La chronique de Pascale Davidovicz : «trublions» ou dangereux populistes ?

Gare aux dérives de la sémantique lexicale.

Le terme « trublion » est revenu plusieurs fois dans les médias concernant Donald Trump, candidat républicain à l’élection présidentielle américaine.

Si vous prononcez ce mot devant un enfant, il le fera probablement rire, tant sa sonorité est charmante comme celle de mignon.

En effet, le terme est souvent employé dans le registre de l’humour et du comique.

De Coluche à Michaël Youn, en passant par Jacques Martin qualifié de trublion télévisuel et Sacha Baron Cohen de trublion d’Hollywood, j’ai retrouvé pléthore d’articles où le terme était associé à des personnalités artistiques et médiatiques.

Dieudonné était aussi taxé de « trublion ».

La sémantique lexicale est l’étude du sens des mots d’une langue.

Or, le moins que l’on puisse dire est que l’usage de beaucoup de mots et expressions est souvent inapproprié.

La définition de trublion dans le Larousse est un individu qui sème délibérément le trouble et le désordre.

Le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales (CNRTL) précise que le mot trublion fut forgé par plaisanterie par Anatole France, à l’aide du grec, qui signifiait un bol ou une écuelle, en référence au surnom de « Prince Gamelle » donné au duc Philippe d’Orléans qui revenu en France en 1890 à 21 ans, en bravant ainsi les lois d’exil qui depuis 1886, en tenaient la famille royale éloignée, s’était présenté au bureau de recrutement de Paris pour faire son service militaire.

Il fut condamné à deux années d’emprisonnement et expulsé.

A noter qu’il fut dès 1898 l’un des chefs de file des royalistes nationalistes antidreyfusards.

Donald Trump, un « trublion » ?

Les medias ont repris à l’envie le terme de « trublion » pour qualifier Donald Trump.

trump

Même si comparaison n’est pas raison, cela m’a fait penser à ce qu’on disait d’Adolf Hitler dans les années trente.

Pour l’historien britannique Ian Kershaw, spécialiste de l’Allemagne nazie et de la Seconde Guerre mondiale, c’est la complaisance de l’élite bourgeoise pensant à tort pouvoir manipuler comme des pantins Adolf Hitler et les nazis qui leur a permis de prendre le pouvoir en 1933.

Contre toute attente, le milliardaire Donald Trump a émergé et séduit les « petits blancs » américains racistes, isolationnistes et marqués au fer rouge par la crise qui l’ont massivement plébiscité.

Pour Ian Kershaw une question obsède l’Allemagne et l’Europe depuis quatre-vingts ans : comment Adolf Hitler, un peintre raté, sans fortune ni éducation, un marginal désaxé, incapable d’entretenir une relation humaine stable, a-t-il pu prendre le pouvoir dans l’un des Etats les plus avancés du monde ?

Avec la complaisance et la complicité d’une partie de l’élite allemande qui comptaient en tirer profit.

La différence reste qu’heureusement les institutions américaines sont plus solides que ne l’étaient celles de la République de Weimar et que l’armée américaine ne suivra pas Donald Trump au pas de l’oie !

Il n’en demeure pas moins que l’émergence d’un populisme aux USA, agrémenté de racisme, d’antisémitisme et de misogynie ne laisse rien présager de bon.

Des immigrés mexicains qu’il injurie, aux femmes qu’il inonde de propos orduriers jusqu’à estimer qu’une femme pratiquant l’avortement devrait être punie, en passant par l’option d’une bombe nucléaire sur l’Europe et le Moyen Orient, Donald Trump éructe comme Hitler.

Combien de « trublions » ?

L’arrivée de Donald Trump dans l’arène politique mondiale est inquiétante comme celle de nombreux populistes et fascistes en Europe.

