Un compromis de vente a été signé au centre-ville. Une synagogue pourrait devenir mosquée. Grande première à Marseille.
400 000 €, le prix de la transaction
entre juifs et musulmans
Mais l’argent n’est pas que le nerf de la guerre, assure-t-on. Il y a la question du transfert des populations. La communauté juive diminue au fil des années au centre-ville. Ce qu’on constate aisément en voyant le nombre de commerçants chinois « s’emparer » des rues et des commerces entre le cours Belsunce et le boulevard d’Athènes. Mais ce ne sont évidemment pas les Chinois qui constituent la plus grosse communauté. Les Maghrébins sont omniprésents et l’islam (250 000 musulmans à Marseille, dont 10 % de pratiquants) est la religion ultradominante, loin devant le judaïsme. « On peut se retrouver avec dix fidèles seulement pour la prière déplore un proche de la synagogue. Il faut payer le rabbin, il faut payer l’entretien. C’est difficile. » Alors quand la proposition d’achat est tombée, les juifs de Sainte-Dominique n’ont pas dit non. Mais si on s’achemine vers la vente, on ne parle pas forcément de disparition. La synagogue serait reconstruite ailleurs. Et quoi qu’il arrive, la communauté disposerait toujours de 58 synagogues à Marseille (23 écoles plus 60 restaurants cachers) contre 32, il y a 25 ans. Pas de quoi s’émouvoir de cette vente donc, si l’on en croit le président du consistoire Zvi Ammar. Reste que c’est une grande première. À ce jour, seul le diocèse avait cédé un lieu de culte rue de Lyon (15e).
Mais c’était à des… coptes. Autrement dit, on était resté entre chrétiens. Des chrétiens qui avaient pu constater il y a quelques mois que Dalil Boubekeur, recteur de la Grande mosquée de Paris, la référence en France en matière d’islam, était favorable au transfert d’églises vers le culte musulman. Mais la polémique, qui allait forcément naître, s’éteignit vite. À Marseille, le diocèse conserve ses 150 églises, dont 31 construites (après la loi de 1905 de séparation de l’Église et de l’État) lui appartiennent. La communauté israélite, elle, a perdu une synagogue qui va être réaménagée en mosquée comme on réaménage un appartement. Rien n’interdit une religion de prendre la place d’une autre dans un édifice. Il suffira d’enlever « les traces » du propriétaire antérieur, les signes de la religion passée, de faire les travaux qui s’imposent. Et une nouvelle mosquée verra le jour. Reste à savoir si la Ville de Marseille, qui a le pouvoir le bloquer le processus de vente, interviendra.
(1) Les responsables de la mosquée et de la synagogue n’ont pas voulu s’exprimer.