« L’insouciance » de KarineTuil : Écrire le réel qui cogne par Christine Bini

Comment entrer, de plein fouet, dans le contemporain ? Comment tordre, littérairement, un réel qui cogne, et cogne fort ? Comment faire d’une actualité immédiate – à laquelle se substitue immédiatement une autre actualité – une matière romanesque d’évidence, et réussir à embarquer le lecteur dans ce qu’il connaît et redoute ? L’actualité n’est pas le contemporain, on le sait – ou, tout au moins, on le perçoit. Entre ces deux notions, le réel s’immisce. Karine Tuil, avec L’Insouciance, nous offre en cette rentrée un roman exceptionnel, qui brasse ce qui nous fait peur, qui montre ce que l’on ne veut pas voir, qui appuie sur des plaies béantes que l’on peine à suturer.

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Romain Roller revient d’Afghanistan. Ce jeune lieutenant a perdu sur le terrain plusieurs de ses hommes, un de ces amis d’enfance rentre gravement blessé. Le voyage de retour suppose une escale, un sas de décompression. Ce sera un hôtel multi-étoilé de Chypre. Y naîtra une passion partagée, à la fois charnelle et amoureuse, avec la journaliste Marion Decker. Marion, élevée par une mère gauchiste et irréfléchie, puis ballotée à partir de l’adolescence dans différentes familles d’accueil, est mariée à François Vély, un magnat franco-américain de la téléphonie. Se mettent en place, dès les premières pages du roman, des assises sociales et économiques qui résonnent. Romain Roller est originaire de Clichy-sous-Bois, il y a côtoyé Osman Diboula, un éducateur devenu conseiller du président de la République. Voilà que le politique entre en scène, bouclant le cercle. Mais le social, l’économique et le politique ne suffisent pas à rendre compte de l’état d’une société, malgré ce qu’on nous rabâche. Y manquent l’intime – primordial –, l’artistique et le « communicationnel ». Karine Tuil ne s’y trompe pas, et élargit le cercle de perception. Elle va piocher dans l’actualité des dernières années – comment qualifier ce qui n’est pas encore de l’Histoire, et qui dépasse le simple fait divers, ou de « société » ? – l’affaire de la chaise inspirée d’Allen Jones. On s’en souvient : le jour du Martin Luther King Day de 2014, une mannequin russe, blanche et milliardaire, posait assise sur une chaise représentant une femme noire, ligotée en position érotique, et déclenchait un tollé médiatique. A partir de ce « fait médiatique », Karine Tuil fait coulisser ses engrenages fictionnels et sociétaux.

Pour lire la suite, cliquer sur le lien :  http://laregledujeu.org/2016/08/12/29703/l-insouciance-de-karine-tuil-ecrire-le-reel-qui-cogne/

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