Comme je l’écrivais dans mon article du 13 avril 2014, le populisme, comme le fascisme, fait son lit dans les pays en crise, prétend parler au nom du peuple, s’oppose au système, propose des solutions trompeuses, désigne des boucs émissaires et alimente les peurs, les frustrations et les ressentiments.

Le populisme à la française.

J’évoquais le populisme à la française du Front National qui ne nous réserve plus aucune surprise sur ses intentions de surfer sur le chômage, la crise économique et identitaire mais qui se déchire en son sein.

Le populisme à l’italienne de Beppe Grillo.

Le comique fondateur du Mouvement 5 Etoiles (M5S) qui se devait n’être ni de droite, ni de gauche, a annoncé « faire un pas de côté » et déclaré « Où vais-je? A droite toute ».

Les nombreux commentaires des militants du M5S sur le blog beppegrillo.it sont empreints d’une grande désillusion. Certains internautes fustigent l’attitude « démocrate chrétienne » de leur chef qui affiche des positions à rebours de leurs convictions sur les questions de l’immigration ou du droit du sol.

Beppe Grillo a laissé les commandes à son mentor Gianroberto Casaleggio, un entrepreneur gestionnaire de son site et réputé conservateur.

Le populisme à la néerlandaise de Geert Wilders.

Geert Wilders est à la tête du Parti pour la Liberté (PVV), un parti sans structure, sans argent et sans programme, si ce n’est la défense des oubliés du système, la condamnation de l’immigration, de l’islam et de l’Europe, mais qui le place en tête des sondages.

Il a négocié une entente pour la formation d’un groupe d’extrême droite au Parlement de Strasbourg avec le Front National et le Vlaams Belang belge.

Les populismes à la hongroise.

Celui du Premier ministre Viktor Orban.

Le premier ministre conservateur et nationaliste est en train de gagner son triste pari d’accueillir « zéro réfugié ».

Celui de Gabor Vona, fondateur du parti Jobbik.

Le parti Jobbik revendique une idéologie pro turque, défendue autrefois par Ferenc Szalasi, le leader des Croix Fléchées nazies.

Gabor Vona, fasciné par l’islam, affirme que c’est « le dernier espoir de l’humanité dans les ténèbres du globalisme et du libéralisme »

Les nouveaux visages…de femmes du populisme.

Le phénomène populiste s’intensifie et nous voyons émerger de nouveaux porte-paroles de la démagogie.

La nouveauté est que les femmes sont de plus en plus nombreuses à s’imposer dans le paysage des partis populistes.

Leurs propos sont aussi durs, voire pires, que ceux de leurs homologues masculins, mais elles véhiculent une image plus douce, plus rassurante.

On aurait pu rêver mieux pour l’avenir de l’homme…

Citons Frauke Petry, 40 ans, née en RDA, récemment divorcée du père de ses quatre enfants, est la présidente de l’AFD (Alternative Für Deutschland) en Allemagne.

Son parti a remporté un franc succès aux dernières élections régionales de mars 2016.
Frauke Petry, a évincé le fondateur du parti Bernd Lucke, jugé trop mou et pas assez à droite.

S’appuyant sur la crise des migrants, elle a déclaré que la police devait si nécessaire « faire usage d’armes à feu ».

Siv Jensen, célibataire de 46 ans, est à la tête du FRP (Parti du progrès) et ministre des Finances de Norvège depuis octobre 2013.

Elle a succédé à Carl Hagen, le fondateur du parti, en 2006.

Rappelons qu’Anders Breivik, le terroriste d’extrême droite qui a commis les massacres le 22 juillet 2011 à Oslo et sur l’île d’Utoya, avait milité dans les rangs du FRP.

Pia Kjaersgaard, 69 ans, est la fondatrice du parti populaire danois en 1995 et préside le Parlement danois depuis 2015.

Elle a été élue « raciste de l’année » par un journal suédois.

Son parti a pesé sur la politique d’immigration du Danemark, l’une des plus restrictives d’Europe, qui veut confisquer les biens des migrants.

