Il y 2 thèses sur le sujet : Pétain et les juifs. Pour Paxton, Pétain était aux ordres des nazis et même les devançait. Pour Limore Yagil et Zemmour, la présence de Pétain a sauvé les 3/4 des juifs .
On peut se balancer autant de chiffres qu’on veut mais un seul est à retenir: seul 1/4 des juifs français a péri. En Pologne, en Belgique, en Hollande, en Grèce etc. la quasi totalité des juifs a été déportée et anéantie .
Limore Yagil ne dit pas qu’il y a eu la volonté de Pétain de sauver les juifs,elle dit même le contraire : ce sont les fonctionnaires de Pétain qui ont sauvé les juifs : maires, préfets, policiers, enseignants ont désobéi au Maréchal et ont sauvé des juifs . Et dans le peuple de France, il y a eu beaucoup de Justes.
Tribune juive
Commentaire de Olivier Comte
Un nouveau commentaire sur l’article « Réponse de l’historienne Limore Yagil, spécialiste de la Seconde Guerre mondiale, à Robert Paxton »
Le beau temps arrive enfin, mais aussi l’ignoble chanson: “Vichy a permis de sauver des juifs”. Je demande aux lecteurs de TJ de réfléchir sur la question suivante:
Le premier crime de Vichy est la trahison, l’intelligence avec l’ennemi. La complicité de génocide vient ensuite, non avant.
Le génocide fut préparé par les actions et la politique antisémite de Vichy. La propagande de Vichy, non celle des Allemands, les boches pour presque tous les Français, avait plus d’effet que la propagande nazie. Les hauts fonctionnaires de Vichy obéissaient aux ordres, c’était leur tradition et leur intérêt, mais un nouveau culte de l’Etat s’installait, séparé du culte du Maréchal.
Maurice Duverger, dans un article tristement célèbre, pouvait analyser en juriste le statut des juifs. J’ai toujours, quelque part, le livre Dalloz sur ce statut. Fine analyse qui distingue les mesures défavorables aux juifs et les mesures favorables au juifs (sic). Un juriste qui savait que les juifs avaient été exclus de la magistrature et du barreau pouvait parler ainsi de mesures d’exception, de mesures de persécution pendant la guerre.
Avant le génocide, il y avait les persécutions, les interdictions, les spoliations. La privation du droit au bail peut être une tragédie, plus que les vols d’objets d’art. Tout cela créait une atmosphère de normalité autour des persécutions et, puisque la France est un pays cartésien, l’idée générale que les persécutions devaient avoir de bonnes raisons, que les juifs l’avaient bien cherché, qu’ils corrompaient la France et empêchaient son redressement moral, ou la Révolution Nationale.
Tout cela favorisait les mesures plus violentes, préparation du génocide, qui suivirent.
Limor Yagil présente un avantage: c’est une ancienne citoyenne Israëlienne naturalisée Française, une ancienne juive, je crois me souvenir, convertie au catholicisme. On ne pourra donc accuser les juifs de placer la survie des juifs avant la France. Il reste une démarche profondément malhonnête qui défend le régime de Vichy sous les oripeaux habituels: cela aurait été pire sans un régime collaborationniste. L’angle d’attaque est habituel: le méchant Paxton a travaillé sur les archives allemandes. Maintenant, il a peu exploité les archives Françaises. Paxton a eu le mérite, je l’ai vécu, de libérer la parole contrainte par les travaux partisans de Robert Aron. On lui opposait qu’il était étranger et qu’il ne comprenait rien à ce délicat épisode de notre histoire.De la même façon, on reprochait à William Shirer (livre fondamental sur la chute de la III° République) d’être un journaliste.
Il n’y a pas Paxton d’un côté et l’histoire anecdotique et partisane de Madame Yagil d’un autre côté. Il y a simplement une histoire scientifique considérable. Histoire commencée par le Centre de Documentation Juive Contemporaine, fondé sur les efforts héroîques de juifs s’efforçant de rassembler des documents, sous la tyrannie nazie et Vichyste.
Sur l’histoire douloureuse de l’Eglise Catholique, le livre de référence reste: L’EGLISE DE FRANCE FACE A LA PERSECUTION DES JUIFS 1940-1944 CNRS Editions 2012, par une catholique engagée dans l’action spirituelle de l’ Eglise, ni gauchiste, ni intégriste, SYLVIE BERNAY. Vous pourrez lire ce passage: “Mais l’articulation entre ce fait, le rôle de l’Eglise et la pratique des sauvetages, demeure encore obscure -quand elle ne prête pas aux analyses les plus apologétiques” (page 19, note 15: Limore Yagil Chrétiens et Juifs sous Vichy (1940-1944).
