De tous temps,
et tout au long de la triste Histoire de l’Humanité,
le viol a été utilisé comme arme de guerre.
Les soldats, miliciens ou groupes armés en tous genres, victorieux comme en déroute, ont pratiqué le viol.
Mais quand j’ai vu le reportage « Congo, la paix violée » de Zoé Lamazou et Sarah Leduc, et lu les articles sur le viol systématique de fillettes, de garçonnets, et même maintenant de bébés en République Démocratique du Congo, j’ai pensé que le sommet de l’ignominie avait été atteint, et je me suis intéressée à l’historique de cette arme de destruction massive qu’est le viol.
Je n’ai pas la prétention qu’il soit exhaustif, tant la liste est longue et douloureuse, alors j’ai dû le réduire à ses grandes tragiques étapes contemporaines dont nous conservons l’histoire.
Le viol comme arme de guerre.
Ce n’est qu’à la suite de la Première Guerre Mondiale que le viol comme arme de guerre commença seulement de donner lieu à une importante documentation.
L’armée allemande l’avait utilisé à l’encontre des peuples belge et français, dans une stratégie de terreur.
Les japonais le pratiquèrent sur des milliers de femmes lors de leur invasion de la Chine, avec un point culminant d’atrocités commises à Nankin en 1937.
Le viol s’accompagna de mutilations, d’actes de barbarie et de contrainte à l’inceste.
Pendant la Seconde Guerre Mondiale, l’Armée allemande utilisa à nouveau le viol dans les pays conquis et occupés, et à des fins d’humiliation et de génocide sur les peuples considérés comme inférieurs.
Malgré l’interdiction de « souiller » le soit disant pur sang aryen, les soldats allemands ont aussi commis des viols collectifs et systématiques au sein des ghettos.
De même qu’ils avaient été pratiqués, lors des innombrables pogroms, par les cosaques et les ukrainiens dans les shtetls, les petites villes juives, et dans tous les pays d’Europe de l’Est antisémites, et cela pendant des décennies.
C’est ce qui fit fuir de nombreux juifs, dont entre autres, la famille de Golda Mabovitch, plus connue sous le nom de Golda Meir, pour la plus grande chance d’Israël.
Le viol par les armées de libération.
L’Armée rouge écrase la Wehrmacht et marche vers l’ouest, avec 22 millions de ses camarades morts derrière elle, et avec une seule idée en tête, les faire payer à l’Allemagne.
Si des milliers de prisonniers allemands ne reviendront pas de leur détention en URSS, c’est aussi environ deux millions d’allemandes qui seront violées par les soldats de l’Armée rouge.
Etaient-elles celles qui levaient le bras, pleuraient et tombaient en pâmoison au passage du Führer ?
Et même si c’était le cas, leur pitoyable aveuglement méritait-il pareille barbarie et que l’on violât jusqu’à des femmes âgées ?
Plusieurs textes affirment que les berlinoises considéraient les récits de viols par les soldats soviétiques dans les territoires occupés par eux, et surtout en Prusse-Orientale, comme de la propagande nazie, si bien qu’elles étaient mal préparées au danger qui les menaçait.
Moins connus sont les viols commis par l’Armée américaine en France en 1945, qui donnèrent lieu à de multiples condamnations à mort par pendaison par des cours martiales, principalement à l’encontre de G.I’s d’origine africaine, pendant que ceux d’origine européenne, tout autant coupables, étaient davantage épargnés.
Pour le seul mois de juin 1944, après le débarquement en Normandie, 175 soldats américains seront accusés de viol.
Le documentaire « GI’s, la face cachée des libérateurs » de Patrick Cabouat, s’inspirant de l’ouvrage du professeur américain J.Robert Lilly, interdit de publication aux USA, relate les viols et crimes commis en Angleterre, en France et en Allemagne par certains GI’s.
La création du Tribunal Pénal International.
Avant la création du Tribunal Pénal International, de nombreux conflits ou guerres civiles ont donné lieu à des violences sexuelles sans qu’aucun des responsables n’ait à répondre de ses actes.
Citons entre autres l’Algérie, le Bangladesh, le Burundi, la République Centre Africaine et le Liberia.