Céline Amaudruz, 37 ans, est la présidente de l’Union Démocratique du Centre (UDC) du canton de Genève depuis 2010 et députée au Conseil national.

Elle est connue pour ses déclarations controversées sur les droits humains, l’immigration et les homosexuels.

Elle brigue la vice-présidence du parti, qu’elle a rejoint en 2007 en même temps que son père.

Rodrigo Duterte relègue Donald Trump au rang d’enfant de chœur !

Rodrigo « Rody » Roa Duterte, 71 ans, a remporté l’élection présidentielle aux Philippines le 9 mai dernier, un pays où 40 personnes détiennent 72 % des ressources.

Lorsqu’il a annoncé sa candidature en automne dernier, bien peu d’observateurs croyaient à son succès.

Il a mené une campagne nourrie par la haine des élites, alors qu’il en fait lui-même partie, et par sa lutte contre la criminalité.

« Il est arrivé comme un éclair dans le ciel » déclare Edna Co, politologue à l’université des Philippines.

Avocat et maire de Davao, il se vante d’avoir assaini sa ville, mais selon les organisations de défense des droits de l’homme, ce fut au prix de milliers de victimes abattues par un escadron de la mort, ce qui lui a valu les surnoms de « Punisher » ou « Dirty Harry ».

Des exécutions sommaires ont visé des délinquants et des dealers, mais aussi des enfants des rues.

Il compte bien appliquer à tout le pays ce qui a fait sa triste renommée. Il l’avait annoncé : « Oubliez les droits de l’Homme. Si je deviens président, ça va saigner. »

Florilège des déclarations de Rodrigo Duterte.

« Vous, les dealers, les braqueurs et les vauriens, vous feriez mieux de partir. Parce que je vais vous tuer ».

Il a annoncé qu’il tuerait encore des dizaines de milliers de personnes qui viendront « engraisser les poissons de la baie de Manille ».

A propos du viol et du meurtre d’une religieuse australienne par des prisonniers en 1989 à Davao, qui ne cache pas ses relations extraconjugales, déclare : « J’ai vu son visage et je me suis dit ‘Putain, quel dommage ! Ils l’ont violée, ils ont tous attendu leur tour. J’étais en colère qu’ils l’aient violée, mais elle était si belle. Je me suis dit le maire aurait pu passer en premier. »

En novembre 2015, il a qualifié le pape François de « fils de pute » parce que sa venue avait occasionné un embouteillage à Manille.

« Il nous a fallu cinq heures pour aller de l’hôtel à l’aéroport. J’ai demandé qui on attendait. Ils ont dit que c’était le pape, je voulais l’appeler. Le pape, fils de pute, rentre chez toi. Ne viens plus en visite. »

En 2012, il a promis une récompense de 125 000 $ à quiconque rapporterait la tête d’un chef de gang présumé, ajoutant qu’il rallongerait la somme de 24.000 $ si on lui livrait la tête dans un sac de glace « pour qu’elle ne sente pas trop mauvais ».

Il compte résoudre le conflit territorial en mer de Chine méridionale en allant en jet ski planter le drapeau philippin sur la base chinoise.

Il revendique fièrement le titre de dictateur et compte se passer du Congrès dans le cas où ses projets seraient contrariés.

En Inde, une circulaire du RSS encourage à tuer des chrétiens.

Le RSS (Rashtriya Swayamsevak Sangh) en français « Organisation volontaire nationale » ou « Organisation patriotique nationale ») est un groupe nationaliste hindou de droite et paramilitaire fondé en 1925 par un médecin indien Keshav Baliram Hedgewar, initialement pour lutter contre le colonialisme britannique et empêcher le séparatisme musulman.

