Genève : un avocat à la tête de la communauté israélite

Il nous donne rendez-vous devant la synagogue de Beth Yaacov. Son écharpe élégamment nouée autour du cou et son manteau noir entrouvert, Philippe Grumbach pose fièrement devant l’édifice religieux. « Ce bâtiment me rappelle mon enfance, j’y ai célébré ma Bar Mitsvah (ndlr: communion juive) et j’y viens toujours pour commémorer les fêtes juives. Sans compter que c’est un très beau monument.» Au-delà des souvenirs personnels, l’avocat a choisi ce décor pour une autre raison: il vient de reprendre la présidence de la Communauté israélite de Genève. Et son étude se situe accessoirement à deux pas de l’édifice.

C’est d’ailleurs là, au chaud, que se poursuivra l’entretien. La salle de réunion depuis laquelle il commande deux cafés d’un ton sec à sa secrétaire est ornée de copies de célèbres tableaux d’art moderne. «C’est une de mes passions, confie Philippe Grumbach, qui précise également apprécier les safaris et le tennis. Je peux facilement faire plusieurs heures de voyages pour aller voir une exposition.» L’avocat est connu à Genève pour avoir notamment plaidé contre des négationnistes et des auteurs d’actes antisémites. Croyant mais pas pratiquant, Philippe Grumbach a été sensibilisé à la cause juive à l’adolescence. «Quand j’ai eu 13 ans et que je m’apprêtais à effectuer ma Bar Mitsvah, mon père m’a raconté comment sa mère s’était fait arrêter par la police de Vichy ainsi que sa propre arrestation. Cela m’a beaucoup choqué. C’est à partir de ce moment que j’ai commencé à m’intéresser à la lutte contre l’antisémitisme.»

La passion de la plaidoirie

Lorsque le jeune homme entame des études en droit à l’Université de Genève, il s’engage ainsi parallèlement dans différentes associations juives. Il a notamment été président de la Cicad (Coordination inter communautaire contre l’antisémitisme et la diffamation) et membre du comité suisse de la Licra (Ligue Internationale contre le racisme et l’antisémitisme). L’obtention de son brevet d’avocat lui permet alors de défendre sur le plan pénal une cause qui lui est chère tout en pratiquant un art qui le passionne: la plaidoirie ou «croiser le fer», comme il aime le répéter.

Le jeune orateur s’est d’ailleurs rapidement spécialisé en droit pénal des affaires et en droit de la famille où la parole prend alors toute sa place. Il mentionne avec plaisir et une fierté non dissimulée les procès gagnés et les interlocuteurs de poids avec lesquels il a débattu.

Assurer la sécurité

Le ton change cependant lorsqu’on aborde sa mission à la tête de la Communauté israélite. Les récents événements en France incitent le nouveau président à instaurer en priorité des mesures pour assurer la sécurité de ses coreligionnaires. «Nous observons une vraie résurgence de l’antisémitisme en Europe et cela inquiète la population juive, commente Philippe Grumbach. La situation en Suisse n’est toutefois pas comparable à la France où on observe une augmentation des départs vers Israël.»

Si assurer la sécurité de ses membres demeure son premier objectif, l’avocat souhaite également profiter de ses deux ans de présidence pour développer les relations avec les autres communautés religieuses présentes à Genève. «Nous devons vivre ensemble et nous enrichir de nos différences. Entretenir les liens et le dialogue entre les différents groupes religieux est la meilleure réponse à apporter au terrorisme», confie-t-il.

Philippe Grumbach a déjà prévenu sa famille et ses amis; sa vie a changé le soir de son élection. «La communauté israélite de Genève se compose d’environ 3000 membres. En tant que président, je suis responsable de tous les services auxquels ils feront appel dans leur vie religieuse, de la circoncision à leur mort. C’est une grosse charge de travail. Mais je suis très fier d’assumer ce rôle.»

Source : http://www.tdg.ch/geneve/actu-genevoise/avocat-tete-israelites/story/22925918