Sarah Cattan : La faute du candidat Peillon

Etre de gauche et devoir parler de cette campagne. Des propos de Vincent Peillon dans L’Entretien politique, sur France 2. Qu’il ait ensuite rétropédalé, moi je ne veux même plus le savoir. C’est facile de rétropédaler, et pour quelqu’un qui brigue la Présidence, ça la fiche mal.

Que pouvait-il faire d’autre ? S’il était de mes amis – Dieu m’en garde -, je lui conseillerais de faire profil bas, de laisser l’orage passer et la foudre tomber sur le prochain âne. Prenez Ségolène et regardez comme elle l’a laissée passer, son énorme ânerie cubaine, et comme à présent, elle va, à pas feutrés, vers un soutien à Manu.

Mais revenons à notre sujet. Il les a tous sur le dos, Vincent à présent, et d’ailleurs foin de familiarité : nous l’appellerons par son nom. Certains comme Artcy ont souligné qu’il s’était attaqué à une marque déposée. C’est que même le CRIF, peu coutumier du fait, s’en mêla, des propos de Vincent Peillon.

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Certains la ramenèrent, prétendant que oui, la situation faite aux musulmans dans ce pays pouvait effectivement être comparée à celle faite aux juifs dans les années 30 : la fabrication artificielle d’un ennemi intérieur, la libération des pulsions xénophobes et identitaires, la laïcité déformée, mutilée et instrumentalisée contre une catégorie de français à raison de leur religion. La diabolisation de toute une religion, et le fantasme d’une islamisation comparable à la juiverie internationale des années 30, nous expliqua Zak Brannigan, agnostique et anticlérical. Hum. Certains l’invitèrent à venir dans leur banlieue dire bonjour aux salafistes qui font régner la « paix sociale » dans le quartier, histoire de voir combien de temps il tiendrait. D’autres lui reprochèrent de faire honte à tous les musulmans de France qui vivent tranquillement qui bossent et qui sont enquiquinés à cause de propos aussi bêtes que ceux-là, d’autres encore lui rappelèrent que tous les islamistes étaient des musulmans même si l’inverse n’était à l’évidence pas vrai, mais que près de 30% des musulmans de France plaçaient la charia au-dessus des lois républicaines.

Fin du game, comme disent les jeunes. Je ne veux pas relancer le débat sur Peillon. Je veux souligner l’indignité de ce qui fut dit et, une fois encore, l’antisémitisme révélé par l’affaire. La comparaison de Peillon entre les juifs sous Vichy et les musulmans est absurde, scandaleuse et obscène, résuma Alain Finkielkraut, et nous ajoutons que cette affaire eut l’avantage de montrer que ce discours, labellisé depuis 2013 et 2014 par des intellectuels comme Enzo Traverso, Philippe Corcuff et autres anars, qui vise à assimiler les Français musulmans aux juifs d’avant-guerre, n’était définitivement pas recevable.

IL ÉTAIT INTERDIT D’EMPLOYER LE MOT  » MORT »

Un ami nous rappela à tous, à cette triste occasion, ce qu’il appelle les sources : Lanzmann toujours.

Les Juifs asphyxiés à l’oxyde de carbone des moteurs des camions à gaz étaient appelés « le chargement » ; si on parlait de leur nombre, on disait « le nombre des pièces [en allemand « Stuck »] à charger. Dans « Shoah » on voit Motke Zaïd et Itzhak Dugin raconter, en larmes : « Les allemands avaient même ajouté qu’il était interdit d’employer le mot « mort » ou le mot « victime » parce que c’était exactement comme un billot de bois, que c’était de la merde, que ça n’avait absolument aucune importance, c’était rien. Les allemands nous imposaient de dire, concernant les corps, qu’il s’agissait de « Figuren », c’est-à-dire de marionnettes, de poupées, ou de « Schmattes », c’est-à-dire de chiffons[1] ».

