L’Institut Montaigne (un think tank créé en 2000) publie une enquête pionnière au fort potentiel polémique sur les musulmans de France intitulée : « Un islam français est possible », et dont rend compte le Journal du Dimanche, le 18 septembre. Ce document, rédigé par Hakim El Karoui, conseiller en stratégie et ancien collaborateur de Jean-Pierre Raffarin à Matignon, s’appuie sur un gros sondage effectué par l’IFOP auprès de 1 029 personnes de confession (874) ou de culture (155, ayant un parent au moins musulman mais ne se disant pas musulman) musulmane, elles-mêmes extraites d’un échantillon de 15 459 personnes âgées de 15 ans et plus représentatif de la population française.
Ces données fournissent des renseignements précieux sur les musulmans de France, dans un pays où le maniement des statistiques ethniques ou religieuses est très encadré par la loi. Elles frappent par l’ampleur de l’adhésion (28 %) à un islam d’affirmation, critique de la laïcité, d’abord soucieux de la loi religieuse, qualifié de « fondamentaliste » et de « sécessionniste » dans le rapport. Et si la majorité des musulmans ne s’y reconnaissent pas, pas moins de la moitié des 15-25 ans, eux, se rangent dans cette catégorie. Il s’agit donc d’une tendance lourde, qui touche les jeunes de manière puissante, dans un paysage religieux par ailleurs très différencié.
Cette importante enquête (réalisée par téléphone du 13 avril au 23 mai) permet d’évaluer la part des personnes se disant musulmanes à 5,6 % de la population globale (soit environ 3,7 millions) et à 1 % (quelque 660.000) celles ne se déclarant pas musulmanes tout en ayant au moins un parent musulman, et qui traduisent un processus de « sortie de la religion ». Cette population est plus jeune que la moyenne, au point que la part des musulmans monte à 10 % chez les 15-25 ans. Elle est française de naissance à 50 %, par acquisition de la nationalité à 24 %.
Les musulmans de confession ont en commun une pratique religieuse plus soutenue que le reste de la population. Même si 30 % ne se rendent jamais à la mosquée, 31 % y vont au moins une fois par semaine. La pratique de la prière est encore plus fréquente : la moitié de ceux qui ne vont dans un lieu de culte que pendant le ramadan observent les cinq prières quotidiennes, ainsi que 45 % de ceux s’y rendant moins souvent.
MARQUEURS DE L’IDENTITÉ
Deux éléments apparaissent comme de véritables marqueurs de l’identité musulmane, pratiquante ou non, tant ils sont partagés. Il s’agit d’abord de la viande halal, consommée exclusivement par 70 % d’entre eux et occasionnellement par 22 %. L’attachement à cette pratique conduit huit musulmans sur dix à estimer que les enfants devraient pouvoir manger halal à l’école.
L’autre marqueur est le voile. Quelque 65 % des musulmans de confession ou de tradition se disent favorables au voile et 24 % sont favorables au port du voile intégral, les femmes étant un peu plus favorables que les hommes dans l’un et l’autre cas. Cette approbation n’entraîne pas nécessairement une pratique : les deux tiers des femmes disent ne pas porter le voile, tandis que 35 % le portent, soit « toujours » (23 %), soit sauf sur le lieu de travail ou d’étude (7 %), soit « rarement » (5 %).
À travers le traitement statistique des réponses, les enquêteurs ont identifié six catégories partageant un même système de valeurs construisant leur rapport au religieux. Ces groupes s’étagent des personnes les plus éloignées de la religion, favorables à la laïcité, ne formulant aucune revendication d’expression religieuse dans la vie quotidienne, à ceux ayant une vision plus engagée, présentant « des traits autoritaires », souvent favorables au port du niqab, à la polygamie, critiquant la laïcité.
TROIS GROUPES IDENTIFIÉS
In fine, soutiennent les auteurs, ces catégories pourraient être résumées en trois groupes. Le premier, représentant 46 % des musulmans de foi ou de culture, regroupe les personnes n’ayant pas ou peu de revendications d’expression religieuse dans le quotidien et plaçant la loi de la République avant la loi religieuse tout en conservant une pratique très supérieure à la moyenne nationale. Le rapport les qualifie de « soit totalement sécularisées, soit en train d’achever leur intégration dans le système de valeurs de la France contemporaine ». Ils sont qualifiés de « majorité silencieuse ».
Le second groupe, représentant un quart de l’effectif, se trouve dans une situation intermédiaire, avec une forte pratique, souvent favorable à l’expression de la religion au travail, mais ayant intégré la laïcité.