Olivier Comte
Réponse à Olivier Comte de Limore Yagil
Vous avancez des informations injurieuses et inexactitudes à l’égard de l’historienne Limore Yagil, dont le livre de Sylvie Barnay, ne fait que reprendre la thèse de Chrétiens et Juifs, sous Vichy : sauvetage des Juifs, Cerf, 2005 de Limore Yagil.
Si Limore yagil a mis en évidence l’aide de 40 évêques en France qui ont secouru des Juifs avec l’aide des réseaux catholiques locaux, Sylvie Bernay, elle démontre la même chose seulement pour 7 évêques et son livre reprend les mêmes archives mentionnés en 2005 dans l’ouvrage de Limore Yagil, sans le citer.
De même ajoutons qu’Olivier Comte, publie des inexactitudes sur Limore Yagil, qui est toujours citoyenne israélienne, professeur à l’université de Haifa, et qui a la double nationalité, et surtout de quel droit décide-t-il que Limore Yagil c’est convertie ou a quitté son judaïsme ?
De telles inexactitudes en disent long sur son argumentation et sa critique concernant les propos de Limore Yagil. Beaucoup de a priori et des erreurs, par quelqu’un qui n’est pas un historien universitaire et qui surtout n’a pas lu les travaux cités dans la réponse de Limore Yagil. .
Personnellement j’entend que seulement un quart des juifs français sont morts je trouve le terme “seulement” inacceptable.
Un quart d’une population c’est beaucoup et ça représente 25.000 personnes sur une population juive de nationalité française qui est estimée à 100.000 sur 300.000 en tout en métropole en comptant les étrangers (mais sans compter l’Algérie qui n’a pas été touchée).
Oui, en 1940 il y avait deux fois plus de juifs étrangers que français, arrivés en France en provenance de l’Est dès la fin du 19è siècle fuyant la violence tsariste, puis communiste puis nazi. Les juifs étrangers représenteront près des 3/4 des 80.000 morts estimés (76.000 étant le nombre de déportés).
La question est : pouvait-il en être autrement en France ? Je ne sais pas mais ce que je sais c’est qu’en promulguant des lois anti-juives les fragilisants et de son propre chef sans attendre une quelconque demande ou pression allemande, le gouvernement de Vichy leur a donné un “signal fort” selon une expression consacrée aujourd’hui…
Pour André et TJ,
Le terme de “seulement” est inacceptable, comme il est inacceptable d’opposer ou distinguer Darquier de Pellepoix de Xavier Vallat, parce que l’un aurait tué plus de monde que l’autre. Le meurtre commence avec la première victime. L’organisation criminelle commence avec le “Commissariat aux Questions Juives”, le Statut des Juifs, puis le deuxième Statut des Juifs. Quelles questions juives? Quelle question juive? Il n’y avait pas de question juive. Les Français Juifs avaient fait la guerre, de nombreux Juifs étrangers, malgré les obstacles, avaient participé aux combats, dans l’Armée Française. Pour ces derniers, ils seraient livrés aux Allemands, une trahison particulièrement cruelle de l’honneur militaire, ou internés dans des camps de l’AFN. Comme l’ensemble des Français, ils devaient être trahis par le maréchal Pétain et ses amis qui ne pouvaient parvenir au pouvoir que par l’Armistice. Dans ces derniers jours de l’armistice, Léon Blum fut frappé par le violent antisémitisme de ceux qui allaient exploiter la défaite de la France. Le député Mendès France, autorisé par son commandement à rejoindre l’AFN pour continuer le combat, fut vite condamné, par un tribunal militaire!, pour désertion face à l’ennemi!
La question juive fut inventée par le maréchal Pétain et ses amis, elle continuait la vieille politique antisémite de droite et l’antisémitisme institutionnel catholique. L’effort considérable d’armement du Front Populaire fut nié, les responsabilités militaires masquées On dénonçait l'”esprit de jouissance des masses “, l’immoralité, les maçons, mais, principalement on dénonçait les juifs ou l’anti-France retrouvée avec délices.
Le régime de Vichy ne pouvait se passer de l’antisémitisme. Les persécutions antisémites n’étaient pas le fait des Allemands, d’un accident ou de quelques hommes. Elles ne pouvaient qu’accompagner et soutenir l’oeuvre annoncée de redressement maréchaliste de la France. Pour retrouver une France pure, il faut purifier. Les persécutions antisémites sont l’essence même du régime de Vichy.
Reste le problème politique. ce n’est pas un problème historique soumis à la seule décision des historiens et à leur sagacité mesurée par la masse d’archives dépouillées.
