Le titre de Juste parmi les Nations a été décerné à 3 813 personnes en France. Quatre-vingt l’ont obtenu en 2014. Huit de plus en sont titulaires depuis le début de cette nouvelle année (au 18 janvier 2015). En ces temps difficiles d’incertitude et de défiance, il n’est pas négligeable de rappeler que quelques milliers de bonnes volontés peuvent sauver tout un peuple et l’honneur d’un pays.
Des Français, d’un héroïsme modeste et exemplaire, ont risqué leur vie pour sauver des Juifs pendant l’occupation. Ces hommes et ces femmes ordinaires sont devenus des gens extraordinaires parce que leur ardeur au combat était d’une simplicité désarmante : dire NON.
Non au défaitisme vichyssois, non à la collaboration pétainiste, non au reniement des valeurs de la République.
Rendre honneur aux Justes c’est
« une belle preuve d’amour adressée aussi à la France »
La médaille des Justes à titre posthume a été remise à Simone Lorimier-Maurel qui a caché un enfant juif polonais, Armand Rafalovitch. Une grande émotion a submergé l’assistance lors de la cérémonie. Armand Rafalovitch, très ému, a raconté : «J’avais 4 ans. On a choisi la France car mon père était un ancien combattant de la guerre 14-18. Il existait à Toulouse une association qui aidait à cacher les enfants juifs. En 1944, à l’âge de 6 ans, on m’a envoyé dans le préventorium le Nid béarnais à Jurançon dirigé par Mme Simone Lorimier-Maurel. Elle a tout fait pour que personne ne sache que j’étais caché là. Personne n’a rien dit » (La Dépêche.fr, 17 janvier 2015).
Denise Baratz, institutrice à Caudecoste (Lot-et-Garonne), est une militante anti-nazi et une résistante active. Elle a caché pendant la guerre des enfants juifs et a permis d’échapper à un mort certaine toute une famille originaire de Neuss (région de Dusseldorf en Allemagne). En 1943, Denise aide Hélène Krako et ses trois enfants Edgar, Alice et Renée (âgée de quelques mois), en les protégeant dans son village natal de Lamagistère (Tarn-et-Garonne). Tout au long de sa carrière d’enseignante, Denise Baratz a toujours défendu l’école laïque et républicaine.
Nommée Juste parmi les Nations en 2009, elle a reçu l’année suivante, à près de 90 ans, la médaille d’officier de la Légion d’honneur pour le « remarquable parcours d’une femme héroïque et discrète » (Lionel Jospin). Madame Baratz vient de disparaître. D’elle on retiendra son « humanisme et le don de soi » (La Dépêche.fr, 16 décembre 2014).
Adélaïde et Jean-François Mailland-Mollard, employé du chemin de fer, viennent de recevoir, à titre posthume, la médaille et le diplôme de Justes parmi les Nations. Ils ont accueilli et caché deux sœurs juives, Eva et Rosa Lerner, dans leur village de Pugny-Chatenod près d’Aix-les-Bains. Venues spécialement d’Israël pour leur rendre hommage, Eva et Rosa ont exprimé leur profonde gratitude à l’égard de ‘’leur famille adoptive’’ dont elles ont salué « le comportement héroïque (…) [qui] nous permet d’être ici tous ensemble avec les membres de nos familles » (Le Dauphiné.com, 12 décembre 2014)
Hélène Duc est une jeune comédienne quand elle cache son ami Robert Marcy, juif alsacien, à Bergerac (Dordogne) chez elle, puis chez un couple d’instituteurs dans un petit village isolé. Elle sauve aussi les parents de Robert et sa sœur menacés d’arrestation à Montpellier. Le 23 février 2005, Yad Vashem a décerné à Hélène Duc et à sa mère Jeanne le titre de Justes parmi les Nations. La cérémonie a eu lieu en 2008. Cette grande actrice et résistante, est récemment décédée à l’âge de 97 ans (fin novembre 2014). Le président de la république, François Hollande, lui a rendu un vibrant hommage en précisant qu’elle a sauvé des dizaines d’enfants juifs du Périgord, aux côtés de sa mère institutrice.
