Si François Hollande a échoué au point de renoncer à un second mandat, c’est parce que, incapable de tenir ses promesses électorales, il n’a pas engagé le pays dans une politique économique pragmatique et décisive. Quand il a changé de Premier ministre, il s’est heurté à ce qu’il est convenu d’appeler les « frondeurs », un groupe d’élus socialistes qui préconisaient une relance de la consommation. On retrouve leurs idées dans quelques uns des programmes des candidats socialistes à l’élection présidentielle.

LA PROPOSITION la plus percutante, c’est, bien sûr, le revenu universel dont Benoît Hamon, l’homme qui monte dans les sondages, a fait le fer de lance de sa campagne. Une idée à 300 milliards d’euros (mais, à l’usage, la facture serait plus élevée) dont le principal défaut est qu’elle n’est accompagnée d’aucun calcul du financement. Mais, avant même de parler d’une somme introuvable, il est utile de se demander si le revenu universel a le moindre sens économique, social et moral. Assurer à tous les citoyens (y compris les plus fortunés) que l’État leur versera, en toute circonstance, un revenu de base, c’est les inviter collectivement à ne pas travailler. C’est aussi reculer devant la difficulté de lutter contre le chômage. C’est enfin s’aventurer dans l’exploration de solutions inverses de celles que propose la politique de l’offre, seule à pouvoir encourager l’investissement et à créer des emplois marchands. C’est-à-dire que la notion même du revenu universel conduit tout naturellement à augmenter le taux de chômage.
Les dangers de la générosité publique.
C’est tellement vrai que M. Hamon ne nous dit pas où il va trouver l’argent pour financer son système. Mais c’est un secret de Polichinelle. Il financera le revenu universel par une hausse très importante de la fiscalité, celle-là même dont on dit qu’elle est déjà insupportable et qu’elle est la cause du marasme économique dans lequel nous sommes plongés depuis plus de trente ans. On voudrait accroître la fuite des capitaux, inciter les créateurs à fuir à l’étranger, réduire une épargne menacée par le fisc, écoeurer les classes moyenne et supérieure que l’on ne s’y prendrait pas autrement.
M. Hamon, soucieux de revenir aux racines du socialisme sans même se demander s’il n’a pas évolué dans d’autres pays pour le bonheur des leurs citoyens, est décidé à présenter un programme certes capable de séduire les défenseurs de la semaine de travail la plus courte, du départ à la retraite le plus anticipé et du farniente généralisé. Le pire, dans cette affaire, ce n’est pas que des socialistes bon teint annoncent une fois encore qu’avec eux, on rase gratis, c’est que les plus pauvres d’entre nous (ils sont 8 millions, affirme l’INSEE, soit 14 % de la population) ne réclament pas du tout la manne de l’État. Au contraire, ils exigent avec force d’avoir accès à un emploi à plein temps, durable et pas trop mal payé. C’est ce qu’il faut leur donner, plutôt que de leur promettre une part du gâteau qui ne cessera de diminuer quand on aura mis tous les Français au même niveau, le plus bas possible.
Ils n’y croient pas eux-mêmes.
Un gouvernement ne peut pas être plus généreux que les électeurs qui l’ont mis au pouvoir. Il ne peut pas consacrer aux dépenses sociales plus de la moitié du produit intérieur brut (PIB), comme il le fait déjà. Les 300 milliards de M. Hamon porteraient ce taux à près de 70 % du PIB, ce qui signifie que nous nous acheminerions rapidement vers une société de type soviétique.
Même Vincent Peillon, hostile au revenu universel, envisage d’augmenter de 16,5 milliards d’euros la dépense publique. Comment fera-t-il ? Beaucoup de socialistes -mais surtout l’extrême gauche- envisagent allègrement une fiscalité féroce qui fera rendre gorge aux travailleurs, aux épargnants, à tous ceux qui, justement, ont tout fait dans leur vie pour ne pas dépendre de l’État, pour ne pas attendre l’aumône publique. Les partisans d’une dépense publique incontrôlée n’y croient pas eux-mêmes. Ils rêvent tout éveillés, comme si la France était seule au monde et pouvait se lancer dans n’importe quelle folie, dans n’importe quelle utopie. Et il faudrait voter pour un rêve ?
Richard Liscia