Il est évident que Limore Yagil ne défend pas Pétain. Sa thèse est beaucoup plus dangereuse: les nombreux sauvetages de Juifs, contre les ordres de Vichy, permis par l’action de Chrétiens, de Juifs, de fonctionnaires, hauts fonctionnaires, de Français, d’étrangers, de paysans, d’intellectuels, d’ouvriers d’employés… ces nombreux sauvetages, bien établis et documentés ne furent possibles-en partie-je l’espère- que parce que l’Holocauste n’était pas perpétré par les Allemands seuls. Ces sauvetages ne furent possibles que parce que LE REGIME DE VICHY EXISTAIT. Voilà le résultat de tout ce travail sur la désobéissance civile. Le régime de Vichy, non par sa volonté mais par son existence même a permis le sauvetage de nombreux juifs.
L’Histoire n’existe que par la réflexion politique. Cette réflexion manque totalement. Elle permet de rejoindre la propagande d’extrême-droite du camarade Zemmour. Cela est inacceptable et je ne l’accepte pas.
Je n’accepte pas les propos politiciens du Président Chirac qui déclarait que la France était à Vichy, encore moins les déclarations de M. Valls que la République et la France étaient à Vichy. Le régime de trahison de Vichy n’était pas la France. le régime de crimes de Vichy n’était pas la République. L’ analyse Gaulliste est toujours la bonne analyse. Mais tous ces crimes furent commis par des Français et, comme Français, nous portons toujours cette responsabilité marquée par une tache ineffaçable sur notre histoire.
Cette thèse de justification de l’existence du régime de Vichy est non seulement perverse mais elle est également mal fondée.
La désobéissance civile se fondait sur des sentiments, un devoir,
religieux, humain, national, Républicain. Mais elle était détruite ou gênée par la propagande de haine de Vichy, toute cette propagande de relèvement moral et national qui supposait l’élimination des éléments qui avaient corrompu et détruit la France. Ce que les antisémites Suisses appelaient l’essence nationale.
L’autre argument qui combat la justification de Vichy est que l’Holocauste, par des moyens purement Allemands, n’était pas possible en France par manque de moyens policiers et militaires.
La destruction complète de la France, annoncée par Hitler, si les Vichystes savaient lire, n’était qu’un but à moyen terme. L’important était de faire la guerre, en pillant tranquillement les ressources économiques de la France, dans la sécurité militaire, assurée par l’administration collaborationniste des deux zones. Tous ces soldats Allemands qui n’étaient pas en France
étaient ailleurs pour occuper des pays plus étroitement et réussir l’Holocauste plus parfaitement. Ainsi, cette thèse des effets heureux de l’existence de Vichy est une thèse dangereuse. Elle conduit à présenter les Français Juifs comme ayant bénéficié de la trahison de Vichy. C’est la thèse du camarade Zemmour qui est incapable de comprendre qu’il sert ainsi la haine antisémite qui ne demande qu’à se développer. De la même façon, l’antisémitisme a toujours exploité et opposé les Juifs étrangers aux Juifs Français. L’antisémitisme a toujours travesti l’action du consistoire et de l’UGIF.
Les travaux de Limore Yagil, sans réflexion politique, forment une suite d’informations anecdotiques qui ne peuvent que servir les partisans du régime de Vichy. Ses attaques invraisemblables contre le professeur Paxton rejoignent la propagande de l’extrême droite. Elle ne peut se poser comme historienne au dessus de la mêlée.
Ma longue réponse à Madame Yagil a disparu en cours d’écriture.
Je n’aime pas les coïncidences.
Il est difficile de comparer une situation vécue à une autre situation, non vécue.
L’Allemagne a trouvé un Pétain qui avait probablement les mêmes vue qu’Hitler sur la race pure, un sentiment antisemite. Sur ce, il y avait, en France,des gens qui avaient une autre vision de la vie, et ont agi selon leur conscience. Certains ont ensuite décroché le titre de Juste. Des villes, même, ont eu ce titre, tant la population s’était mobilisée pour recueillir des enfants. Il est certain, qu’en collaborant avec l’Allemagne, Pétain a libéré des soldats allemands pour combattre sur d’autres fronts. Ne pas collaborer, c’était résister, Lapalisse l’aurait dit….
Dans le cas où Pétain n’aurait pas collaboré, aurions nous eu plus ou moins de rafles? Peut-être que la résistance passive de cacher des enfants ou même des familles entières de juifs eut été plus intense contre un occupant que contre un gouvernement et une police nationale qui ont endormi les consciences de braves gens qui faisaient confiance à un gouvernement francais ?
Ce qui est évident, c’est que les soldats allemands envoyés sur d’autres fronts que le territoire francais, ont favorisé la politique d’Hitler….. De là à pouvoir quantifier le mal fait par ces soldats sur les autres fronts, je n’en ai pas la formule…..