Anne-Marie Mainemer, 20 ans, et sa petite sœur Rose-Marie, 13 ans, ont été cachées en 1943 à Avranches chez Henri et Madeleine Bitard. Le couple a reçu, à titre posthume, la médaille et le diplôme de Justes parmi les Nations à la mairie du Havre. Il y a en Normandie 2017 « non-juifs vertueux, œuvrant avec compassion et justice (…) Je suis fier de rendre hommage à ces héros ignorés » a souligné Pierre Osowiechi, vice-président du comité français pour Yad Vashem (Paris Normandie tv, 20 novembre 2014). Au cours de la cérémonie, le ministre israélien a rappelé que, dans le Talmud, il est écrit « celui qui sauve un être humain sauve l’humanité ».
Les insignes de chevalier de la Légion d’honneur ont été remis au Juste parmi les Nations Gérard Persillon, 94 ans, ancien commissaire de police dans l’Aude. Une jeune fille juive, Perla, a obtenu par ses soins de faux papiers d’identité pendant la seconde guerre mondiale. Protégée par la directrice du collège de Limoux, elle a ainsi évité la déportation. Perla a fait le voyage depuis les Etats-Unis pour remercier le vieux et digne monsieur. « Une belle preuve d’amour adressée aussi à la France » (La Depeche.fr, 25 octobre 2014).
La médaille des Justes parmi les Nations a été remise à titre posthume à Marthe et Lucien Viot, en présence d’Anne Héloin, sauvée par le couple. Durant la cérémonie empreinte d’émotion, Zvi Tal, ministre plénipotentiaire auprès de l’ambassade d’Israël à Paris, a salué ceux qui « ont brisé le silence en cette époque où beaucoup n’osaient pas agir » (Ouest-France 19 octobre 2014).
« Celui qui sauve un être humain sauve l’humanité »
Les époux Fourtier et la famille Schiari
ont reçu à titre posthume le
diplôme et la médaille de Justes parmi les Nations.
Les époux Fourtier, originaires de Courbouzon (Jura), ont sauvé Léonce Gintburger-Karcher. A partir de 1942, Léonce et sa mère Elise sont sous la protection du couple qui les prévenait en cas de danger (France 3 Franche-Comté, 19 octobre 2014). Rosine Schiari, originaire de Saint-Claude (Jura), a sauvé d’une mort certaine Mina Grobel venue de Pologne avec ses parents (déportés à Auschwitz). Pendant deux ans, Mina Grobel a été cachée avant de partir en Israël en 1946. Elle est décédée en 2001(Le progrès, 20 octobre 2014).
Le médecin et ancien maire d’Ayron (dans la Vienne), Raoul Désormeaux, décédé le 21 septembre 1960, a reçu, à titre posthume, la médaille des Justes parmi les Nations au cours d’une cérémonie émouvante en présence de nombreuses personnalités. Alors que les rafles se multipliaient au cours de l’été 1942, ce père de famille nombreuse n’a pas hésité à risquer sa vie en cachant dans son dispensaire Esther Bechler, sa fille Régine Hofman et ses trois petits- (Jean, Charlotte et Hélène). Alors que les enfants ont été évacués par un réseau de sauvetage, Régine et Esther se sont réfugiées au château d’Ayron, résidence secondaire du médecin. Elles y sont restées jusqu’à la fin de la guerre où la famille Hofman a, de nouveau, été réunie. “C’était un homme debout” ont souligné Charlotte et Hélène (Centre Presse, 22 septembre 2014). Le Dr Raoul Désormeaux fut Maire d’Ayron du 8 octobre 1944 au 4 juillet 1951.
« Ces hommes et ces femmes généreux et engagés ont fait preuve de Résistance, malgré les dangers encourus.» (Mémorial de la Shoah, Paris). Ce sont des héros Justes, juste des héros.
Jean-Paul Fhima
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