Le troisième groupe, ces 28 % cités auparavant, ne considère pas que la foi appartienne à la sphère privée, est majoritairement favorables à l’expression de la religion au travail et contestent la laïcité. Le rapport de l’institut Montaigne est à leur endroit sévère. Il qualifie leur système de valeur de « clairement opposé aux valeurs de la République », de « sécessionnistes ». « L’islam est un moyen pour eux de s’affirmer en marge de la société », affirme la note.
À travers cette classification, on voit donc se dessiner une double polarité au sein de la population musulmane, dont l’étude souligne qu’elle est étrangère à tout communautarisme. L’une, la plus nombreuse, « s’inscrit dans un système de valeurs et dans une pratique religieuse qui s’insèrent sans heurts dans le corpus républicain », deux tiers de l’échantillon jugeant que la laïcité permet de vivre librement sa religion. L’autre, très présente chez les jeunes générations, fait de la religion un élément structurant de son identité, valorisant les pratiques qu’il lui associe, parfois en opposition avec la loi (niqab, polygamie).
Hakim El Karoui appelle à combattre cette progression d’une lecture jugée « fondamentaliste » de l’islam en France, notamment parmi les jeunes générations. Il propose des réformes concernant à la fois l’Etat et les musulmans eux-mêmes. Il demande ainsi l’enseignement de l’arabe à l’école (plutôt que dans les mosquées), la réforme des institutions du culte musulman afin de mettre fin à la tutelle des Etats étrangers dont sont originaires les générations d’immigrants, de faire émerger de « nouveaux cadres » nés en France, de favoriser la formulation et la diffusion d’un discours théologique ouvert, de permettre la création d’une faculté de théologie en Alsace-Moselle.
Le sondage a été conduit auprès de 1 029 personnes de confession ou de culture musulmane (dont 874 se déclarant musulmanes), extraites d’un échantillon de 15 459 métropolitains âgés de 15 ans et plus.
D’après le Journal du Dimanche
“Hakim El Karoui appelle à combattre cette progression d’une lecture jugée « fondamentaliste »…Il demande ainsi l’enseignement de l’arabe à l’école”
_____________________
Ben voyons ! Des berbères c’est comme des arabes, c’est bien connu !
Ce El Karoui sait-il qu’avant l’islam et l’arabisation des berbères (maghrébin est une appellation arabe…) qui forment encore 90% des habitants d’Afrique du Nord (les arabes ont été des conquérants et non des colonisateurs) ces derniers étaient eux aussi en partie chrétiens (et juifs), donnant même trois papes à Rome, des hommes d’église de l’envergure d’un Saint Augustin, et qu’ils avaient eux aussi baignés (pour les côtiers et citadins essentiellement) dans la culture gréco-latine pendant des siècles ?
De même cette imbécile de Najat Vallaud Belkacem qui ne sait plus, qui n’a jamais su la pauvre ignorante, que les français d’origine berbère ont autant de légitimité que les autres à apprendre le grec et le latin. Et sûrement pas l’arabe, sinon à vouloir encore et toujours les islamiser et les arabiser. Mais peut-être est-ce le but de ces deux crétins… On voit le résultat !
André Comte-Sponville donne son avis (dans Le monde des religions du 26 déc 2017) sur chacune des trois « religions du Livre » qu’il voit « privilégier l’une des trois vertus théologales de la tradition chrétienne : le judaïsme accorderait la primauté à l’espérance, le christianisme à l’amour, l’islam à la foi… dans nos sociétés sécularisées, laïcisées, si peu soucieuses, collectivement, de quelque transcendance que ce soit. L’amour ? Très bien ! L’espérance ? On en redemande ! Mais la foi ?… La foi, pour plusieurs d’entre eux, est plus importante que tout le reste, espérance et amour compris ! »
L’islam est né bien après l’apparition des deux autres branches du monothéisme, le judaïsme et le christianisme. Et le texte des deux premières est adressée à des hommes qui la vivent et l’interprètent dans leur quotidien, la troisième est donnée telle quel, et ne peut être interprétée. La nouvelle religion à ses débuts, est une civilisation conquérante, imposant ses croyances, assujettissant les populations au tribut et faisant régner un ordre islamique partout où elle prenait pied. Pour le musulman, il n’y a qu’une seule vraie religion, l’Islam : « La religion d’Allah c’est l’Islam ».