 Et dire qu’il aura fallu, en 2017, un socialiste pour devoir faire ce rappel. Il aurait dû nous le dire, Peillon, le texte de loi qui organisa la révision des naturalisations accordées à des personnes de confession musulmane, interdit aux musulmans l’exercice de la médecine, les chasse de la fonction publique, de l’enseignement, de l’armée, de la presse, instaura des numérus clausus de musulmans pour les professions libérales et cadres privés, étendit l’interdiction d’exercer aux banquiers, agents immobiliers et globalement tout poste de direction et de supervision, organisa la saisie et la spoliation des biens de musulmans absents, déchut députés et sénateurs musulmans de leurs mandats.

Que Vincent Peillon ait jugé bon de dire de tels mots lors d’une émission politique importante pour lui, alors qu’il est candidat à la Présidence de la République, qu’il n’ait pas mesuré l’imbécillité de tels propos énoncés dans le cadre d’une primaire très rapide où chaque moment médiatique compte double, eh bien cela témoigne d’une grave erreur d’appréciation, d’une forme de dilettantisme ou d’amateurisme impardonnable à ce niveau, ou d’un cynisme politique électoraliste très dangereux, pensant séduire ainsi un hypothétique vote musulman. On se dit encore qu’un diplôme d’agrégé de philosophie, ça n’empêche même pas de mettre en relation Shoah et laïcité.

Et puis on comprend le truc et on se dit qu’il a raison, Régis de Castelnau: pourquoi se priver de débiter des inepties quand il s’agit de grappiller quelques voix et de faire plaisir aux petits marquis du gauchisme culturel, tels Mazarine Pingeot ou Jean-Michel Ribes. Dans cette tribune qu’il intitula Peillon, la mémoire injuriée, il nous rappelait à point nommé que Martine Aubry, dans le seul souci de savonner la planche de son camarade Manuel Valls, avait cherché un candidat à la primaire socialiste à envoyer dans les jambes du Premier Ministre : Mission peu glorieuse, mais que vous avez jovialement acceptée. Ce qui atteste déjà votre absence de principes dans l’action politique.

J’AI VU DES HOMMES S’ALTÉRER , SE CORROMPRE

Et comme elles collaient au propos, ces deux citations rappelées : l’une faisant le portrait de Laval[2] : Porté de nature, accoutumé par le régime, à aborder les affaires par le bas, Laval tenait que, quoi qu’il arrive, il importe d’être au pouvoir, qu’un certain degré d’astuce maîtrise toujours la conjoncture, qu’il n’est point d’événement qui ne se puisse tourner, d’hommes qui ne soient maniables, l’autre étant de Léon Blum nous parlant de ses camarades dans ces journées d’abandon de juillet 40 : J’ai vu là, pendant deux jours, des hommes s’altérer, se corrompre comme à vue d’œil, comme si on les avait plongés dans un bain toxique. Tel camarade qui, à mon entrée dans la salle, s’était précipité vers moi la main tendue, m’évitait visiblement au bout d’une heure. Il ne surnageait plus que quelques débris intacts à la surface de la cuve dissolvante.

Le Scan politique du Figaro et le Lab d’Europe 1 soulignèrent que ce n’était pas la première fois que le parallèle était utilisé par un responsable politique : en décembre 2015 déjà, Cambadélis avait estimé que le FN traitait les musulmans comme Vichy avait traité les juifs.

Monsieur Vincent Peillon, la démarche islamiste, en rupture complète avec le processus d’assimilation qu’on peut aussi nommer droit à l’indifférence, est la première à réclamer des droits dérogatoires, comme la non mixité dans les équipements sportifs, une nourriture différente dans les cantines, des tenues spécifiques sur les plages, des temps de prière en entreprise, et surtout, comme un étendard, la généralisation des voiles et autres accessoires de la disparition des femmes de l’espace public, l’islamisme se choisissant en somme, comme le résume Thierry Seyverat, son étoile jaune, en particulier à travers le voile.

UNE CONTRACTION DE PHRASES

Ah certes, vous avez cru suffisant de préciser votre pensée et votre conviction qu’une contraction de phrases aurait pu déformer. Vous aviez voulu dénoncer la stratégie de l’extrême droite, concluait votre communiqué écrit, à quoi Florian Philippot vous conseilla de réviser un peu votre histoire. La honte.

