Le rapt de trois adolescents israéliens par des « loups solitaires » du Hamas et l’opération déclenchée depuis par l’armée israélienne ont tué dans l’œuf la réconciliation inter palestinienne. Mais qui avait un intérêt à la saboter ?
La traque israélienne en Cisjordanie porte désormais deux noms : Marwane Kawasme, 29 ans, et Amer Abu Aïshe, 32 ans. Ces Palestiniens de Hébron, affiliés au Hamas, sont déjà passés par les geôles israéliennes. Il y a quelques mois, les services de sécurité du Shabak les avaient interrogé dans le cadre d’une enquête sur des attentats anti-israéliens en préparation. Depuis l’âge de 18 ans, Marwan Kawasme a été arrêté puis relâché à quatre reprises. A sa charge, l’enrôlement et l’entrainement de plusieurs cellules terroristes à Hébron, ainsi que l’achat d’explosifs. Amer Abu Aïshé, coiffeur de profession, est fiché depuis plusieurs années comme un membre de la branche armée du Hamas. Son frère avait été tué en 2005 en jetant une bombe sur une patrouille israélienne, en Cisjordanie.
Les familles Kawasme et Abu Aish sont deux puissantes familles de Hébron, connues pour leur lien avec le mouvement islamiste palestinien. Interrogés par la chaine i24news, elles ont admis que leurs deux fils avaient mystérieusement disparu quelques heures avant le rapt des trois jeunes adolescents israéliens, Eyal, Neftali et Gil-ad, sur une route du Goush Etzion. D’après l’enquête, Marwane Kawasme et Amer Abu Aishe auraient utilisé des infrastructures existantes du Hamas à Hébron pour mener à bien leur opération.
POUR QUI ONT ILS AGI ?
Ces informations permettent de comprendre pourquoi Benyamin Netanyahou, le premier ministre israélien, s’est empressé d’associer le Hamas au kidnapping. Mais elles ne disent pas qui l’a commandité. Selon toute vraisemblance, il ne s’agit pas de la direction du mouvement islamiste palestinien à Gaza, isolée sur la scène internationale et qui venait d’approuver la formation d’un gouvernement palestinien de consensus. Ce dernier a pour seul mandat de préparer des élections générales en Cisjordanie et dans la bande de Gaza d’ici la fin de l’année ; autant dire qu’il offre au Hamas l’opportunité de reprendre le pouvoir à son rival, Mahmoud Abbas. Dans ces conditions, et même s’il encourage la capture d’Israéliens, l’organisation islamiste n’avait aucun intérêt à entrer dans le collimateur d’Israël. Désormais, avec plus de 300 arrestations dans ces rangs en quinze jours, elle voit son avenir politique en Cisjordanie fortement compromis.
Mais au sein du Hamas, les divisions sont nombreuses. La direction extérieure du mouvement fonctionne de façon autonome et dispose d’une certaine influence dans les territoires palestiniens. D’après les enquêteurs israéliens, deux personnalités pourraient avoir un lien direct avec l’enlèvement du 12 juin.
KHALED MECHAAL
SALAH Al-AROURI
Le premier est connu : il se nomme Khaled Mechaal, le chef du bureau politique du Hamas à l’étranger, récemment exilé de Damas au Qatar. Depuis le début de la crise, il a non seulement salué le kidnapping, mais se montre ambigu quant à l’implication d’éventuels membres du Hamas.
Le second suspect réside en Turquie. Salah al-Arouri serait l’un des cerveaux de nombreuses attaques anti-israéliennes menées ces dernières années. Il aurait spécifiquement financé des cellules du Hamas dans le but d’enlever des Israéliens. En outre, al-Arouri aurait signé plusieurs missives appelant les sympathisants du mouvement islamiste à commettre des enlèvements. Celles-ci ont été retrouvées lors de perquisitions menées à son domicile, en Cisjordanie, jusqu’avant que les bulldozers ne le réduisent à un amas de pierres. Coïncidence ou pas, Khaled Mechaal et Salah al-Arouri s’étaient tous deux opposés à la réconciliation avec le Fatah. Ils ont désormais une autre raison d’être satisfaits.
par Maxime Perez
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