La religion, la foi, a été nécessaire pour donner une vision stable et universel de l’univers. De ce monde stable, au sein duquel il était possible d’imposer une vision de l’univers aux sociétés primitives nous voici dans une société mondialisée où il est impossible de faire croire. Il est difficile de faire référence à un absolu, quel qu’il soit, l’organisation du monde n’est pas, dans nos sociétés modernes, fixée définitivement. Ces personnes qui nous arrivent en masse du monde musulman, peuvent-ils accepter que la religion soit mise au second plan, et même qu’elle reste dans la sphère privée? Et que les lois de nos démocraties soient supérieures et s’imposent à celles de la religion qui ne sont plus la clé de voûte et ne structurent plus le vivre ensemble. Dans nos démocratie,
c’est le Politique qui a la primauté, l’autorité et le pouvoir, et le Politique ne prétend pas définir une fois pour toutes le juste et le bien. Son autorité est indéfiniment révisable et faillible. Est-ce acceptable pour ces nouveaux arrivants?
Nos démocraties pensaient les religions comme un vestige de la préhistoire depuis l’époque des Lumières. La foi était perçue comme étant une « superstition » ou un obscurantisme archaïque. On voyait la religion comme appelée à s’éteindre en raison des progrès de la connaissance des sciences… Depuis des siècles, notre pensée est habituée à évoluer au gré du monde des penseurs et des découvertes scientifiques, donc en révisant constamment nos convictions. Il n’y a plus d’absolu et la croyance n’est pas plus sacrée que l’incroyance. Allons-nous créer une partition dans nos sociétés?
Tahar Ben Jelloun, écrivain, poète, né à Fès (Maroc) et lauréat du prix Goncourt pour son roman La Nuit Sacrée, dit dans Doit-on « intérioriser la sensibilité » des musulmans? d’André Versaille – 19 septembre 2017(1)
que « de manière générale, la première expression de la sensibilité musulmane, telle que nous pouvons la percevoir aujourd’hui, ce sont des sociétés où les commandements religieux l’emportent majoritairement sur les droits humains, et où l’esprit critique est souvent subordonné à la soumission religieuse. Or, l’individu dans les sociétés occidentales modernes et sécularisées se vit libre de toute détermination religieuse, jouit de droits humains civils et naturels, et du droit de critiques, quand bien même celles-ci seraient ressenties comme offensantes ou blasphématoires par certains. ». À la question de savoir ce qui fait le plus peur aux islamistes, Tahar Ben Jelloun répond (toujours la même citation): « La liberté d’expression, le doute, la liberté de conscience, le fait de croire ou ne pas croire… C’est peut-être d’ailleurs à cause de ce rejet… que certains ne s’intègrent pas… Le débat, le simple débat sur la laïcité y est impossible… L’islam est sacré. On n’y touche pas… La modernité se mesure d’abord par la place qui est faite à la femme dans le système social. La modernité, c’est aussi la reconnaissance de l’individu. Or, dans les sociétés arabo-musulmanes, c’est le clan, la famille, la tribu qui priment, ce n’est pas la personne. D’où l’absence de progrès social, d’où l’attachement à l’islam en tant que référence commune à toutes les couches sociales, devenant aussi une morale, une culture et un refuge identitaire.» (les italiques sont dans le texte).
J’aime les propos du journaliste Daniel Horowitz (2): « La laïcité… pose que dans une démocratie les lois ne sauraient découler d’autre chose que de décisions humaines… dès lors qu’il est établi que le sentiment religieux relève de l’imagination, il est impératif que chacun en conçoive les limites et la subjectivité ».
Et Daniel Horowitz souligne: «Le judaïsme est scrupuleusement laïc : comme religion il accepte, partout, les règles du pouvoir ».
Toujours Daniel Horowitz (3): « Dans le judaïsme… il y a des présomptions, des intuitions, des raisonnements, voire des visions, mais une chose est sûre et certaine: tout relève de la parole de l’homme, et est donc faillible, perfectible et amendable… Le terme “religion” n’existe pour ainsi dire pas en hébreu (“Dieu” non plus, d’ailleurs, qui n’est qu’une francisation de Zeus), et on ne lui a trouvé d’équivalent approximatif que récemment. Le monothéisme tel que le propose le judaïsme ne postule pas à proprement parler l’existence de Dieu. Il dit surtout ce que Dieu n’est pas. Le tétragramme YHWH peut, parmi les multiples interprétations, être compris comme verbe, mais pas comme substantif. Ce vocable n’est donc pas l’invocation d’une substance, mais plutôt de quelque chose d’indescriptible, d’imprononçable et d’indicible, une manière d’exprimer l’unicité du monde et la stupéfaction qu’il y ait quelque chose plutôt que rien… ».
Le Christianisme, est la « religion de la morale ». La Religion « humanisée » du Dieu qui se fait homme et qui se sacrifie pour sauver l’humanité.