Tout cela, je le sais charnellement et intellectuellement mieux que quiconque, par mon histoire personnelle[3], par mes travaux, par mes combats politiques énergiques pour la laïcité, et contre le racisme et l’antisémitisme, ajoutiez-vous, et nous, on se souvint de l’article de Jacques Bénillouche, Les Juifs de François Hollande[4], où était évoqué votre coming out : votre grand-mère maternelle était juive, votre épouse s’appelle Nathalie Bensahel, et vous aviez mis les tefillins et étiez monté à la Torah pour la Bar-Mitsva de votre fils Elie, en 2009.

Vous avez pourtant parlé comme Marwann Muhammad, Edwy Plenel et Houria Bouteldja réunis et osant la révision de l’histoire, oubliant que ce n’était pas la laïcité qui avait imposé l’étoile jaune aux Juifs, mais un antisémitisme d’Etat sous ordre de l’occupant allemand et de son régime nazi génocidaire, que Vichy était tout sauf un Etat laïc, qu’elle datait de mai 1942, l’institution de l’étoile jaune pour les Juifs en zone nord, ce marquage qui permit l’arrestation, la déportation puis l’assassinat en masse des Juifs[5].

Avec des prétendants comme vous, il la creuse, sa tombe, le PS. Et ce sont justement ces élus à votre image, prêts à tout, dont nous, nous ne voulons plus.

Sarah Cattan

[1] La Tombe du Divin Plongeur, Claude Lanzmann, Gallimard, 2012.

[2] Mémoires de Guerre, Charles De Gaulle, Tome 2, Editions Plon, Paris, 1956. Réédition Le Livre de Poche (Historique), 1963.

[3] Vincent Peillon est issu d’une famille juive alsacienne par sa mère. Son épouse, Nathalie Bensahel, est de Casablanca

[4] Mai 2012.

[5] François Heilbronn, Professeur, Sciences-Po Paris.

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5 Comments

  1. Sarah avec ses « tripes  » et son intellect brillant vient de dire tout ce qui devait l’être, nous sommes humbles devant ce « coup de gueule » pertinent. Merci Sarah pour cette analyse et vos propos qui déclinent en chacun de nous une immense responsabilité quelque soit notre statut et fonction. Merci Sarah…

  2. Ce type est définitivement disqualifié. Quand on aspire à ces fonctions il n’y a pas de place pour autant de bassesse, de lâcheté et d’ignorance. Qu’a-il fait de ses études ?

  3. Le plus désolant est qu’aujourd’hui n’importe quel insignifiant ayant fait un peu de militantisme politique et d’études supérieures se croit capable et légitime d’être le successeur des rois de France en république.

    Au fond je pense qu’il n’y a même pas de calcul électoral mais juste une stupidité dite par un imbécile. Et ils sont beaucoup plus nombreux qu’on ne le pense chez les politiques et les diplômés…

  4. Cambadélis… encore un « trotskyste » au pouvoir. On ne les comptent plus et ils portent une lourde responsabilité quant au marasme dans lequel se trouve la France aujourd’hui. Il faudra bien un jour que tous ces gens rendent des comptent au peuple de France.

  5. Ce qui est étonnant, c’est qu’il y a encore des Juifs qui votent pour ce genre d’ individu. Ces socialos-communistes appellent au boycott des produits israéliens, ils tentent de forcer le blocus de Gaza, ils votent (s’ abstiennent) c’ est tout comme, « les Juifs n’ ont aucun lien avec le Mur des lamentations ». Ce qu’ il faut savoir c’ est que la majorité des arabos-musulmans (je dis arabos-musulmans, car il y à parmi eux ou plutôt loin d’ eux, une autre catégorie de personnes qui ne leur ressemblent en rien, ce sont les KABYLES)ne voteront plus pour « kom loth » (le peuple de Loth)alors que Loth n’ a rien à voir avec cette histoire, il a même proposé ses filles pour qu’ on ne touche pas aux hommes qui lui ont rendu visite (était des Anges mais il ne le savait pas) c’ est ainsi qu’ on appelle les habitants de Sodome et Gomorrhe, des homosexuels, avec la loi sur le mariage pour tous, les musulmans ne mêleront pas leurs voix à des voix d’ homosexuels.

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