Un couple israélien de Tel Aviv d’une cinquantaine d’années et une autre personne, employée du musée, ont été tuées samedi 24 mai vers 16 heures près du Musée juif de Bruxelles. Une quatrième personne a été hospitalisée dans un état grave au service des soins intensifs de l’hôpital Saint-Pierre à Bruxelles. D’après le quotidien Le Soir, douze autres personnes choquées ont également été prises en charge par les secours. Les images du tueur filmé dans le musée vont être diffusées dans les médias.
Les témoins confirment que d’une voiture de marque Audi garée en double file devant le musée, deux hommes sont sortis, et qu’une fois à l’intérieur du musée, l’un d’eux a brandi une arme de son sac à dos et a ouvert le feu avant de s’enfuir. Selon La libre Belgique, un suspect a été interpellé. « Mais rien n’indique encore s’il s’agit de l’auteur des coups de feu ».
« Rue des Minimes à Bruxelles, la mort a frappé au grand jour, en pleine affluence touristique, dans un quartier de cafés, de terrasses, de musées et de ministères, tout près de la Place Royale. » (Le Figaro, 25 mai).
Les autorités belges craignent une réplique de la série d’attentats perpétrés par le jihadiste Mohamed Merah, qui avait fait sept morts à Toulouse et à Montauban entre le 11 et le 19 mars 2012.
La ministre belge de l’Intérieur, Joëlle Milquet, s’est déplacée au Musée Juif de Belgique. «Tout porte à croire qu’il s’agit d’un attentat antisémite», a-t-elle déclaré. Ce que confirme Yvan Mayeur, le bourgmestre de Bruxelles.
Pour le président de la Ligue belge contre l’antisémitisme (LBCA) Joël Rubinfeld « cela devait hélas arriver. C’est le résultat inévitable d’un climat qui distille la haine. Nous assistons ces dernières années à une libération de la parole antisémite. Elle reprend du poil de la bête, notamment à travers les discours de l’humoriste Dieudonné ou du député Laurent Louis. »
Pour Philippe Markiewicz, président de la Communauté israélite de Bruxelles, il y a longtemps qu’un attentat est redouté. « Malgré le drame survenu, et en particulier à la veille d’élections, tous les citoyens de ce pays doivent rester vigilants dans la défense de nos valeurs démocratiques qui nous unissent tous. Il ne faut pas céder à la violence, mais avancer pour défendre la démocratie. »
Pour Julien Klener, président du Consistoire central israélite de Belgique « C’est tout un ensemble d’émotions qui nous submerge, avec une dominante d’horreur et de tristesse ».
Pour Maurice Sosnowski, président du Comité de Coordination des Organisations Juives de Belgique (CCOJB) : « Ce n’est pas un hasard. Cet attentat se déroule la veille d’une élection, dans un lieu de la mémoire de la communauté juive mais dont la protection est moindre que d’autres lieux comme les écoles. Cet attentat est très inquiétant, la communauté juive est sous menace constante en Europe et en Belgique.»
Le président du Congrès juif mondial, Ronald S. Lauder, a fermement condamné, dans un communiqué, « l’acte haineux et terroriste » et a demandé aux autorités européennes de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité sur tous les lieux liés aux intérêts juifs ». Pour qu’une telle tragédie ne se reproduise plus, il faut, a-t-il ajouté, augmenter le niveau de sécurité sur tous les sites liés aux intérêts juifs. « Dans le cas contraire, d’autres personnes auront encore tout le loisir de commettre de tels crimes » a conclu M. Lauder.
Les présidents du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) et de l’Union des étudiants juifs de France (UEFJ) ont confirmé qu’il s’agit une fois de plus de la concrétisation sordide et abominable « de transformation de la haine antisémite en terrorisme systématique », ce que confirme de son côté Benjamin Netanyahu qui a dit voir dans cette fusillade au Musée juif de Bruxelles « le résultat de l’incitation à la haine permanente contre les Juifs et Israël ». Le Premier ministre israélien a salué par ailleurs la condamnation très ferme du pape en visite actuellement au Proche-Orient.
François Hollande a condamné « avec la plus grande force cette tuerie effroyable ».
