Haïm Korsia : le rôle des femmes, le guett, "pour un judaïsme de la joie"

« L’ouverture n’est pas un slogan, c’est une nécessité »: malgré un été « très lourd » sur le front de l’antisémitisme, le grand rabbin de France Haïm Korsia assure que ses réformes avancent, notamment sur la place des femmes dans le judaïsme et le divorce religieux.
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Dans son bureau du Consistoire, le nouveau chef religieux de la première communauté juive d’Europe (500.000 à 600.000 membres) évoque ses premières décisions, entre deux déplacements en province pour répondre aux
sollicitations, nombreuses.
« Il ne faut pas laisser les communautés dans une inquiétude et une solitude qu’elles ne ressentent parfois que trop », confie ce rabbin orthodoxe au profil moderne de 51 ans, élu le 22 juin pour sept ans.
L’été a été « très lourd » sur le plan des incidents à caractère antisémite, souligne Haïm Korsia. Quant aux chiffres de l’aliyah, qui placent la France pour la première fois en tête des pays d’émigration vers Israël avec 5.500
départs estimés en 2014, ils « ne sont pas inquiétants en eux-mêmes, ce sont les motivations qui peuvent inquiéter », ajoute-t-il.
« Il y a des endroits où il devient difficile de vivre quand vous revendiquez votre judaïsme », relève le grand rabbin, qui évoque aussi des « transferts de population » juive en France, en particulier de la banlieue nord de Paris vers l’Ouest parisien.
Les départs de France sont aussi, à ses yeux, « un appel pour nous à aller chercher des juifs qui ne sont pas sentis bien reçus » dans les institutions consistoriales et les ont délaissées.
D’où la nomination en juillet – c’était une promesse de campagne – de deux médiateurs. « Ça marche », se félicite Haïm Korsia, relevant que ces personnalités peuvent être saisies par toute personne qui ne se sent « pas
suffisamment comprise ou écoutée » par le Consistoire.

LES MÉDIATEURS :  UN HOMME, UNE FEMME

Les médiateurs sont un homme, Charles Sulman, et une femme, Dolly Touitou.

Le grand rabbin fait de cette parité un symbole. « Je trouve normal que les femmes s’investissent dans la vie du judaïsme, comme je trouve normal qu’elles pratiquent l’étude de la Torah. Ce n’est pas une question pour moi, c’est
l’évidence. »

Un scandale concernant un cas de divorce religieux avait jeté une lumière crue, au printemps, sur la place de la femme dans le judaïsme orthodoxe. Des rabbins du Consistoire avaient été accusés d’avoir fermé les yeux sur un
chantage financier au détriment de l’épouse, dans le cadre d’une remise de « guett », ce document que seul l’époux peut délivrer à la femme pour la libérer de son mariage.

« Les rabbins n’ont pas vocation à régler des questions financières entre les ex-époux, ça c’est le travail des avocats », a martelé le grand rabbin.

« J’ai réuni le Conseil supérieur rabbinique, j’ai rappelé les règles de fonctionnement et on en a édicté deux, trois autres », a-t-il poursuivi, assurant que ce dispositif permettra de « sécuriser, flécher le parcours » menant à la remise du « guett ».

Quant au dialogue avec les tendances du judaïsme non représentées au Consistoire (des libéraux et massortis aux ultra-orthodoxes), il est entamé, souligne-t-il. « Je discute avec et vois tout le monde. Il y a assez d’antisémites comme ça pour l’être nous-mêmes à l’intérieur de la communauté! »
Le chef religieux voit des raisons d’être optimiste. « Il y a une partie de la communauté, oui, qui se pose des questions. Mais il y en a une autre qui se réunit pour faire face et faire bloc. Les écoles (juives), les synagogues, les
restaurants (casher) sont pleins », relève-t-il, y voyant un « besoin de sens ».
Et ce petit homme affable de plaider pour un « judaïsme de la joie » tout en souhaitant, à l’approche du Nouvel An juif, le soir du 24 septembre, « une bonne et heureuse année à l’ensemble de la société française, pour qu’on
retrouve, tous, la force d’espérer.
 Benoit FAUCHET pour  AFP

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