Une saison israélienne en France

Musique, danse, théâtre, arts plastiques, cinéma, littérature : venus de cette enclave occidentale au Moyen Orient qu’est Israël, les artistes témoignent de la vitalité artistique de leur pays. art-israel

Pour Elinor Agam, cette jeune femme de théâtre qui a signé une vingtaine de mises en scène dans son pays, mais vient d’être nommée à sa demande attachée culturelle de l’ambassade d’Israël à Paris, la surprise a été grande : jamais elle n’avait pu mesurer, depuis Tel Aviv, combien était importante la présence des artistes et des intellectuels israéliens en France.

Et cette année 2016 tout particulièrement offre de quoi la réjouir. Écrivains, cinéastes, chorégraphes, musiciens, plasticiens de tous bords offrent un large panorama de la création artistique en Israël. De plus, le théâtre israélien, méconnu en France quand tant d’acteurs remarquables sortent des écoles de leurs pays, fera enfin une percée dans le pays de Molière.

Dans deux ans, en 2018, viendra le temps d’une année croisée France-Israël où l’on verra déferler un nombre considérable de manifestations françaises en Israël et israéliennes en France. Mais l’exemple de cette année 2016 est presque plus intéressant encore, puisque les manifestations d’artistes ou d’intellectuels israéliens surviennent pour la plupart en dehors de tout cadre officiel, dans le cadre des échanges et des invitations effectuées par les institutions françaises et les artistes eux-mêmes, sans intervention directe des deux états.

Un début en fanfare avec Amos Gitaï

2016 a débuté en fanfare avec le magnifique film d’Amos Gitaï, « Le dernier jour d’Yltzhak Rabin ». Une oeuvre forte, qui n’a évidemment pas eu l’heur de plaire au gouvernement en place, à Benjamin Netanyahou en particulier, puisque celui-ci y est implicitement mis en cause pour avoir suscité, avec ses partisans, le climat de haine qui a favorisé l’assassinat de Rabin et partant l’assassinat des accords de paix avec les Palestiniens.

S’ensuivront la 16e édition du Festival du Cinéma israélien à Paris dans les salles des 7-Parnassiens, du 29 mars au 5 avril, une « forte présence de réalisateurs, producteurs et comédiens israéliens au Festival de Cannes », mais aussi au Festival du court-métrage de Clermont-Ferrand, du Festival des films de femmes, à Créteil, au Forum des Images, à Paris, dans le cadre de « Séries Mania »…

Dans le monde des lettres

Gallimard, Actes Sud, les Editions théâtrales, Fayard, les Editions Zulma, celles de l’Antilope, Phebus ou les Editions Viviane Hamy publient cette année des auteurs comme Amos Os, Eshkol Nevo, Zeruya Shalev, Yshai Sarid, Orly Castel Bloom, Hanokh Levin, Gilad Evron, Yoram Kaniuk, Benny Barbash, Rachel Shalita, Eran Rolnik, Maayan Ben Hagai, Nissim Aloni. Ce qui témoigne bien évidemment de l’extraordinaire vitalité littéraire d’un pays qui n’a jamais que 8,5 millions d’habitants.

Mais on rencontrera aussi au Salon du Livre, rebaptisé Livre Paris (du 16 au 20 mars, à la Porte de Versailles) des caricaturistes comme Yirmi Pinkus et Rutu Modan. A la Fête de la littérature israélienne à Paris, qui surviendra fin septembre à la Maison de la Poésie, on recevra bien des auteurs déjà cités, alors qu’Amos Oz ouvrira les festivités au Musée d’art et d’histoire du judaïsme, le 5 septembre.

Chorégraphes israéliens

La danse israélienne, si foisonnante, n’a pas attendu 2016, pour être partout présente. Ne serait-ce que parce que deux chorégraphes israéliens, Emanuel Gat et Yuval Pick, sont installés en France. Mais après les représentations à l’Opéra de Paris de la plus célèbres des compagnies israéliennes, la Batsheva, conduite par Ohad Naharin, représentations qui ont eu lieu en janvier, ce sera au tour d’Hofesh Shechter d’être l’hôte du Théâtre de la Ville dès le 30 mai avec « Barbarians », une chorégraphie qui, hélas ! est loin d’être la meilleure de cet artiste de premier plan.

