salle pour échanger avec les clients, qui ont immortalisé le moment en selfies.
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