Ce n’est que dans les années 1990, que le viol à grande échelle au cours d’un conflit a été reconnu comme « arme de guerre » par les autorités internationales et jugé par le Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie institué en 1993, suite à la politique serbe d’épuration ethnique et de procréation à grande échelle en Bosnie-Herzégovine.
Suivront le Tribunal Pénal International pour le Rwanda en 1994, et le Tribunal spécial pour les crimes commis en Sierra Leone en 2002.
Le combat de Denis Mukwege.
Denis Mukwege est un gynécologue, obstétricien et militant des droits de l’homme congolais.
Formé en médecine au Burundi, il a étudié la gynécologie à Angers à la faveur d’une bourse.
Alors qu’il aurait pu tranquillement exercer à l’étranger, puisqu’il a pratiqué en France, il a choisi de retourner au Congo et de soigner les femmes victimes de viols et de mutilations.
Il alerte les ONG, la Maison Blanche, le Conseil de l’Europe et les chancelleries.
Il s’exprime à la tribune de l’ONU et brandit des chiffres, des photos et des témoignages.
De nombreuses fois récompensé et décoré, il a reçu le prix Sakharov le 26 novembre 2014 au Parlement européen à Strasbourg.
Il soigne chaque année plus de 3 500 femmes violées et mutilées par des hommes en armes qui se disputent la région et les minerais qu’elle contient, et a échappé à six attentats, dont un qui a coûté la vie à un de ses proches.
Il affronte ce qu’il croit être le summum de l’horreur : des femmes violées et mutilées par plusieurs hommes devant leurs familles, les vagins lacérés, brûlés, emplis de bris de verre ou détruits par arme à feu.
Triple peine pour ces malheureuses : traumatisme, stigmatisation au sein de leur communauté, et possible contamination au VIH.
Plus de 40 000 femmes violées ont été opérées à l’hôpital de Panzi de Bukavu où le docteur prodigue ses soins, sur les 500 000 victimes répertoriées en République Démocratique du Congo depuis 1996.
Mais Denis Mukwege n’en a pas fini
de découvrir l’horreur.
Car depuis peu, ce sont des bébés qui ont été violés qu’il voit arriver.
Dans le reportage « Congo, la paix violée » de Zoé Lamazou et Sarah Leduc, un médecin français qui se rend régulièrement en République Démocratique du Congo, déclare avoir été horrifié par l’arrivée d’une petite fille de 18 mois qui avait été violée par une vingtaine de soldats et dont les organes étaient descendus.
Neuf bébés sont arrivés dans le même état depuis janvier, et 36 enfants de moins de 10 ans.
« Je n’avais pas encore vu ça » déclare Denis Mukwege.
Le problème est que ce phénomène monstrueux de s’en prendre aux enfants en bas âge et aux bébés risque de ne pas se limiter à la République Démocratique du Congo et à la Somalie où il sévit actuellement, mais d’atteindre d’autres pays comme la Syrie et l’Irak où Daesh, l’organisation terroriste, a déjà réduit en esclavage au moins 1500 femmes et adolescents.
« Je vous en supplie : ne nous laissez pas tomber ! » crie Denis Mukwege, ce qui fait écho à la déclaration de la Représentante spéciale chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, Mme Zainab Hawa Bangura de la Sierra Leone, qui déclare : « La violence sexuelle dans les conflits doit être traitée comme un crime de guerre : cela ne peut plus être considéré comme un dommage collatéral malheureux de la guerre. »
L’hôpital de Panzi taxé lourdement
sous prétexte de fraude fiscale.
Faute de pouvoir supprimer le docteur Mukwege, maintenant qu’il est internationalement reconnu et honoré, les autorités de Kinshasa accusent l’hôpital de Panzi de fraude fiscale par le biais de Felix Kabange Numbi, ministre de la santé, et surtout petit couteau de Joseph Kabila.
La Belgique a appelé le gouvernement congolais à renoncer à cette taxation non seulement injustifiée, mais qui de plus, menaçait les soins et le travail du docteur Mukwege auprès des femmes et enfants victimes de viol.
Nous aimerions bien entendre aussi la voix de la France le soutenir.
Pascale Davidovicz
Sources : liberation.fr, lexpress.fr, lemonde.fr, un.org/fr, courrierinternational.com,
histoire-en-questions.fr, rfi.fr « Quand le viol devient arme de guerre » Anne Dupierreux, blogs.mediapart.fr
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