L’Opéra national de Bordeaux présente à l’affiche du Festival « Quatre tendances » des chorégraphies bouillonnantes de l’Israélien Ohad Naharin et du Franco-algérien Hamid Ben Mahi, deux temps forts de ce rendez-vous annuel dédié à la danse contemporaine. Cette cinquième édition donne à découvrir ou redécouvrir jusqu’au 26 mars un florilège étourdissant de « gaga dance« , de hip-hop ou de house.
Un exercice exigeant pour les 38 danseurs de la troupe de l’Opéra de Bordeaux qui enchaînent dans un décor minimaliste mambos burlesques au son de la voix suave du crooner américain Dean Martin, chorégraphies convulsives sur la musique survoltée du film « Pulp Fiction » et pas de deux langoureux et poignants sur les partitions du compositeur italien Antonio Vivaldi et de l’auteur-compositeur-chanteur français Alain Bashung.
« Minus 16 » d’Ohad Naharin, présenté pour la première fois à La Haye en 1999, et « Au-delà des grands espaces », création originale d’Hamid Ben Mahi, font ainsi leur entrée au répertoire de l’Opéra de Bordeaux.
Ohad Naharin, retenu par son travail à Tel Aviv, prépare sa prochaine création, co-produite par le Festival de Montpellier (Hérault), avec les danseurs de la Batsheva, compagnie que Naharin dirige depuis 25 ans et où il fut repéré à ses débuts par la chorégraphe américaine Martha Graham.
Il « regrette de n’avoir pu faire le déplacement à Bordeaux pour être là, avec les danseurs ». Ces danseurs, dont il se dit très proche au point « d’avoir inventé pour eux la technique +Gaga+ », appelée ainsi en référence à ses tout premiers gazouillis de bébé souvent évoqués par sa mère.
Ce concept a fait le tour du monde en quelques années: « Bien plus qu’une simple méthode de travail, c’est une véritable langue du mouvement parce qu’elle évolue sans cesse », explique par téléphone à l’AFP cet ancien élève de la prestigieuse Juilliard School de New York, né en 1952 dans un kibboutz.
Se retrouver la tête à l’envers
« C’est aussi une manière de faire le lien entre plaisir et effort, pouvoir de l’imagination et aptitude à danser ». « Mélangez tout ça et il en sortira cette manière si particulière de bouger », résume-t-il. Pour le chorégraphe israélien, « tout est permis sur la scène où le comique et le tragique, l’élégance et la brutalité, la folie et la raison doivent sans cesse cohabiter, comme dans la vraie vie ».
Hamid Ben Mahi, lui, n’a « pas de méthodologie de travail » mais « de simples petites phrases chorégraphiques jetées en vrac dans un carnet », précise-t-il à l’AFP. « Je veux que ça danse que ça respire, oublier les points et les lignes », ajoute-t-il. « Quand j’étais petit j’aimais bien me retrouver la tête à l’envers », se souvient ce Français d’origine algérienne né dans une cité de Talence (Gironde), « loin du monde de la danse ».
« Jai enseigné le hip-hop sur les terrasses de Mériadeck (ndlr: quartier moderne de Bordeaux) avant même de l’avoir appris », bien des années plus tard au sein de la prestigieuse compagnie du chorégraphe américain Alvin Ailey, à New York, se souvient-il. A 41 ans, ce danseur aguerri est à la tête d’une petite compagnie dont il s’apprête à célébrer le 15ème anniversaire par une rétrospective dans sa Gironde natale, avant l’étranger.
« J’ai essayé tous les langages du corps, des claquettes à la danse africaine, dit-il, mais j’ai bien du mal aujourd’hui à classer mon travail dans un genre ». « Cela s’est transformé en quelque chose d’hybride entre les arrêts sur image du hip-hop et les ports de bras très codifiés du classique ».
Après les chorégraphies militantes des dernières années comme « Beautiful Djazaïr », évocation de l’histoire coloniale franco-algérienne ou « La hogra », chronique familiale à la veille des printemps arabes, il est sûr en revanche de vouloir revendiquer « le droit de faire aussi de la poésie ».
AFP
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