Nos sociétés occidentales ont été construites sur la l’idée du refus de la violence, au profit de l’amour, selon le message de Celui qui est crucifié pour tous.
Alors, après chaque exaction, on entend crier: « vous n’aurez pas ma haine! »…
Les racines du Christianisme sont juives. Mesure-t-on, dans le milieu chrétien, les propos du juif Jésus lorsqu’il dit: « Le sabbat a été fait pour l’homme, et non l’homme pour le sabbat »! C’est-à-dire que la religion a été faite pour l’homme (et non pour satisfaire la divinité)?
L’attitude du judaïsme peut nous révéler si les textes de la religion poussent à la citoyenneté. La dignité spirituelle de l’homme est une contribution du judaïsme à la société moderne. Seuls les juifs, et les chrétiens, qui sont à l’origine de nos sociétés occidentales ont accepté la laïcité.
Les musulmans intégrés au pays d’accueil sont une richesse pour tous. Ils professent un islam qui se distingue de celui, criminel, des salafistes, les wahhabites et les frères musulmans… Ma question est, est-ce que ces immigrants, qui ne sont pas des coquilles vides, ne souhaitent-ils pas que la religion redevienne le centre de gravité de l’individu et règle une part de plus en plus grande de leur comportement? Les prédicateurs musulmans vivant en Europe peuvent-ils se remettre en cause et envisager la possibilité qu’il pourrait y avoir « un problème à la source »? Peuvent-ils remettre en cause les passages belliqueux du Coran et développer une pensée critique vis-à-vis des dogmes et des textes? L’Islam, d’aujourd’hui, en Occident, peut-il se distancier d’un enseignement, d’une autre époque, pré-moderne, et faire sien les règles et valeurs du pays d’accueil pour construire un vivre ensemble compréhensible, un monde convivial ?
L’Islam n’a jamais fait son aggiornamento (c’est-à-dire, sa mise à jour, son adaptation à l’évolution du monde, à la réalité contemporaine).
L’Islam semble être en froid avec la coexistence des valeurs occidentales et réticent à faire sien les règles et valeurs des pays d’accueil pour construire un vivre ensemble compréhensibles, un monde convivial et paisible à l’image de l’engagement des juifs et des chrétiens.
Je relève que le conflit avec l’universalisme issu de la civilisation occidentale, sont partagées par l’ensemble des pays de la ligue islamique. Et cela est validé par un traité officiel qui est la Déclaration des droits de l’homme en islam, adoptée au Caire le 5 août 1990 par l’Organisation de la conférence islamique, est une adaptation particulière de la Déclaration universelle des droits de l’homme aux pays musulmans. Cinquante-sept États l’ont ratifiée.
Cette adaptation se traduit notamment par une forte imprégnation religieuse, l’affirmation de la primauté divine, la limitation de la liberté de choisir sa religion et d’en changer.
Ce texte est précédé de la « Déclaration islamique universelle des droits de l’homme de 1981 » proposée par le Conseil islamique d’Europe et promulguée le 19 septembre 1981, lors d’une réunion organisée à Paris par l’Unesco (10).
Il s’agit non de l’individu, mais de religion et nous devons pouvoir critiquer un système de pensée ou une religion. La religion n’est pas une personne, encore moins une race. Nous devons pouvoir l’examiner, l’étudier, la critiquer, la dénoncer.
A quand de véritables échanges et des ébauches de réponses?
1- https://www.cairn.info/article_p.php?ID_ARTICLE=RFSP_445_894
2- https://www.tribunejuive.info/societe/vivre-ensemble-sans-conflits-est-un-projet-irrealiste-et-dangereux-par-charles-rojzman
3- Paul Ricoeur Histoire et Vérité 1955
4- https://www.causeur.fr/musulmans-tariq-hani-ramadan-islam-146738?utm_source=Envoi+Newsletter&utm_campaign=630ec8b5b8-Newsletter&utm_medium=email&utm_term=0_6ea50029f3-630ec8b5b8-57524257
8- http://danielhorowitz.com/blog/2012/01/17/israel-et-la-laicite/
9- http://arielgurevitz.blog.lemonde.fr/2010/04/05/une-approche-du-judaisme/
10- https://www.humanrights.ch/fr/dossiers-droits-humains/islam/point-vue/declarations-islamiques/
https://fr.wikisource.org/wiki/D%C3%A9claration_islamique_universelle_des_droits_de_l%E2%80%99homme_de_1981
https://d1.islamhouse.com/data/fr/ih_articles/fr-Islamhouse-DHL16-DeclarationDroitdeLHomme-Cheha.pdf
https://oumma.com/les-declarations-islamiques-des-droits-de-lhomme/