Eliyahu Hanabi, une grande synagogue d »Alexandrie, fait peau neuve

Le ministère des Antiquités vient de lancer un projet de restauration de la synagogue d’Eliyahu Hanabi, l’une des plus importantes d’Alexandrie, située au centre-ville. 

Fermée il y a deux ans, la synagogue d’Eliyahu Hanabi sera finalement res­taurée par le ministère des Antiquités. Située dans la rue d’Al-Nabi Daniel, l’une des anciennes rues du quartier de Mahattet Al-Raml au centre-ville d’Alexandrie, cette synagogue a été construite il y a plus de 150 ans, afin que la communauté juive d’Alexandrie puisse pratiquer ses rituels religieux librement. « Eliyahu Hanabi a été le témoin de la vie des juifs d’Alexandrie et d’Egypte tout entière avant de fer­mer ses portes à cause de l’affaisse­ment d’une grande partie du pla­fond »explique Mohamad Metwalli, directeur des monuments islamiques, coptes et juifs d’Alexandrie. Il ajoute que ce sont les deux grandes entre­prises égyptiennes de construction Orascom et Al-Moqaouloun Al-Arab (les entrepreneurs arabes) qui ont commencé, il y a quelques semaines, la restauration de la synagogue. « Les travaux comportent la consoli­dation du plafond et des murs, la restauration architecturale de l’em­placement avec les colonnes et les fenêtres en bois ainsi que la restau­ration minutieuse des décorations, comme les gravures et les peintures qui ornent les murs. Même le jardin sera nettoyé et replanifié », ajoute Metwalli.

Ces travaux qui ont lieu sous la supervision des archéologues et des experts du ministère des Antiquités devraient s’achever dans huit mois avec un financement de 100 millions de L.E.

Selon le directeur des monuments islamiques, coptes et juifs d’Alexan­drie, bien que l’article 30 de la loi n°117 de l’année 1983 relative à la protection des monuments stipule que la communauté juive assume elle-même les coûts de la restaura­tion, le gouvernement égyptien a récemment décidé de payer la res­tauration de la synagogue, inscrite sur la liste du patrimoine depuis 1987.

Une longue histoire

Construite à l’origine en 1354 pour accueillir plus de 700 per­sonnes, Eliyahu Hanabi est consi­dérée comme l’une des plus grandes synagogues d’Egypte et du Proche-Orient. Elle a été attaquée à coups de canons par les forces françaises en 1798 lors de leur invasion de l’Egypte, lorsque Napoléon Bonaparte a ordonné sa démolition pour créer, à sa place, une zone militaire. Dans les années 1850 et pendant le règne de la famille royale de Mohamad Ali, elle a été reconstruite avec l’aide de la famille juive italienne Cicurel, qui vivait alors en Egypte. La construc­tion — un chef-d’oeuvre architectu­ral orné de merveilleuses décora­tions à l’intérieur comme à l’exté­rieur — est précédée d’un vaste jardin. Bâtie en deux étages dans le style d’une basilique juive, la syna­gogue est un bâtiment de forme rectangulaire dont l’entrée princi­pale est surmontée d’une étoile à six branches avec des écritures hébraïques qui représentent les dix commandements du prophète Moïse. « Le premier étage de l’édi­fice se compose de trois couloirs renfermant deux rangées de colonnes en marbre et en métal et une plateforme tout au fond, dédiée à la prière avec plu­sieurs rangées de sièges en bois et des lustres en verre et en argent suspendus au plafond. Une grande ter­rasse au deuxième étage peut accueillir plus de 40 femmes », explique Metwalli.

Il est à noter que cette synagogue, qui abrite aussi le tribunal juif, possède encore plus de 50 anciennes copies de la Bible ainsi qu’une collection de livres et de manuscrits juifs rares datant du XVe siècle et inscrits au patrimoine archéologique égyptien.

