Malgré l’opération « Bordure protectrice », l’année s’achève par un regain de tensions à Gaza. A la frontière nord, la situation parait davantage sous contrôle, mais l’État islamique et le Hezbollah menacent Israël. Quels sont les risques d’embrasement en Cisjordanie? Quid de l’Iran ?
Tour d’horizon
des prévisions sécuritaires en 2015
Les djihadistes aux portes d’Israël
Étant donné la poursuite des combats dans la province de Quneitra, la frontière israélo-syrienne reste explosive et les risques de débordement en territoire israélien découlent d’une combinaison de facteurs. La première raison est la présence croissante du Front al Nosra et d’autres éléments djihadistes au sud du plateau du Golan. Leur objectif est de disposer d’une nouvelle base-arrière près de la Jordanie et de contrôler le principal axe routier menant du Golan au sud de Damas. Les forces du régime d’Assad ont été défaites et ne tiennent plus qu’une petite poche de résistance dans le secteur et privilégient un repli défensif autour de la capitale. Quand les groupes djihadistes auront assis leur présence sur le Golan syrien, ils pourraient être tentés de mener des attaques frontalières contre Israël.
Risque : moyen à élevé.
Conflit avec le Hezbollah ?
Depuis la guerre de 2006, l’organisation du puissant cheick Hassan Nasrallah a sagement évité une nouvelle confrontation armée avec Israël, tout en s’efforçant de viser ses intérêts à l’étranger, en particulier ses représentations diplomatiques et les touristes israéliens – comme à Burgas, en 2012. Le « parti de Dieu » a aussi bâti une force militaire aussi redoutable que dissuasive. L’Aman, les renseignements militaires de Tsahal, évalue les capacités du Hezbollah à près de 100.000 roquettes et missiles capables d’atteindre n’importe quel point du territoire israélien. Ses missiles de longue portée sont aujourd’hui stockés au cœur de Beyrouth. A la faveur d’un système à guidage GPS et d’une charge explosive de 700 kg pour certains, ces projectiles peuvent causer des dégâts considérables dans l’arrière-front israélien. Ce rapport de forces donne l’impression d’un équilibre de la terreur avec le Hezbollah qui, du fait de son engagement en Syrie, ne préfère pas ouvrir de deuxième front contre Israël. En 2014, la situation a néanmoins changé. Après l’attaque d’un dépôt d’armes de l’organisation chiite dans la Bekaa, au cœur du territoire libanais, Nasrallah a déterré la hache de guerre. Plusieurs attaques frontalières ont été menées dans le secteur des fermes de Shebaa et des tirs de roquettes ont visé le Plateau du Golan.
En cas d’escalade, la situation pourrait rapidement dégénérer. Comme le Hamas à Gaza, le Hezbollah pourrait être tenté de mener des incursions meurtrières en Galilée, à la faveur de tunnels et d’une plus grande expérience du combat acquise en Syrie. Nul doute aussi qu’il cherchera d’emblée à paralyser les ports et aéroports d’Israël en tirant des milliers de roquettes dans les premières heures du conflit. Pour éviter un scénario catastrophe, Tsahal devra opérer rapidement au niveau aérien et surtout terrestre par l’invasion du Sud-Liban. La guerre, si elle a lieu, devra être courte. La nomination du général Gadi Eizenkot comme nouveau chef d’état-major de Tsahal, considéré comme un dur, pourrait néanmoins calmer les éventuelles ardeurs du Hezbollah.
Risque : moyen
En Cisjordanie, pas d’Intifada, mais des attentats
En 2014, la Cisjordanie et les quartiers de Jérusalem-Est sont passés proche d’un embrasement à deux reprises, au début et la fin de l’été dernier. Tant que l’Autorité palestinienne restera stable et sous perfusion internationale, les risques de soulèvement sont quasi inexistants. D’autant que les forces de sécurité du président Abbas continuent de traquer les militants du Hamas par crainte d’un coup de force comme à Gaza. L’emprise du mouvement islamiste palestinien reste néanmoins importante dans certains secteurs comme Hébron et des attentats anti-israéliens ne sont pas à exclure autour des implantations juives. A Jérusalem aussi, le Hamas pourrait de nouveau alimenter les tensions autour du Mont du Temple. Jusqu’ici, ses tentatives ont échoué et la police israélienne a su rapidement contenir les émeutes dans la partie est de la ville sainte. Mais aujourd’hui, la plus grande menace pour le Shabak est posée par des « loups solitaires » palestiniens qui agissent sans infrastructure et ne sont rattachés à aucune organisation terroriste.
Risque d’une Intifada : faible
Risque d’attentat : élevé
Gaza : à quitte ou double
Rien n’a été réglé à Gaza depuis qu’un cessez-le-feu a été instauré avec le Hamas, le 27 août dernier. A première vue, il est peu probable que le mouvement islamiste – affaibli militairement par l’opération « bordure protectrice » et qui doit désormais face au blocus égyptien – s’aventure dans une nouvelle escalade avec Israël. Reste que cette analyse rationnelle se heurte à la situation humanitaire dans la bande de Gaza. Les milliards de dollars promis par la communauté internationale en septembre ne sont toujours pas parvenus à l’Autorité palestinienne, tandis qu’Israël bloque pour l’instant les matériaux de construction pour rebâtir Gaza. Le Hamas, littéralement asphyxié, pourrait être tenté par un réchauffement frontalier et possède encore suffisamment de roquettes pour imposer une petite guerre d’usure à la population du sud d’Israël. Il faudra cependant observer l’attitude du Qatar qui, à la faveur d’un rapprochement stratégique avec l’Egypte, pourrait progressivement cesser de financer le Hamas. A l’inverse, l’Iran cherche aujourd’hui à prendre le relais.
Risque d’une escalade :
faible à modéré
Vers l’Iran nucléaire ?
La question d’une attaque israélienne contre la République islamique devrait revenir d’actualité au printemps 2015. La période à venir s’annonce cruciale. Juillet permettra (ou non) aux grandes puissances et à l’Iran d’entériner l’accord intérimaire conclu l’an passé et pourrait conduire à une levée des sanctions. Dans tous les cas de figure, il appartiendra au gouvernement israélien et à moindres mesures, à l’Arabie Saoudite et aux monarchies du Golfe, de valider cet accord. Reste que l’éventualité d’une frappe israélienne contre les infrastructures nucléaires de Téhéran sera irrecevable par la communauté internationale si cette dernière venait d’arriver à un compromis historique. Autre facteur : le possible départ de Benyamin Netanyahou à l’issue des élections anticipées de mars prochain. S’il n’était plus premier ministre, quel homme ou femme politique israélienne serait capable de faire de l’Iran son fer de lance sur la scène diplomatique ?
Probabilité d’une attaque : faible
Maxime Pérez
Poster un Commentaire