Très attendue, l’exposition « Les Mondes de Gotlib », rassemble,
pour les 80 ans de l’artiste, un des génies de la bande dessinée,
plus de 150 planches originales publiées mais jamais exposées,
ainsi que des archives photographiques,
écrites et audiovisuelles.
L’ensemble de la vie et la carrière de Gotlib y est présenté chronologiquement.
Son enfance, les années Pilote, la création de « Fluide Glacial », mais aussi son rapport avec le judaïsme et ses divers engagements
Né a Paris le 14 juillet 1934, dans une famille juive Hongroise, Marcel Gotlib pour échapper a la persécution antisémite dans la France occupée, devient un enfant cache. Son père déporté est assassiné a Buchenwald, en février 1945.
Dans son œuvre, où il a majoritairement abordé des sujets comiques, Marcel Gotlib a rarement évoqué sa judéité et les drames qui se sont produits autour de lui pendant la Seconde Guerre mondiale. Il n’en parle que deux fois dans La Coulpe et Chanson aigre-douce. Pour se protéger des coups du destin, l’auto-dérision et l’humour lui ont permis d’exorciser ses démons.
Cette rétrospective fera converser l’artiste, le juif athée et l’anticonformiste.
On lui doit des histoires hilarantes tel que Gai Luron, La Rubrique à Brac ou encore Pervers Pépère. Au cours d’un parcours fouille et décortique, vous plongerez dans l’univers délirant, chef d’œuvre d’enfantillage et d’auto psychanalyse qui révolutionna la bande dessinée.
Mais c’est avec la Rubrique-à-brac que son talent donna toute sa mesure. Dans ces histoires qui, le plus souvent, ne dépassent pas deux planches, Gotlib a le goût pour la parodie et le pastiche.
Inconditionnel de la liberté d’expression, son style est toujours d’actualité, ses blagues toujours aussi drôles.
Pourtant, Gotlib n’a jamais reçu de véritable formation artistique, il a seulement suivi des cours du soir des Arts Appliques.
Gotlib se pose en observateur du monde et place le lecteur face aux excès de l’homme, être mélancolique et fragile, souvent pris aux pièges de ses désirs et de ses instincts.
Dans ses thèmes de prédilection, on retrouve inlassablement l’enfance et le monde de l’école. Les personnages de Gotlib ont tous quelque chose d’excentrique.
«L’humour est ce qu’il y a de plus important après le foie gras»
Gotlib
Ce qui m’intéresse chez lui confie Anne Hélène Hoog, la commissaire de l’exposition, c’est ce travail sur la matière et la mémoire, c’est quelqu’un de très cultive, d’une grande sensibilité qui possède un sens aigu de la justice.
Ce qui fait sa force, c’est le lettrage.
La précision de son lettrage fait exprimer aux lettres toute leur puissance. Il en cherche et extrait le sens de leurs replis et leur attribue un espace. Amoureux de la lettre, il est habite par l’idée juive que chaque lettre est un monde dont le sens est caché.
Il a le verbe choisi, une plume parfaitement ciselée, et un coup de crayon magistral.
Au fil de l’exposition, on croisera ses maîtres (René Goscinny, Harvey Kurtzman, André Franquin et les Marx Brothers) ainsi que ses complices (Alexis, Fred, Reiser, Mandryka, Bretécher, Lob, Solé, Patrice Leconte et les Monty Python…)
A la fin du parcours, nous découvrons la Une de Pilote d’avril 1973 consacrée a Hitler. Hitler, le Führer qui fait fureur. En 1973, une étude on ne peut plus sérieuse avait établi qu’un journal ou magazine qui plaçait le portrait d’Hitler en couverture voyait ses ventes augmenter de 10 %.
Bien entendu, Pilote s’en était emparé, indiquant : « Bien que parfois surpris par les choses qui sont “dans le vent” et qui, en l’occurence ont plutôt tendance à rendre ce vent légèrement fétide, nous nous sommes dit que c’était toujours bon à prendre
».Gotlib réagit vivement, il est révolte par la manière dont les auteurs traitent Hitler « On fait pas de l’esprit sur Hitler, on l’écrase on l’écrabouille »
En cadeau d’anniversaire, les deux plus grands magazines de la bande dessinée, Pilote (qui renaît pour l’occasion) et Fluide Glacial se sont associés pour éditer un numéro exceptionnel consacre a Marcel Gotlib a travers 120 pages d’humour fin et sophistique, entrecoupées de quelques textes faisant l’exégèse de la pensée gotlibienne.
Marcel Gotlib a marqué à jamais de son sceau le monde de la bande dessinée. Il est Incontournable.
L’exposition s’adresse également aux enfants a partir de 8 ans. Un espace spécifique proposant des activités ludiques leur est réservé.
Jusqu’au 27 juillet
Musée d’art et d’histoire du judaïsme
71, rue du Temple
Paris 3eme
Jusqu’au 27 juillet 2014.
Sylvie Bensaid
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