Pour sa part, l’archéologue Ahmad Abdel-Fattah explique que la synagogue était la place où se tenaient les fêtes juives et les mariages. Elle renfermait aussi une section pour enseigner le folklore et la musique classiques des juifs d’Egypte. « Ce lieu sacré était d’une importance historique en rai­son d’un mythe juif qui raconte que le prophète Eliyahu y est apparu après sa mort à un certain nombre de rabbins », explique Ahmad Abdel-Fattah, qui ajoute qu’au cours des années passées, le gou­vernement n’a pas accordé suffi­samment d’attention à ce genre de monuments malgré leur importance majeure pour la civilisation et l’his­toire égyptiennes. « Ils constituent un vrai témoin de l’époque de la tolérance religieuse et de la coexis­tence en Egypte au cours des siècles »renchérit Abdel-Fattah. Il ajoute qu’aujourd’hui, la situation a changé, la restauration d’Eliyahu Hanabi s’inscrivant dans le cadre d’un projet plus large pour le sau­vetage du patrimoine juif d’Alexan­drie. En effet, le ministère des Antiquités a récemment enregistré sur la liste du patrimoine trois cimetières juifs situés au centre d’Alexandrie (voir encadré).

La communauté juive était l’une des plus importantes communautés étrangères d’Alexandrie. Elle incluait 50 000 juifs aux origines diverses (des Marocains, Turcs, Italiens, Espagnols et Français) jusqu’à l’agression tripartite contre l’Egypte en 1956. La Perle de la Méditerranée abritait plus de 20 synagogues jusqu’en 1930. « Aujourd’hui, la scène a totale­ment changé, puisqu’il ne reste à Alexandrie en tout et pour tout que 9 juifs tout au plus et 5 synagogues, dont la plupart sont fermées, comme la synagogue de Menasha construite en 1860 dans le quartier de Manchiya, celle d’Eliyahu Hazan bâtie en 1928 dans le quar­tier de Sporting et la synagogue de Green, bâtie en 1901 à Moharram Bey », conclut Abdel-Fattah.

Trois cimetières juifs inscrits sur la liste du patrimoine

Le ministère des Antiquités vient d’inscrire trois cimetières juifs situés dans la région Est d’Alexandrie sur la liste des antiquités égyptiennes. Vieux de 170 ans, les cimetières de Chatbi 1, de Chatbi 2 et d’Azarita ont une importante valeur archéologique et historique. « Ces cimetières renferment des éléments archéologiques importants et des tombes d’une splendide beauté, dotées d’écritures historiques qui racontent la période pendant laquelle les juifs vivaient en Egypte. Ces tombes ont une grande valeur et doivent être préservées », déclare Mohamad Metwalli, directeur des monuments islamiques, coptes et juifs d’Alexandrie. Il ajoute que les trois cimetières renferment 20 000 tombes étalées sur 15 feddans où gisent environ 70 célèbres familles juives.

Les juifs d’Alexandrie ont construit leurs cimetières dans les quartiers les plus élégants de la ville, dans le style architectural juif et sur de vastes étendues. C’est sur la place de Khartoum, dans le quartier d’Azarita (quartier Est), qu’on trouve le plus grand d’entre eux, qui date de la seconde moitié du XIXe siècle. Ce cimetière renferme les tombes de gens modestes. Il ne se distingue par aucune décoration ni richesse architecturale. En même temps, il renferme la tombe de l’un des plus célèbres rabbins, le grand rabbin Amram. Un peu plus loin, à Chatbi 1, se trouve le cimetière des personnes aisées. Construit dans un style architectural magnifique, il remonte à la première moitié du XXe siècle. Il comprend les tombes de familles très connues de l’époque juive, les plus célèbres étant le baron Yaacoub de Menasha, fondateur de la communauté juive d’Alexandrie en 1870 et propriétaire de la synagogue de Menasha, à Manchiya (centre-ville d’Alexandrie). On y trouve aussi les Sawarès, une grande famille active dans le domaine de l’architecture et qui a construit le premier édifice de la Banque d’Alexandrie dans la ville. Les tombes de cette famille sont parmi les plus riches en termes de décoration architecturale.

Le troisième cimetière est situé dans le quartier de Chatbi 2 ou Al-Challalate, un peu plus loin, mais toujours dans la région Est d’Alexandrie. Il est caractérisé par des tombes construites dans le style architectural moderne. Il est actuellement fermé.

Source ahram

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