Ainsi la haine n’a plus de limite et n’a peur de rien, ce qui est par excellence la méthode et le but recherché par les auteurs de ces actes de terrorisme : faire peur, répandre le trouble et le sentiment d’insécurité, particulièrement au sein de la communauté juive d’Europe.
Le message est double : aux Juifs il dit « partez d’Europe, votre seule présence est une forme de résistance insupportable à nos objectifs politiques et religieux ; aux Européens, il dit « attention, rien ne saurait nous intimider, ni vos lois, ni votre police, ni vos droits d’égalité et de respect de la personne. Nous créons la peur car seule celle-ci est le terreau de notre pouvoir ».
Le terrorisme antijuif et antisioniste est en train de gagner.
Si on se reporte au récent sondage organisé par Siona et JForum sur l’antisémitisme en France en 2014, effectué à partir d’un échantillonnage de 3833 personnes sur la base de 16 questions posées par internet du 17 avril au 16 mai 2014 :
- 74,2% des personnes interrogées envisagent de quitter la France, dont 29,9% pour cause d’antisémitisme et presque autant (24,4%) pour préserver leur identité juive, reconnaissant implicitement que celle-ci est menacée.
- 92,2% de ces personnes considèrent que l’antisémitisme est très inquiétant dans notre pays ; 76,3% sont inquiets quant aux attaques des fondements mêmes du judaïsme et 93% considèrent que les moyens mis en œuvre pour lutter contre ces actes de haine contre notre communauté sont inefficaces ou peu efficaces, en grande partie à cause de la désinformation des médias concernant le conflit israélo-palestinien (93,4%) et de la propagande islamo-intégriste et pro-palestinienne (93%).
Siona recevait le 18 mars dernier dans ses locaux parisiens, Ariel Kandel, directeur général de l’agence juive. Roger Pinto, président de Siona, faisait état à cette occasion, d’un afflux des demandes de départ des Juifs de France pour Israël et regrettait les délais trop longs et les procédures fastidieuses pour s’y installer. Ce qui constitue, a rappelé monsieur Pinto, « un défi commun à relever ».
A cette question de Roger Pinto, monsieur Kandel a répondu longuement, dans un exposé clair et précis.
En France, a précisé d’emblée monsieur Kandel, il existe de nombreuses raisons de s’installer en Israël : l’antisémitisme grandissant bien sûr, mais aussi la crise économique et l’attrait pour un pays en pleine croissance. En 2012, 1907 juifs français ont fait leur Alyah. Ils étaient 3300 en 2013. Ils devraient être entre 5 et 6 000 en 2014. « Cet afflux numérique n’était pas prévisible (…) ce qui explique que l’Agence est submergée depuis septembre-octobre derniers, et répond dans la mesure de son possible ». Le temps d’attente pour obtenir un rendez-vous est de trois semaines en moyenne, délai somme toute raisonnable.
Monsieur Kandel a ajouté que L’Alyah ne s’improvise pas. C’est une procédure qui peut prendre, en effet, plusieurs mois selon les cas de chacun. C’est aussi un projet personnel et familial qui se prépare. L’Agence juive insiste sur la nécessité de s’interroger sur sa relation à Israël et aux moyens que chacun se donne pour s’intégrer au pays, comme trouver rapidement un travail, parler l’hébreu, y résider plusieurs mois par an. Les jeunes sont privilégiés car leurs capacités d’adaptation sont porteuses de succès et d’avenir.
L’avenir des Juifs de France est … en France.
Faut-il céder au sauve-qui-peut général et à la peur habilement organisée par ces actes de terrorisme en France et en Europe ? Les Juifs doivent manifester leur colère mais garder à l’esprit que c’est notre présence qui dérange et que c’est précisément notre détermination à défendre ici même les valeurs de la communauté comme celles de la République qui permettront de faire reculer les dangers et les menaces insupportables qui pèsent sur l’avenir de tous les Européens.
Une manifestation se tiendra devant l’Ambassade de Bruxelles, au 9 rue de Tilsit, 75017 Paris Dimanche 25 mai à 18h00 en hommage aux victimes et en soutien aux familles.
Une belle façon de dire non. Non à la peur, non à la défaite de nos valeurs et de nos libertés.
Jean-Paul Fhima
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