L’annonce du déploiement d’une batterie antimissile Patriot pour protéger la station balnéaire du Néguev n’est liée à aucune escalade. Mais elle suggère que le haut commandement de Tsahal s’y prépare.
La ville d’Eilat, au sud d’Israël, est désormais protégée par deux batteries antimissiles : le système Dôme de Fer, stationné de façon plus ou moins permanente pour répondre aux tirs de roquettes venant de la péninsule du Sinaï, et désormais une batterie Patriot (PAC-2, Patriot Advanced Capability) qui vient remplacer les missiles antiaériens Hawk, toujours opérationnels mais jugés vieillissants.
Le système Patriot est connu pour son utilisation plus ou moins efficace contre les missiles « Scud », lors de la guerre du Golfe, en 1991 – 40% de taux d’interception selon les données officielles du Pentagone. Depuis, il a subi de nombreuses améliorations. Le PAC-2 est aujourd’hui équipé du GEM, un missile à guidage avancé qui augmente considérablement les capacités d’interception du système face aux vecteurs balistiques, aux drones et aux avions de chasse.
Une batterie de PAC-2 est composée de huit lanceurs montés sur remorques et renfermant chacun quatre missiles, d’un radar également mobile et d’une station de contrôle installée à bord d’un camion. Alerté par un satellite du lancement d’un missile adverse, le radar de la batterie repère et identifie aussitôt la cible, puis transmet ses données télématiques à la station de contrôle où un ordinateur calcule le point d’impact et le moment précis du déclenchement du missile « Patriot ». Depuis Eilat, le rayon d’action du système inclut le désert du Sinaï, mais aussi la mer Rouge et le nord de l’Arabie Saoudite.
Ce déploiement a de quoi surprendre au regard de la seule menace djihadiste venant de la péninsule égyptienne. De l’avis des renseignements militaires israéliens, l’arsenal des groupuscules pro al-qaïda qui y sévissent depuis la chute d’Hosni Moubarak se limite à des roquettes Grad et Katyoucha de courte portée. Techniquement, le seul système Dôme de fer est donc à même de neutraliser ces projectiles.
Plusieurs déductions s’imposent. La première semble évidente : les autorités israéliennes estiment qu’il est primordial d’assurer la défense hermétique d’une ville de l’envergure d’Eilat, l’un des poumons touristiques d’Israël qui, cette année, bat des records d’affluence et génère d’importants revenus financiers dans le secteur hôtelier. La seconde est dissuasive : en déployant une batterie de missiles Patriot à la pointe de la technologie, l’Etat hébreu transmet le message qu’il sera difficile de porter atteinte à son territoire.
Mais la confusion nait précisément de ce point. En montrant qu’Eilat est une localité solidement défendue, les responsables israéliens en font une cible légitime pour des organisations terroristes qui rêvent de prouver que ce bouclier antimissile a des failles. Ce plan a d’ailleurs été une première fois déjoué. Les 40 missiles M-302 de fabrication syrienne arraisonnés en mer Rouge au mois de mars par la Shayetet 13 auraient assurément donné du fil à retordre à la défense antimissile israélienne. D’autre part, après une série d’escarmouches frontalières, le Hezbollah libanais a réitéré sa menace de frapper l’Etat hébreu en tout point. En cas d’escalade avec le mouvement chiite, ce dernier pourrait décider de viser Eilat. Pour la première fois.
MAXIME PEREZ
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