Shmuel Trigano, exprimant un avis bien tranché sur les juifs américains, m’oblige à reprendre un thème déjà traité en mai dernier.
Les juifs américains sont, dit-il dans une tribune intitulée «Pharaonique Obama!» publiée récemment sur ces colonnes, d’une «stupidité politique», ayant «…par deux fois voté pour (Obama) avec enthousiasme…».
Il serait hélas difficile de demander la réciproque aux juifs américains, à savoir un avis tranché sur Shmuel Trigano, vu qu’ils ignorent probablement jusqu’à son existence.
On pourrait en revanche se demander en vertu de quoi Trigano se permet d’émettre un avis sur l’intelligence, politique ou autre, de cette vénérable communauté et sur la qualité de sa jugeote.
Influents citoyens US, majoritairement aisés, instruits, de conscience politique exacerbée, très impliqués dans la vie de la cité, premier gisement mondial (per capita) de prix Nobel, les juifs américains sont-ils suicidaires ? Ennemis de leurs intérêts au point de voter Obama massivement et à répétition ?
Et si ils savaient parfaitement ce qu’ils font en votant ainsi ?
Par ailleurs, le lecteur averti adorera sans doute particulièrement la tangente messianico-militaire prise par la prose de Trigano, quitte à galvauder le sacré : «ce peuple qui défia autrefois l’Oukase pharaonique alors que se levait le ‘’Dieu des Armées’’ ! YHVH, homme de guerre…».
L’interdit d’évoquer le nom du Seigneur gratuitement balayé ainsi du revers de la main, le rappel, faute d’arguments, du השם המפורש par intérêt, la mise de la sortie d’Egypte à toutes les sauces au service d’une propagande idéologique voire politicienne… Heureusement que c’est bientôt Kippour, il va falloir prier pour se faire pardonner, M. Trigano…
Ainsi que le titre, citant le Pharaon et Obama concomitamment pour brouiller l’esprit du lecteur dont on ne fait sans doute pas grand cas.
Mais quel mélange de genres… A-t-on vu un Pharaon se soumettant au vote populaire ? Les mains liées par un congrès hostile ? Sachant qu’il quittera le pouvoir l’année prochaine?
A ce propos, Trigano et d’autres devraient se méfier du calendrier. Qu’adviendrait-il en novembre 2016 lorsque Obama ne sera plus président et s’il s’avère que rien d’important ne change dans la politique US, quel que soit le (la…) locataire du bureau ovale ?
Qu’adviendrait-il face à l’évidence ? Les expériences des dernières décennies (Vietnam, Somalie, Afghanistan, Irak…liste non exhaustive) ainsi que l’héritage catastrophique de G.W. («armes de destruction massive…») Bush poussent à penser qu’aucun président US , n’ira-t-en guerre contre l’Iran si bien,l’unique issue est un accord sur le nucléaire, avec Obama ou un autre ?
Comment reprocher à Obama sa supposée mollesse en matière de nucléaire iranien, sachant que tous les présidents US composent, depuis toujours, avec la prolifération nucléaire ? Que ce soit avec la dynastie Ubu qui règne sur la Corée du Nord en brandissant des ogives atomiques ; ou le Pakistan, puissance nucléaire islamique notoirement opaque et infréquentable entretenant de curieux rapports avec Washington? Sans naturellement oublier Israël, dont l’arsenal nucléaire est un secret de polichinelle.
Comment ne pas reconnaitre à Obama le mérite d’avoir été l’unique président américain à vraiment déployer, en l’occurrence à l’égard de l’Iran, des efforts considérables en la matière ? Et non sans succès ?
N’en déplaise à Shmuel Trigano, rien n’exclut que les juifs américains aient d’ excellentes raisons pour voter Obama qui échappent aux Obamaphobes primaires qui hantent nos médias; et que le stupide n’est pas forcément là où il parait.
Kalman Schnur
https://www.tribunejuive.info/
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