Des centaines de personnes sont attendues mercredi à Djerba pour le pèlerinage juif de la Ghriba, placé sous très haute surveillance après l’attentat du Bardo et une mise en garde d’Israël contre des projets d’attaques sur le sol tunisien.
Des barrages ont été installés aux accès de l’île de Djerba (sud), où se trouve la Ghriba, la plus ancienne synagogue d’Afrique. Visiteurs et véhicules étaient contrôlés par la police à l’entrée de la “Hara Kbira”, le “grand quartier” juif de l’île.
La Tunisie compterait aujourd’hui près de 1.000 juifs, contre 100.000 en 1956 avant l’indépendance. La majorité vit à Djerba. En plus des pèlerins tunisiens, quelque 500 personnes venues de France, d’Israël, d’Italie mais aussi de Grande-Bretagne et des Etats-Unis doivent participer mercredi et jeudi à cet évènement..
Le pèlerinage annuel de la Ghriba, visé en 2002 par un attentat-suicide au camion piégé (21 morts) revendiqué par Al-Qaïda, est toujours placé sous forte protection. Mais il fait l’objet cette année d’une vigilance accrue après l’attentat du 18 mars au musée du Bardo à Tunis, revendiqué par l’organisation Etat islamique (EI), dans lequel 21 touristes étrangers et un policier tunisien ont été tués.
Israël a en outre récemment assuré disposer d’informations faisant état de “projets d’attentats terroristes contre des objectifs israéliens ou juifs en Tunisie”, en conseillant de ne pas se rendre dans ce pays.
Des déclarations “qui ne sont pas innocentes (…) et dont on ne comprend pas sur quoi elles sont fondées”, a sèchement répliqué mardi le ministre tunisien de l’Intérieur Najem Gharsalli, qui a estimé que l’Etat hébreu entendait “affecter le pèlerinage” et “nuire à la réputation de la Tunisie”.
COMMENT GÂCHER SES CHANCES
Il semble que le ministre tunisien ne puisse imaginer que le devoir du Premier ministre israélien soit de mettre en garde les juifs des dangers qui les menacent . Et pour la réputation de la Tunisie, l’assassinat de 21 touristes et d’un policier devant le musée du Bardo il y a moins de deux mois suffit à l’affecter durablement.
C’est un automatisme chez les Tunisiens : ils veulent accueillir des touristes du monde entier. Ils disposent de l’infrastructure nécessaire : des hôtels magnifiques et un personnel qui a un un excellent savoir faire. Mais ils ne peuvent s’empêcher de gâcher leurs chances en s’aventurant dans des commentaires sans intérêt . Ils ont perdu l’escale des croisiéristes en refusant que les israéliens débarquent alors qu’il n’y avait nul besoin de visa auparavant pour eux comme pour tous. Ensuite la ministre a menti au lieu de présenter ses excuses.
Le pèlerinage de la Ghriba est dangereux : Djerba est très près de la frontière libyenne, des centaines de tunisiens ont fait le jihad, les services secrets israéliens ont averti…Le ministre tunisien aurait dû s’abstenir de mettre en cause le gouvernement israélien et se contenter de rassurer les pèlerins juifs. Mais il faut bien faire la distinction entre juifs et ” sionistes”!
Et ce pèlerinage va se dérouler avec un service d’ordre dramatique : 3 policiers pour un pèlerin.!
Seules quelques centaines de visiteurs étrangers sont attendues cette année, selon l’un des organisateurs de l’évènement, René Trabelsi, loin des quelque 8.000 personnes qui affluaient généralement avant l’attentat de 2002.
“De l’étranger, on attend à peu près 500 personnes. Avant l’attentat (du Bardo), on s’attendait au retour du pèlerinage (à ses niveaux d’avant 2002). Après l’attentat -c’est tout à fait logique et normal- beaucoup de gens ont eu peur”, a-t-il dit à des radios.
“On doit rebâtir ce pèlerinage comme (on doit rebâtir) notre tourisme”, affecté par l’instabilité qui a suivi la révolution de janvier 2011, a-t-il ajouté.
La Tunisie fait face depuis le soulèvement ayant renversé le dictateur Zine El Abidine Ben Ali à un essor de la mouvance jihadiste, qui a tué plusieurs dizaines de militaires et de policiers depuis fin 2012. Jusqu’à l’attentat du Bardo, les civils avaient été épargnés par ces attentats.
Pendant le pèlerinage de la Ghriba, organisé chaque année au 33e jour de la Pâque juive, les pèlerins prient, allument des cierges et déposent des oeufs barrés de voeux dans une cavité au fond de la synagogue.
Ils portent ensuite la “Menara”, un objet de culte monté sur un tricycle et décoré de foulards auparavant vendus aux enchères dans une ambiance de kermesse, lors d’une courte procession étroitement encadrée par la police.
Avec AFP
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