Sharon Eyal et Emanuel Gat seront en juin les invités du Festival de Montpellier Danse, cependant qu’on les reverra à la Biennale de Lyon en septembre en compagnie de Roy Assaf, Yuval Pick et Hofesh Schechter.

Dans le domaine des arts plastiques, une exposition est réservée à Moshé Ninio au Musée des arts et de l’histoire du judaïsme à l’automne, cependant que le photographe Ori Gersht sera l’hôte du quatrième Salon international de la Photographie lors de la même saison, à l’espace des Blancs Manteaux.

Le légendaire Ivry Gitlis

Enfin, dans le domaine musical, c’est encore une déferlante. Du 21 au 27 mars, le tout nouveau festival intitulé « Le Printemps du Violon », parrainé par Martha Argerich et Ivry Gitlis, invite le pianiste Iddo Bar-Shaï (le 25 mars au Musée Maillol), la violoniste Dora Schwarzberg (le 26 mars, salle Adyar ). Et si le légendaire Ivry Gitlis donne lui aussi un récital le 22 mars, salle Adyar, et participe à un concert le 27 mars, il est aussi l’hôte d’honneur du Festival de Pâques, à Aix-en-Provence, (du 22 mars au 3 avril, au Grand-Théâtre de Provence), lequel convie cette année 14 violonistes renommés, « parmi les meilleurs du monde ».

Dans le domaine de la musique contemporaine, l’Ensemble Meitar est programmé à l’Ircam le 2 juillet, ainsi que deux compositeurs israéliens, Ofer Pelz et Hadas Pe’ery. Cependant qu’explorant d’autres champs musicaux, le Rotem Sivan Trio sera présent au Sunset le 29 avril et qu’Orphaned Land, groupe de Full metal jouera le 19 juin au Festival Hellfest de Clisson.

Première théâtrale

Toutefois, la grande nouveauté sera représentée par le premier Festival de Théâtre israélien de Paris, lequel se déroulera dans diverses salles de la capitale en automne et dont le programme n’est pas encore dévoilé. En France, on méconnaît totalement la scène théâtrale israélienne dont la diffusion s’est heurtée sans doute au problème de la langue.

Il est aussi difficile pour les publics francophones d’aller découvrir des pièces en hébreu à Tel Aviv que d’aller à Budapest en admirer en langue hongroise. Mais à Paris, elles seront évidemment traduites et sur-titrées dans les théâtres. Et cela permettra de découvrir des acteurs dont on subodore déjà l’excellence puisqu’on les admire par l’intermédiaire du cinéma israélien et qu’on peut imaginer la qualité de leur formation.

En attendant, dès juillet, le public du Festival d’Avignon pourra apprécier l’Orto Da Théâtre, une troupe fondée en 1996 par Ynon Tzafrir, Yifat Zandani et Avi Gibson Barel. Son spectacle, « Stones », est inspiré par le monument érigé à Varsovie à la mémoire des héros et des martyrs du ghetto.

Si les Israéliens, d’une part, connaissaient mieux l’importance de la présence de leurs artistes et de leurs intellectuels sur la scène française, tout comme l’accueil qu’ils y reçoivent, ils se départiraient sans doute de bien des préjugés défavorables qu’ils nourrissent quant à l’attitude de la France à leur égard.

D’autre part, si les bonnes âmes qui appellent souvent en France au boycott d’artistes israéliens connaissaient mieux les dures réalités économiques que vivent ces derniers dans leur pays, et si elles voulaient consentir à comprendre que l’immense majorité des artistes d’Israël est opposée à la politique que mène leur gouvernement vis à vis des Palestiniens, le climat entourant leur venue en Europe n’en serait que plus détendu et plus favorable.

raphael_de_gubernatisRaphaël de Gubernatis

Source nouvelobs

 

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