Violer des femmes chrétiennes durant des émeutes, vendre des petites filles chrétiennes au marché des esclaves, recruter des docteurs pour qu’ils dispensent des médicaments empoisonnés, et assassiner les activistes qui s’opposent au système de castes sont quatre des recommandations parmi trente quatre autres émanant du RSS.

La circulaire a pour objectif de répandre l’Hindutva, l’idéologie extrémiste qui réclame que l’Inde devienne un pays exclusivement hindou.

Il faut savoir que Mein Kampf est extrêmement vendu et répandu en Inde.

Les rassemblements imposants, les exercices quasi militaires et les appels au meurtre valent au RSS d’être taxé d’organisation fasciste.

Le chef actuel de l’organisation est Mohan Bhagwat.

Beaucoup de membres du parti nationaliste au pouvoir en Inde, le BJP (Bharatiya Janata Party) en français « Parti du peuple indien, sont issus du RSS et depuis l’arrivée au pouvoir du Premier ministre Narendra Modi, les hindouistes extrémistes se déchaînent contre les minorités religieuses.

En Autriche, Norbert Hofer, le leader d’extrême droite est aux portes du pouvoir.

Cet ingénieur aéronautique de 45 ans au physique de gendre idéal et aux propos mesurés, issu du FPÖ (Freiheitliche Partei Österreichs) en français Parti de la liberté d’Autriche, a séduit les électeurs.

Il est arrivé en tête du premier tour de la présidentielle autrichienne le 24 avril dernier avec plus de 36 % des voix, en ralliant des voix sociales démocrates !

Avant même les résultats du second tour le 22 mai prochain, le chancelier social démocrate Werner Faymann a présenté sa démission.

Si Norbert Hofer entrait au palais présidentiel de Vienne, ce serait la première fois depuis la Seconde guerre mondiale qu’un pays européen serait dirigé par un parti d’extrême droite.

Ma liste n’est hélas pas exhaustive mais suffit déjà amplement à glacer le sang.

« Commencer à penser, c’est commencé d’être miné » disait Albert Camus.

Pascale Davidovicz

Sources : cnrtl.frtempsreel.nouvelobs.com leparisien.frrtl.frlemonde.frinfo-sectes.orgrfi.fr francetvinfo.fr

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2 Comments

  1. TRUMP TRUBLION POPULISTE DANGEREUX POUR QUI ?
    Les bien pensants de la politique contemporaine comme Davidovicz se rassurent dans l’illusion que ceux qui ne pensent pas comme eux développent des politiques criminelles.
    Diaboliser ceux qui développent une pensée différente de la pensée commune est la preuve que les bien pensants n’ont pas de politique.
    Un juif peut-il s’autoriser à porter des accusations contre un candidat à la présidence des Etats-Unis le seul pays qui a soutenu le peuple juif d’Israël avant Obama ?
    Trump est-il un populiste dangereux ?
    Le populisme est avant tout un patriotisme national. Je suis juif et et sioniste convaincu parce que le sionisme est justement le patriotisme envers la nation juive Israël.
    Les bien pensants de la politique internationale manifestent leur hostilité aux patriotismes nationaux par leurs discours et plus encore par par des analyses théoriques qu’ils développent complaisamment pour justifier que cette politique qui fonde sa raison sur la lâcheté et la servitude est pragmatique rationnelle et même morale à quelque hauteur que l’on se place allant jusqu’à la perte de toute trace de virilité lorsque soudain pris de vaillance et d’intransigeance envers ces patriotismes nationaux que l’on qualifie de de populisme dangereux.
    Un patriotisme national comme le sionisme est-il dangeus pour qui ?certainement pas pour les nationaux.
    En l’occurrence pour un juif à l’heure où le peuple juid fait l’objet de cette politique internationale unanime dans l’agression du peuple juif que les instances internationales en viennent même à nier l’existence du peuple juif son histoire sa culture et son droit à vivre en paix sur sa terre natale je considère comme une trahison qu’un juif puisser se confondre avec cette politique criminelle.

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