Un peu de recul éclaire parfois. Sur Israël surtout.
Prenons au hasard un groupe de passants à Tel Aviv.
Disons cent personnes. Si on les regarde de près, on verra qu’il y a facilement 10 russes d’origine, qui ont pour certains fui leur pays, et deux ou trois georgiens, ukrainiens, et même lithuaniens venus, quant à eux, il y a un siècle…Il y aura quelques éthiopiens. Pas mal de marocains, un ou deux tunisiens, peut-être un algérien et un égyptien . Et bien sûr beaucoup de gens de Pologne, de Roumanie, Hongrie, Allemagne, et même France, américains, et encore beaucoup d’autres.
Mieux que ça, aujourd’hui les plus jeunes sont issus le plus souvent de la plus belle mixité lorsqu’ils ont 25 ou 30 ans. Et leurs propres enfants ont 4, 5, ou 6 pays d’origine.
Au-delà de cette photographie de mélanges des couleurs et des styles, a t’on un jour réalisé les parcours inouïs de ces gens.
Certes, tout le monde n’a pas combattu au ghetto de Varsovie, ou , plus tôt, affronté les pogroms sanglants des steppes.
Mais je peux déjà vous affirmer, pour la partie pourtant la plus pacifique, que les descendants des 900 000 juifs expulsés, ou gentiment poussés vers la sortie, des juifs des pays arabo-musulmans n’ont pas vécu une promenade de santé en quittant leurs berceaux, souvent pluri-millénaires.
C’est vrai, certains ont emporté assez de biens, mais pris en guise de cadeau de départ deux ou trois beignes dans la figure.
Pour les Ashkenazes , le parcours fut plus rude, rugueux, souvent parsemé de quelques gâchettes de roulette russe. Je ne décrirai pas ce que tout le monde a déjà vu dans les images d’horreur. Et ces gens, et leurs descendants, ont atterri sur notre belle terre.
Parmi eux, des parcours dont aucun écrivain n’a réussi à transmettre la densité insupportable de ce vécu .
Et qu’on doit le plus largement à l’Eglise. Ce mélange détonnant, des gens de toutes origines qui ,contrairement aux idées reçues, a commencé au 16ème siècle de façon significative, a une valeur que personne ne semble mesurer.
Je vous donne un exemple symétrique: cent personnes au hasard recueillies à Paris ou Lyon. Bien sûr, il y aura quelques parcours, quelques « combattants », un résistant peut-être, deux si le hasard joue en votre faveur. Mais la masse, la très grande majorité, aussi élevée soit la moyenne intellectuelle, risque d’avoir le vécu de seulement deux des cents israéliens. Mais cet exemple est à peu près comparable aux gens des US, au creuset près. Car ce creuset s’est formé du 18è siècle au 20è. Les masses ont des vécu lisses, très largement. Et c’est pareil dans la totalité des pays occidentaux…Lisses. Ils sont très, trop, lisses.
Le résultat: 1948-2016 , 68 ans de vie officielle de notre Etat.
Pays le plus mixte du monde.Des communautés d’origine de probablement plus de 50 pays.
Le plus fort taux de sociétés de haute technologie au monde, de brevets par tête d’habitant, de Nobel par tête d’habitant, de molécules révolutionnaires (interféron notamment), plus fort taux d’universitaires de haut niveau, plus grand nombre de sociétés au Nasdaq, un des médecines les plus brillantes au monde…
Mais bien plus fort: l’armée la plus éthique du monde, avec un code de la guerre invraisemblable au vu de la situation.
Une démocratie totalement hors norme , donnant des leçons (s’ils acceptaient de les prendre) à toutes celles d’Europe ou d’Amérique. Un respect de toutes les pratiques religieuses, et des minorités .
Un système de santé qui permet à tous de se soigner sans payer; y compris les traitements les plus coûteux, comme si on existait depuis Vercingétorix…Nos fondamentaux économiques sont encore minuscules, mais nos fondamentaux de générosité sont immenses…
Et malgré cela, nous avouons humblement que nous sommes très loin de la perfection, et qu’il faut encore travailler, améliorer les systèmes, supprimer les dérives.
En somme, mon propos n’était pas de ressasser les réussites d’Israël , que tout le monde connaît, mais surtout de dire une fois de plus les vertus de la mixité des cultures, des origines, qui permettent de passer d’un savoir à deux savoirs, puis à quatre ou plus la génération d’après.
Parler les langues, s’ouvrir aux peuples, aux traditions, être curieux… S’interroger. Le juif, c’est çà avant tout …
José Boublil
Il ne faut pas oublier aussi que cette intégration s’est faite et continue de se faire en incluant des beaucoup de gens originaires de conditions très primitives au niveau technologique, tel que le Yémen ou l’Éthiopie (intégration encore en route).
Ça, c’est du presque jamais réussi en si grande quantités ailleurs.
Israël a de quoi être fier, malgré ses défauts.
l’excellent film de Radu Mihaileanu, « Va, vis et deviens » raconte l’intégration éthipienne.
quant aux juifs du Yémen, on lit que nombreux veulent rester là-bas. ça doit être si dur d’être transplanté. même si je suis admirative de la façon dont les arrivants sont éduqués en israel: à quoi servent un frigo une douche etc
Le progrès social, culturel et économique d’Israël est un atout majeur, en effet, pour lui permettre, entre autre, de résister à ses voisins hostiles.